Présidentielle malgache : Rajoelina et Ravalomanana, le match de la revanche
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Le premier tour de l’élection présidentielle malgache s’est déroulé dans un calme remarquable. Les 36 candidats se sont investis dans la campagne, tambours battants, avec des moyens très disproportionnés. En effet, pendant que les candidats les plus en vue, Andry Rajoelina, Marc Ravalomanana et Hery Rajoanarimampianina, utilisaient de grands moyens logistiques et motivaient leurs potentiels électeurs avec de multiples gadgets, les 33 autres avaient du mal à faire le tour de toutes les régions du pays pour se faire connaître.
Cette disproportion criarde de moyens explique-t-elle la bipolarisation des votes des 10 millions de Malgaches qui étaient appelés aux urnes ce mercredi ? Oui et non. Oui, parce que plus un candidat a les moyens de se faire connaître des électeurs et de leur vendre ses idées, plus il a des chances de les séduire. Quand s’y ajoutent les gadgets à la pelle, la décision de vote est plus facilement arrachée. Au contraire, moins le candidat a les moyens de mousser sa campagne moins il a des chances de susciter l’adhésion des votants à son ambition présidentielle. Hélas, la distribution de cadeaux aux électeurs sous nos tropiques participe à convaincre de la pertinence du projet politique. Une vérité d’autant plus prégnante que l’analphabétisme et la conception paternaliste de la fonction présidentielle n’aident pas à un vote clairvoyant des citoyens.
Mais la grande débauche de moyens peut se révéler insuffisante à appâter les électeurs. Le président sortant, Hery Rajoanarimampianina, l’aura appris à ses dépens. Son score de 2,93% aux résultats partiels provisoires du premier tour jure avec les investissements consentis durant la campagne électorale pour défendre son bilan. Il est alors très probable qu’il sera éliminé du second tour de cette présidentielle qui, selon toute vraisemblance, va se jouer entre Andry Rajoelina, crédité provisoirement de 43,5% des voix, et Marc Ravalomanana, 42,44%. Si ces tendances du scrutin étaient confirmées par la CENI, le 28 novembre au plus tard, on aurait assisté et d’un, à une nette décantation entre les 36 prétendants à la magistrature suprême et de deux, à un vote bipolarisé entre Rajoelina et Ravalomanana, deux ennemis jurés en politique dont l’âpre rivalité avait aggravé l’instabilité institutionnelle de la Grande Ile.
En tout cas, pour l’un et l’autre, ce second tour aura les allures d’un match de revanche. Et, les mêmes causes produisant les mêmes effets, plus d’un observateur redoute de voir les vieilles querelles, liées au contrôle de l’appareil d’Etat, et la contestation des résultats de l’élection, ressurgir entre les deux hommes. Si c’est le cas, cette élection présidentielle, longtemps perçue comme la panacée de la crise institutionnelle dont souffre le pays depuis 15 ans, pourrait l’aggraver avec des troubles sociaux. De fait, on se rappelle que c’est une manifestation des partisans de Rajoelina en janvier 2009, violemment réprimée par Ravalomanana alors au pouvoir, avec à la clé une centaine de morts, qui a été la boîte de Pandore qui a entraîné la Grande Ile dans les secousses institutionnelles dont elle peine encore à se sortir. On croise alors les doigts pour que le sempiternel problème d’égo de ces politiciens désireux d’être califes à la place du calife ne brise pas la fragile paix sociale dans le pays.
C’est connu, en Afrique, c’est une gageure que d’organiser une élection présidentielle dans les délais, dans la paix sociale et de ne pas vivre une crise plus ou moins violente à la proclamation des résultats avec les récurrentes contestations qui l’accompagnent. A Andry Rajoelina et à Marc Ravalomanana de nous démentir en montrant qu’ils ont pris de l’étoffe en tirant les leçons du passé et que le second tour, prévu pour le 19 décembre, les départagera en toute transparence et dans la paix.
Zéphirin Kpoda
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