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Transition malienne : Les militaires partent tout en campant sur leur position

 

Un militaire à la retraite est-il un civil ? A en croire le Comité national pour le salut du peuple (CNSP), qui a renversé le 18 août dernier le président Ibrahim Kéïta, la réponse ne souffre d’aucun doute ; alors que la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) lui avait enjoint de trouver au plus tard le 23 septembre un président et un Premier ministre, tous civils, pour conduire la Transition.

 

 

Le collège de désignation que la junte a mis en place a finalement sorti hier de son chapeau le nom du colonel major Bah Ndaw. Un choix qui aurait été imposé par les nouveaux hommes forts de Bamako qui espèrent à travers cette solution satisfaire l’organisation sous-régionale qui, dès la commission du putsch, a pris une batterie de sanctions et multiplié les pressions tous azimuts pour faire rendre gorge à la soldatesque. La CEDEAO sera-t-elle vaincue par cette stratégie du camouflage ? On attend de voir. A l’interne, le Mouvement du 5-juin, fer de lance de la contestation contre IBK, et qui jusque-là ne parle pas le même langage que les putschistes, devait tenir hier une rencontre pour se prononcer sur cette nomination.

 

L’oiseau rare qui vient d’être déniché pour présider la période transitoire, dont la durée n’est pas encore définitivement arrêtée, n’est pas vraiment un inconnu dans la faune politique malienne puisqu’il a été notamment ministre de la Défense en mai 2014.

 

Militaire de carrière ayant exercé dans l’armée de l’air, il a suivi une partie de sa formation dans l’ex-URSS d’où sa maîtrise du russe qu’il parle en plus de l’anglais et du français. Un parfait polyglotte dont les proches louent la rigueur.

 

C’est donc la deuxième fois que ce septuagénaire, il est né en 1950, est tiré de sa retraite pour exercer une fonction politique.

 

Une mission particulièrement difficile et sensible au moment où le pays de Soundiata Keïta est à la croisée des chemins, tombant de Charybde en Scylla, entre terrorisme endémique et l’instabilité politico-institutionnelle.

 

Il faut espérer pour lui et ses compatriotes qu’il saura mener le bateau battant pavillon Mali à bon port sans être un président postiche, juste là pour inaugurer les chrysanthèmes, pendant que le vrai pouvoir est ailleurs, entre les mains des putschistes.

 

On peut le craindre lorsqu’on voit qu’il a été flanqué d’Assimi Goïta, le chef de la junte, désigné vice-président. Preuve s’il en est encore que les militaires n’étaient pas prêts à lâcher totalement le morceau pour retourner dans leur caserne comme l’aurait souhaité la CEDEAO. S’ils ont quelque peu replié en laissant la tête de la transition, ils restent campés sur leur position en gardant la main mise sur la conduite des affaires de l’Etat.

 

Pour peu, on croirait que celui qui détient la réalité de la force militaire a été mis là pour tenir en laisse le colonel-major Ndaw qui, ayant fait valoir ses droits à la retraite et n’ayant pas de commandement, pourrait être à la merci du bientôt ex-CNSP.

 

On peut d’ailleurs se demander quel besoin on avait pour une période transitoire, dont l’architecture devait être légère, de créer un poste de vice-président, en plus de celui de Premier ministre, avec le risque que le trio de l’exécutif se marche sur les pieds. Sans oublier qu’un tel poste, dont l’utilité est plus que douteuse, est forcément budgétivore à un moment où le pays ne peut se payer le luxe de dépenses somptuaires.

Hugues Richard Sama

Dernière modification lemardi, 22 septembre 2020 22:04

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