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Fermeture mairie de Karangasso Sambla: « Nous avons tout fait pour éviter l’affrontement » Antoine Attiou, gouverneur des Hauts-Bassins

Les frères « ennemis » de Karangasso Sambla étaient lundi au gouvernorat des Hauts-Bassins. Une rencontre de médiation qui n’a malheureusement pas abouti à la réouverture immédiate de la mairie du fait de l’intransigeance des frondeurs, qui continuaient d’exiger la destitution du maire et de son conseil. Mais le fil du dialogue n’est pas pour autant rompu, à en croire le gouverneur de la région des Hauts-Bassins, Antoine Attiou. Ce dernier espère une sortie de crise dans les prochains jours grâce à ce comité de médiation mis en place et présidé par la déléguée régionale du médiateur du Faso, Awa Traoré. C’est du moins ce qui ressort de cette interview qu’il nous a accordée mardi dernier dans son bureau.

 

 

Que se passe-t-il à Karangasso Sambla ?

Depuis plus d’une semaine, nous avons eu vent d’une crise à la mairie de Karangasso Sambla. La raison : un différend qui oppose une partie de la population au maire et à son conseil. Les récriminations faites à cette municipalité sont : la mauvaise gestion des affaires de la commune, la non-justification d’une dépense de 120 millions de francs reversés à la commune dans le cadre du plan de gestion environnementale et sociale du barrage de Samandeni, la gestion de l’ambulance qui aurait été achetée, la révocation jugée abusive d’un agent d’assainissement, l’attribution frauduleuse d’une réserve administrative, la gestion des recettes générées par les taxes perçues dans le cadre de l’exploitation de la carrière, les propos discourtois du maire envers certaines forces vives du département. Etc. Autant de raisons qui ont été invoquées pour justifier la fermeture de la mairie. En plus, les contestataires exigent la destitution du maire et la dissolution du conseil.  

Quelles sont déjà les actions entreprises pour trouver des solutions à cette crise ?

La mairie a été fermée jeudi et nous avons dépêché le préfet afin qu’en sa qualité d’autorité de tutelle rapprochée, il engage des pourparlers avec les différents protagonistes. Mais la démarche de celui-ci n’a pas abouti. Il y a même eu des risques d’affrontements, voire un affrontement, au sujet du marché et qui a occasionné des blessés admis à l’hôpital Souro Sanou. Mais à ce jour, tous ces blessés ont regagné Karangasso Sambla.

La situation est-elle inquiétante ?   

En vue de la prévention d’un conflit qui se dessinait, j’ai alors dépêché le haut-commissaire de la province samedi pour rencontrer les frondeurs, c'est-à-dire ceux qui ont fermé la mairie. La mission à Karangasso Sambla visait d’abord à faire comprendre à ces derniers que rien ne justifie la fermeture d’une mairie en pareille circonstance. En effet, c’est une institution communale qui rend des services à toute la population. Il ne faut donc pas voir la  seule personne du maire, mais plutôt l’intérêt général. C’est la population dans son ensemble qui est pénalisée par l’arrêt de l’établissement de certains actes administratifs tels que les actes de  naissance, de mariage, de décès ou tout autre document dont elle a besoin pour divers dossiers. Et c’est encore dans cette mairie que les taxes sont perçues pour le développement de la commune. Donc pour nous, il est hors de question de fermer la mairie. La démarche du haut-commissaire n’a malheureusement pas abouti puisque les frondeurs ont refusé de remettre les clés.    

Faut-il alors penser que la rencontre de Bobo était celle de la dernière chance ?

Dans tous les cas, le fil du dialogue n’est nullement rompu. Et cela est très important pour la suite des négociations, même si les frondeurs campaient sur leurs positions au cours de la rencontre lundi au gouvernorat. Ils disent qu’ils ne remettront pas les clés tant que le maire, son secrétaire général et son conseil municipal n’auront pas rendu le tablier. Je leur ai dit qu’à cela ne tienne, mais qu’il est hors de question de garder les locaux de la mairie fermés, quels que soient les griefs faits à ces personnes. J’ai fait aussi comprendre qu’une mairie, c’est l’administration publique, ce qui n’a rien à voir avec des querelles politiciennes. Mais ils sont restés sur leurs positions.

Et le maire Aboudramane Ouattara dans tout ça ?

Le maire leur a donné des explications sur certaines de leurs  récriminations. Les frondeurs, qui avaient à leur tête le professeur Sado Traoré de l’Université Nazi-Boni, ne semblaient nullement satisfaits. Encore une fois nous leur avons demandé de remettre les clés et ils ont refusé d’obtempérer. Nous aurions pu engager une épreuve de force mais nous avons estimé bon de toujours privilégier le dialogue. C’est après qu’ils nous ont demandé de leur laisser un temps de réflexion qui va durer deux mois. Nous avons trouvé cela très long, donc nous n’avons pas accepté cette proposition.

Est-ce à dire que c’est l’impasse ?

La rencontre de Bobo a finalement débouché sur la mise en place d’un comité restreint de négociation. Cette structure est dirigée par la déléguée régionale du médiateur du Faso, Awa Traoré.  Elle est composée d’un représentant du haut-commissaire de la province, du secrétaire exécutif de l’Association des municipalités du Burkina (AMBF), du maire de Fo, en sa qualité de président de l’AMBF dans la région et, bien évidemment, de la police et de la gendarmerie. C’est ce comité qui doit poursuivre les négociations.  Et ce matin ( Ndlr : nous étions mardi 12 février 2019) le comité est venu me rendre compte que les frondeurs ont décidé de remettre les clés dans deux semaines, c'est-à-dire la semaine prochaine.

L’espoir d’un retour au calme est donc permis ?

C’est notre souhait et c’est l’objectif visé à travers les actions que nous sommes en train de mener. On peut, pour l’instant, se satisfaire d’un retour au calme. Mais c’est un calme précaire, puisque nous n’avons pas encore la réaction du maire. Donc il faudra encore attendre l’évolution de la situation sur le terrain. Car, avant qu’ils n’ouvrent la mairie, on ne peut pas être certain qu’il n’y aura pas de rebondissement. Mais au moins on a pu éviter l’affrontement jusque-là. Les négociations vont se poursuivre et je reste optimiste quant à une réouverture prochaine de la mairie.  

Qu’attendez-vous du maire pour une sortie définitive de la crise ?

Ce que nous reprochons au maire, c’est le déficit de communication. Il a un devoir de redevabilité vis-à-vis de ses populations. C’est parce qu’il n’y a pas eu de communication permanente entre le maire et ses administrés qu’il y a aujourd’hui des problèmes. Nous conseillons alors au maire de trouver des cadres d’échange au sein desquels il pourra rendre compte régulièrement de sa gestion municipale pour éviter de tels incidents à l’avenir. 

 

                                                        Propos recueillis par Jonas

Apollinaire Kaboré

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