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Pathologies du tube digestif : «Tout le monde a des hémorroïdes, mais tout le monde ne fait pas la maladie hémorroïdaire», (Pr Alain Bougouma, hépato-gastro-entérologue à l’hôpital Yalgado)

Les hépato-gastro-entérologues du Burkina Faso tiennent leur tout premier congrès scientifique les 18 et 19 octobre 2018 au CHU de Tengandogo.Les maladies hémorroïdaires, les hépatites B et C ainsi que les cancers du foie et du tube digestif sont, entre autres, les grandes problématiques sur lesquelles des spécialistes, venus d’Europe, des pays d’Afrique centrale, d’Afrique de l’Ouest et des 45 provinces du Faso, vont échanger et accorder leurs violons afin que la sensibilisation et les moyens de prévention de ces maladies soient renforcés. En ce jour d’ouverture de cette rencontre, nous vous proposons une  interview du Pr Alain Bougouma, hépato-gastro-entérologue, par ailleurs président dudit Congrès, réalisée par le service de communication de l’hôpital Yalgado.

 

 

Quel est l’intérêt d’un congrès scientifique comme celui qui s’ouvre ce jour ?

 

L’intérêt d’un congrès scientifique, c’est de réunir les acteurs de la santé pour échanger nos expériences et discuter pour trouver des solutions consensuelles aux  problèmes  de santé qui assaillent nos populations.

 

C’est le tout premier congrès des hépato-gastrologues. En matière d’organisation, êtes-vous  fin prêts ?

 

Organiser une activité de ce genre n’est pas toujours chose aisée. C’est une bataille que nous menons et qui n’est pas encore achevée, vu la modicité des moyens dont nous disposons. Mais nous pensons que le congrès pourra se tenir dans des conditions assez convenables pour nous permettre d’échanger sur les maladies de l’appareil digestif.

Nous attendons au moins 300 participants, qui viendront de la Belgique, des pays d’Afrique centrale (Congo-Brazzaville,  Cameroun, République Centrafricaine, Tchad), de tous les pays voisins du nôtre  et du Sénégal.

Vos échanges porteront sur les cancers du foie et les cancers du tractus digestif. Pourquoi avoir choisi ce thème ?

 

Il faut d’abord souligner que ce thème a déjà fait l’objet de réflexion et de discussions entre les membres de notre société savante, la Société burkinabè d’hépato-gastro entérologie et d’Endoscopie digestive (SOBUHGEED). Cela dit, il convient d’ajouter que le choix du thème a été dicté par la fréquence d’un certain nombre de  problèmes de santé qui assaillent nos populations et que nous rencontrons dans nos pratiques quotidiennes. Ces problèmes sont surtout liés aux cancers du foie et aux cancers du tube digestif. Ces pathologies étant de plus en plus fréquentes, nous nous devons d’alerter l’opinion sur la question afin qu’on trouve les solutions qui vont permettre de réduire ces types de cancers ; il s’agit d’un problème de santé publique.

 

Quels sont les causes ou facteurs de ces cancers ?

 

On sait que le cancer du foie est d’origine virale, il est dû notamment aux hépatites B et C, qui sont des tueurs silencieux. Généralement, le patient ne peut les découvrir qu’à un stade terminal, quand le cancer ou la cirrhose sont déjà installés. Dans ce cas, il n’y a pratiquement plus de solutions adéquates. Pourtant, ce sont des maladies qu’on peut prévenir ; malheureusement les patients nous arrivent tardivement.

 

L’hépatite, qu’est-ce que c’est exactement ?

 

L’hépatite est une inflammation du foie ayant plusieurs causes : d’abord à des virus, au nombre de  cinq types, à savoir A, B, C, D et G, d’où les appellations d’hépatite A, d’hépatite B, d’hépatite C, d’hépatite D et d’hépatite G.

Mais parmi ces virus, ce sont ceux des hépatites B et C qui affectent généralement le foie. Ce sont ces deux virus qui sont majoritairement responsables des problèmes de santé publique du fait qu’ils engendrent des complications tels les cirrhoses et les cancers. Quant aux autres types d’hépatites, il faut savoir qu’ils sont moins dangereux, et on peut en guérir, même sans traitement.

 

Il y aura également des échanges sur les maladies hémorroïdaires…

 

Oui. Les maladies hémorroïdaires sont de plus en plus fréquentes ; malheureusement  on en parle peu. Cela est dû au fait  que ces  maladies touchent une région du corps, l’anus, dont les gens ont honte de parler. C’est ainsi que certains patients  préfèrent aller chez les tradipraticiens, où on n’a pas besoin d’une ordonnance qui pourrait amener le patient en pharmacie. Il y en a même qui pensent que la maladie hémorroïdaire ne  peut être soignée à l’hôpital, ce qui n’est pas du tout fondé.

Il faut souligner que pour beaucoup de gens, toute affection anale est un problème hémorroïdaire. Ce qui n’est pas vrai, car il y a beaucoup d’autres maladies qui concernent l’anus mais qui n’ont rien à voir avec les hémorroïdes.D’où la nécessité, en cas de problème, de recourir à un spécialiste qui va utiliser des moyens d’exploration de l’appareil anal, du  rectum et même du colon afin de savoir exactement s’il s’agit d’une maladie hémorroïdaire ou pas.

En effet, à partir d’un certain âge, tout individu peut certes  avoir une maladie hémorroïdaire, mais il peut y avoir bien d’autres raisons de saigner. De l’enfant au vieillard, nous avons tous des hémorroïdes, mais nous ne faisons pas tous la maladie hémorroïdaire. La maladie hémorroïdaire est une inflammation des veines de l’anus qui fait que l’individu a mal ou saigne.

 

Quelles en sont les causes ?

 

Elles sont nombreuses. La maladie peut être due à une constipation chronique, à une diarrhée prolongée et chronique, à une alternance diarrhée et constipation, à des positions debout et assise prolongées, à la pratique du sport équestre, à de longues distances sur moto, à la période de grossesse chez certaines femmes.

En ce qui concerne l’alimentation, il faut dire que la graisse en tant que telle n’a pas d’influence sur la maladie hémorroïdaire. Mais c’est la consommation de mauvaises graisses, des huiles de mauvaise qualité, la surconsommation des graisses animales qui peuvent conduire à des lésions précancéreuses de l’intestin. Cela peut entraîner des polypes qui pourraient engendrer le cancer de l’intestin, de l’anus ou  du rectum.

 

Que faire pour éviter ces maladies du tube digestif ?

 

D’abord, il faut toujours manger propre, bien se laver les mains avant de manger. Surtout, il faut manger tout ce qui est produit naturellement, sans pesticides. Il est conseillé de  manger les légumes en général et d’éviter d’utiliser le formol pour conserver le poisson. Pour ce qui est de la prévention des virus des hépatites, il faut simplement se faire vacciner.  Il faut se faire dépister, et si l’on est porteur de virus, suivre les prescriptions des personnels de santé qualifiés.

Est-ce que nous avons assez de spécialistes pour ce faire ?

 

Depuis un certain temps, nous formons sur place des hépato-gastro-entérologues pour notre pays et même d’autres. Nous en avons déjà formé une quarantaine, sans compter les promotions qui vont bientôt sortir. Toutefois, le niveau des plateaux techniques des formations sanitaires doit être relevé, car nous avons des appareils souvent usés. Cela joue sur la motivation des jeunes que nous formons.Nous sollicitons, à cet effet, l’appui des mécènes et des opérateurs nationaux pour nous aider à réussir le premier congrès. Leurs appuis sont nécessaires pour nous permettre de faire avancer la science et d’améliorer la lutte contre la maladie. Les spécialistes, en discutant entre eux sur des problèmes de santé, permettent de faire bouger les lignes au profit des populations.

Propos recueillis par

Alima Séogo Koanda

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