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Présidentielle Cameroun : 3 morts pour un désir d'éternité

Une participation  moyenne, dans une atmosphère  tendue, voire belliqueuse, dans les deux régions anglophones mais plutôt calme et sereine dans le reste du pays : telles ont été les tendances dominantes du climat social qui a entouré le scrutin présidentiel, hier au Cameroun.

 

Si la guerre que promettaient les séparatistes  n’a pas eu lieu, Bamenda et Bue, les deux capitales régionales de l’Ouest,  avaient, le jour du scrutin, les allures de villes fantômes. Les habitants, du moins ce qui en reste après les importantes migrations vers des localités plus paisibles, se sont terrés chez eux, abandonnant les rues désertes aux patrouilles des Forces  de défense et de sécurité. En effet, 24 heures avant le scrutin, les capitales du Nord-Ouest et du Sud-Ouest ainsi que les zones jugées à risque avaient été bouclées par l’armée.

Néanmoins, le jour du scrutin des échanges de tirs ont eu lieu entre les forces loyalistes et des groupes isolés de séparatistes, notamment à Bamenda où trois d’entre eux ont été abattus. Par ailleurs, des incidents ont été signalés dans d’autres localités des régions anglophones. Ainsi à Bafut, dans la région du Nord-Ouest, des sécessionnistes ont tenté d'incendier un bureau de vote avant d'être repoussés. On a signalé aussi à Tanta, à quinze kilomètres de Bamenda, des échanges de tirs avec d'autres assaillants qui ont essayé de prendre d'assaut la résidence privée d’un dignitaire du régime. Autant d’incidents qui ont accru la peur des électeurs de ces régions d’aller voter.

Comme ils ont raison, ces observateurs de la scène politique camerounaise qui disaient que le suspense à cette présidentielle était plus lié au déroulement du scrutin qu’aux résultats attendus ! De fait, du Cameroun francophone à celui anglophone, ce scrutin aura été ambivalent : calme et paisible  dans l’un, tendu et perturbé dans l’autre. On peut alors dire qu’à défaut d’avoir empêché que l’élection présidentielle se tienne dans les régions anglophones, les séparatistes ont gagné le pari de la perturber fortement.

De fait, aucun des neuf candidats à cette présidentielle, y compris Paul Biya, n’a pu battre campagne dans les deux régions frondeuses à cause de l’insécurité qui y règne et ELECAM, l’organe chargé d’organiser  les élections, pour la même raison sécuritaire, a dû revoir à la baisse le nombre de bureaux de vote qui devaient s’y ouvrir. Ainsi, au lieu des 2343 bureaux initialement prévus dans la région du Nord-Ouest, seulement 79 ont été ouverts. Une réduction drastique qui facilite certes la protection des opérations de vote mais éloigne, en revanche, les bureaux de vote  des électeurs. Pas étonnant alors que les électeurs ne s’y soient pas bousculés et il est à craindre que dans ces régions, moins d’un électeur sur dix ait pris le risque d’aller glisser son bulletin dans l’urne.

Cette abstention record qui se dessine dans les régions anglophones va affecter inexorablement le taux de participation générale au scrutin. Au demeurant, outre le suspense lié au déroulement du scrutin, le taux de participation et le score de Paul Biya constituent  les deux  inconnus de cette élection aux allures de formalité pour le parti au pouvoir. Ainsi pour les résultats, pas de surprise à  attendre ! Rendez-vous dans deux semaines avec la Cour suprême pour constater que dans cette élection à un coup K.-O., le président-candidat succède à lui-même au palais d’Etoudi.

 

Zéphirin Kpoda

Dernière modification lelundi, 08 octobre 2018 23:18

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