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Rapport 2017 de l’ASCE-LC : Les magouilles prennent l’ascenseur dans l’Administration

L’Autorité supérieure de contrôle d’Etat et de lutte contre la corruption (ASCE-LC) a présenté à la presse le vendredi 30 novembre 2018 les résultats de son audit sur la gestion du gouvernement pour l’exercice 2017. Ceux-ci révèlent que les mauvaises pratiques sont en hausse au sein de l’Administration.

 

 

Les rapports de l’ASCE-LC semblent ne pas valoir un pet de lapin. Ils se suivent et se ressemblent : même quand ils lèvent le voile sur des irrégularités, aucune sanction n’est  prise   contre leurs auteurs, sauf quand il s’agit de gros poissons. Pire, passé l’émoi de l’insurrection populaire et la peur de voir le couperet tomber, les filous de l’administration ont recommencé à  tremper, avec plus d’entrain, les babines dans la soupe. C’est le principal enseignement du rapport portant sur la gestion 2017 (29 décembre 2016 au 31 décembre 2017) de la présidence du Faso, du Premier ministère et des départements ministériels. Sur les quatre domaines audités, à savoir commandes publiques, comptes de dépôt, régies d’avance et caisse de menues dépenses, carburant et lubrifiant, les fins limiers ont constaté une baisse des indicateurs de bonne et   saine gestion, comparativement à 2016. Concernant les marchés publics, les hommes de Luc Marius Ibriga ont décelé une explosion de la commande par les procédures exceptionnelles. Une hausse que les enquêteurs expliquent en partie par les procédures par entente directe  (gré à gré) des ministères éligibles aux dispositions du décret du 14 juillet portant allègement  des conditions de recours à la procédure d’entente directe.

Les comptes de dépôt et les régies d’avances (Ndlr : comptes ouverts par les ministères pour des dépenses spéciales »,   ne sont pas non plus épargnés par les mauvaises pratiques : non-respect des procédures de dépenses, dépenses irrégulières ou inéligibles et absences de pièces justificatives, ont, entre autres, été soulevés par les gendarmes anti-corruption.

Les précédentes investigations des gardiens des finances publiques avaient montré que le carburant constituait une véritable poule aux œufs d’or dans l’Administration. Cette année, malgré la persévérance d’irrégularités dans l’acquisition et la consommation des produits pétroliers, le  constat  est que les flibustiers en costard ont  moins pompé dans ce pactole. La présidence du Faso, sous le régime de Blaise Compaoré, qui était principalement pointée du doigt s’est dotée d’un texte régissant la gestion du carburant. D’une manière générale Luc Marius Ibriga note qu’au sommet de l’Etat, on a fait un important ménage  pour plus de transparence. A titre d’exemple l’enquête,  a  t-il indiqué, n’a pas constaté d’attributions irrégulières de marchés irréguliers au premier ministère en 2017.

Dans leur parcours sur le chemin de la transparence, les fins limiers ont croisé des peaux de banane, notamment la rétention des pièces comptables, ce qui les a obligé à passer par d’autres voies. Luc Marius Ibriga a notamment confié qu’à la présidence du Faso, l’administration freinait des quatre fers pour retarder l’audit. L’ASCE-LC s’est alors adressée au président du Faso, qui a tout de suite donné le feu vert aux contrôleurs.

Pour  l’atteinte de l’objectif du PNDES qui concerne la promotion de  la bonne  gouvernance politique et administrative, les « fouineurs » prescrivent, entre autres, l’effectivité et l’opérationnalisation des conseils de  discipline  au sein des administrations pour mettre fin à la culture de l’impunité et de la médiocrité, de même que l’élaboration de manuels de procédures pour mettre fin à l’éternel argument de ceux qui se font prendre dans le filet : «Je ne savais pas ». Plus globalement, l’ASCE-LC espère ne plus prêcher dans le désert avec la mise en œuvre de ses  recommandations qui ne manquent jamais.

 

Hugues Richard Sama

 

« Ce qu’on reproche à Barry, c’est ce qu’on reproche aux autres ministres »

 

 

Le rapport 2017 de l’ASCE-LC, qui n’est rendu public que maintenant, avait déjà commencé à circuler dans une certaine presse, notamment en son volet concernant la gestion du ministère de la Culture. L’ancien titulaire du portefeuille, Tahirou Barry, était mis en cause pour des  dépenses « sans bases légales » estimées à 477 millions de francs CFA par les fins limiers. Il s’agit en réalité du rapport provisoire qui, comme le veut la pratique, est envoyé aux concernés pour d’éventuelles réactions. Et si le document confidentiel s’est retrouvé sur la place publique, ce n’est pas du fait de l’ASCE-LC, a assuré son premier responsable, pour qui l’Autorité n’est pas instrumentalisée et n’est pas en cabale contre l’ex-ministre. D’ailleurs, a-t-il tenu à préciser, «ce qu’on reproche à Barry, c’est ce qu’on reproche aux autres ministres ». De fait, le rapport de synthèse montre clairement que la Culture n’arrive pas en tête des mauvaises pratiques. A titre illustratif, au sujet des comptes de dépôt, pour un montant total des dépenses irrégulières chiffré à près de 6 milliards de francs CFA, le ministère de la Défense (près de 2 milliards) tient la palme, suivi du MENA, pour un montant presque équivalent. Pour les régies d’avances, le MENA tient de loin la tête (plus de 3 milliards). Vient ensuite le département de la Santé (plus de 237 millions). Montant total des irrégularités : environ 3 846 000 000 francs FCA. Le ministère de la Famille s’illustre, lui, par le pompage irrégulier du budget du carburant (plus de 115 millions de francs CFA), suivi de celui de la Justice (plus de 71 millions).

 

H.R.S.

 

 

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