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Attaques terroristes à l’Est : Sachons raison garder

Alors qu’au Nord une certaine accalmie sécuritaire commence à poindre à l’horizon, l’Est par contre est depuis quelques mois le théâtre d’attaques terroristes récurrentes.

 

En effet, dans cette zone, déjà en proie au grand banditisme, pas une semaine ne passe sans que « des individus armés non identifiés », pour emprunter l’expression officielle en vogue, fassent parler la poudre.

Le 11 août dernier, le véhicule d’une équipe de gendarmes chargés de la sécurité de la mine d’or de Boungou a sauté sur une mine artisanale. Bilan : six morts dont cinq gendarmes.

Le 28 août, la brigade de gendarmerie de Pama a été la cible d’hommes armés. Un véhicule de militaires venus de Fada pour soutenir les pandores a sauté à son tour sur un engin explosif. Sept soldats y laissèrent la vie. C’est la plus grande perte militaire après celle de Nassoumbou dans le Nord où, le 16 décembre 2016, douze personnes ont trouvé la mort dans une attaque contre le poste militaire du Groupement des forces armées antiterroristes (GFAT).

Le 29 août, des tirs nourris ont été entendus dans la zone de chasse présidentielle de Pama. Le feu a été mis au campement, et les voies d’accès truffées de mines.

Le 8 septembre, trois écoles dans les villages de Tankoualou et de Bargadé, dans la province de la Komandjari, ont été saccagées et incendiées.

Avant-hier samedi 15 septembre au petit matin, deux attaques ont été perpétrées dans la province de la Kompienga :   

la première, à Diabiga (60 km de Pama), a visé le domicile d’un leader religieux où se trouve une mosquée. Ce dernier a été froidement abattu de même que quatre de ses coreligionnaires. Un des blessés succombera plus tard.   

La seconde, à Kompienbiga (15 km de Pama), a eu pour cible un autre domicile où trois personnes d’une même famille ont été tuées.

Au lendemain de cette barbarie dans la Kompienga, des vidéos ont commencé à circuler à travers les réseaux sociaux. Sans qu’on sache si elles sont authentiques ou pas. On y aperçoit des individus enturbannés munis de fanions noirs à côté d’un pick-up. L’un d’eux, sans doute le chef, s’exprimant en arabe, a crânement revendiqué la tuerie. Si l’on s’en tient à la traduction qui a accompagné l’image, les auteurs de cette barbarie seraient des moudjahidines d’Al-Qaïda.

Pour la première fois, les attaques dans « le nouveau front de l’Est » sont l’objet de revendication.

Simple mise en scène pour brouiller les pistes ou preuve de la présence effective sur notre sol d’un tentacule de la pieuvre créée par Oussama Ben-Laden ? 

Au regard du mode opératoire de cette double attaque, il ne serait pas superflu de penser qu’elle porte la signature de Boko Haram, la secte islamiste nigériane. Car au Nigeria, au Niger, au Tchad où ils sévissent, les hommes d’Abubakar Shekau ont fait des mosquées l’une de leurs cibles privilégiées et de l’aube leur moment favori.     

Rappelons-nous que dans la lettre adressée à son supérieur hiérarchique, le directeur régional de la police de l’Est prévenait, entre autres, que « ces personnes viseraient à implanter des bases aux fins d’attaques terroristes dans cette zone et ses environnants. Si l’identité de ces individus reste inconnue, il y a que leur accoutrement et leur langue de communication laissent penser à des étrangers provenant probablement de pays voisins. Ils sillonnent la forêt pour la plupart à motos de grosse cylindrée et parfois avec des véhicules 4x4 ».

Malgré ces précieuses informations transmises par le plus haut cadre  de la police de l’Est, des autorités politiques, et non des moindres, s’obstinent, sans qu’on sache sur quoi elles se fondent ni à quelle fin, à distiller un autre son de cloche :

c’est le cas notamment du ministre d’Etat, Simon Compaoré, et de celui de la Sécurité, Clément Sawadogo.

Lors de la rentrée politique de leur parti, le MPP, le 15 septembre dernier, ils ont rivalisé de graves accusations contre des Burkinabè.

L’un pointant du doigt « des officines politiques qui se délectent de ces attaques » et l’autre tirant à boulets rouges sur l’ex-RSP dont des éléments seraient derrière « cette entreprise de déstabilisation du pays ».

Certes, nous ne disposons d’aucun élément d’information assez solide pour réfuter les incriminations de nos deux ministres.

Mais si ce qu’ils soutiennent est vrai, qu’attendent-ils pour nous en donner la preuve et  passer à l’action contre « ces officines politiques » ou cette ancienne garde prétorienne de Blaise Compaoré ? Car si des Burkinabè sont effectivement complices de ces actes terroristes ou s’ils en sont les auteurs, ils doivent être identifiés et châtiés à la hauteur de leur forfaiture. Et personne ne les défendra.  

Dans le cas contraire, si ces « individus non identifiés » ne sont toujours pas identifiés, c’est le cas de le dire, que l’on nous épargne certaines déclarations intempestives de nature à dresser des Burkinabè contre des Burkinabè. Attention à ne pas diviser la nation contre elle-même, car, comme le prévient Marc dans la Bible 3,25, « …si une maison est divisée contre elle-même, cette maison ne peut subsister ».

La situation sécuritaire dans laquelle le pays se trouve aujourd’hui est suffisamment préoccupante pour faire l’objet de toutes sortes de spéculations.  

 

Alain Saint Robespierre

Dernière modification ledimanche, 23 septembre 2018 19:39

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