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Coronavirus au Burkina : Une «bête» en terreau fertile

«Le malheur ne vient jamais seul». Ce proverbe, bien de nos compatriotes se le sont rappelés tant, ces derniers jours, un enchaînement d’épreuves semble être aux trousses de notre pays, déjà à la croisée des chemins.

 

En effet, alors que les Burkinabè sortaient de la fièvre du 8-Mars, les uns avec des mines de lendemain de cuite, les autres avec des jambes de lendemain de djandjoba, ils ont été assommés, coup sur coup, par deux mauvaises nouvelles.

La première est venue du Yatenga, plus précisément de Dinguila et de Ramdola, des hameaux peuls, où quarante-trois personnes ont été massacrées.

Alors que le gouvernement pointe un doigt accusateur sur des individus armés non identifiés, bien des témoins présentent les assaillants comme étant des koglwéogo, déjà à l’origine d’une précédente tragédie, celle de Yirgou,  le 1er janvier 2019.

Ce jour-là, des dizaines de Peuls  pour les uns, des centaines pour les autres, ont été froidement assassinés par les mêmes groupes d’autodéfense en représailles à la mort du chef du village et de six autres personnes.

Avec les récents événements de Dinguila et de Ramdola, ce sont quarante-trois nouvelles victimes dont le sang vient entacher le tissu social dans un pays où le légendaire vivre-ensemble entre ethnies et religions se détériore de plus en plus.

Qui donc parviendra à enrayer la spirale infernale des conflits intercommunautaires dans laquelle le Burkina Faso sombre petit à petit sans que ni les Forces de défense et de sécurité, ni la justice ni même le gouvernement n’arrivent jusque-là à y apporter une thérapeutique adéquate et vigoureuse ?

Alors qu’en pareille circonstance la première des réponses reste un procès certes équitable mais impitoyable, l’institution judiciaire n’a pas encore brandi son glaive contre les criminels. Pire, sous la pression d’un groupe d’individus, elle a dû libérer le chef des koglwéogo de Boulsa, brièvement détenu dans le cadre de l’instruction du dossier de Yirgou.

Comme si le drame sécuritaire sur fond de conflits intercommunautaires ne suffisait pas, voilà que des motifs d’inquiétude surgissent du côté sanitaire.

En effet, à peine la fausse alerte du Chinois gardé en observation quelques jours passée, notre pays vient d’enregistrer, le dimanche 9 mars 2020, ses deux premiers cas de coronavirus.

Officiellement, devrait-on dire, car rien n’interdit de penser que la «bête» était parmi nous bien avant que sa présence ne soit confirmée par le ministère de la Santé.

On ne peut que nourrir de sérieuses inquiétudes face à cette bombe virale qui peut exploser à tout moment en Afrique, particulièrement dans des pays comme le nôtre.

Si malgré leurs moyens colossaux les pays développés semblent désemparés face à l’intraitable virus, qui crée la psychose, bouleverse l’économie mondiale et dérègle le commerce international, on tremble à l’idée de ses effets dévastateurs sur  des Etats vulnérables à tous points de vue.

A la fragilité de nos systèmes de santé publique et à l’insuffisance de nos moyens matériels et financiers pour apporter une riposte préventive à la propagation du Covid-19, vient s’ajouter l’autre grand problème, si ce n’est le grand problème, c’est-à-dire nous-mêmes.

Entendez par là nos comportements « s’en-fout-la mort » et nos mœurs « kafoulmayé », incompatibles avec la conduite à tenir face à la maladie.

Notre rapport particulier à l’hygiène et à la discipline collective, notre instinct de transgression des mesures publiques, notre propension à ruser avec le sort sont autant de facteurs démultiplicateurs du fléau.

Cela dit, la réponse gouvernementale à cette situation est tout aussi déterminante ; non seulement dans la prise de mesures préventives, mais aussi en matière de communication et de transparence.

Certes, il faut saluer la rapidité avec laquelle le ministre de la Santé, Claudine Lougué, a annoncé l’apparition des deux premiers cas sur notre sol. Mais comme on dit chez nous, c’est bien mais ce n’est pas arrivé.

En effet, quid, par exemple, de l’identité du couple porteur du virus ?

N’y avait-il pas lieu de procéder ici aussi, comme dans certains pays, notamment la France et l’Iran, où respectivement les nouvelles de la contamination du ministre de la Culture, Franck Riester, et du vice-ministre de la Santé, Iraj Harirchi, ont été rendues publiques pour que tous ceux qui ont été récemment en contact avec eux puissent se faire dépister à temps pour leur propre santé et celle de leurs familles ?

Si c’est vrai, comme le laisse entendre Dame rumeur, que dans notre cas, il s’agirait d’un couple de responsables religieux, cette exigence de transparence est d’autant nécessaire pour des raisons évidentes.

Alain Saint Robespierre

Dernière modification lemercredi, 11 mars 2020 19:12

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