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Dans nos locaux : Quand le Wogdg-Naaba nous rend visite

En ce matin du 21 février 2019, les locaux de votre journal ont reçu une visite aussi majestueuse qu’inhabituelle : celle du Wogdg-Naaba Bulga, le chef de terre de Ouagadougou, accompagné d'une dizaine de personnes dont ses notables. L’illustre visiteur qui fêtera son basga (fête coutumière) annuel le 2 mars prochain célèbre en même temps son 10e année de règne. C’est dans ce cadre que se situe cette visite, question de sortir des sentiers battus des manifestations coutumières habituelles. Venir s’informer des conditions et des circuits de production d’un journal imprimé, n’est-ce pas une note de modernité qui doit être saluée à sa juste valeur ?

 

 

Des présidents d’institutions et des chefs de gouvernement, nous en avons déjà reçu. Que dire des membres de gouvernements, des grands hommes politiques, des acteurs de la société civile ? Et nous prendrons garde d’omettre les dignitaires religieux, les plénipotentiaires et autres. Bref, la modeste cour de L’Observateur Paalga a vu défiler toutes sortes de personnalités d’ici et d’ailleurs. Mais c’est la première fois qu’un chef coutumier ès qualités, c’est-à-dire avec toute sa cour, foule le sol de notre organe. Comme nous l’avons déjà dit, ce chef, c’est le Wogdg-Naaba Bulga, chef du tenpeelem (terre sacrée) de Ouagadougou. Agé de 35 ans, Naaba Bulga, Arsène Ilboudo à l’état civil, était accompagné, du Saman-Naaba, du Tambok-Naaba, du Silmi-naaba, du Kam-Naaba, du Mangr-naaba, du Bolnog-Naaba et enfin de l’imam de Wogodgo, un Yarga bon teint comme il se doit et le seul à être resté coiffé pendant toute la visite, en plus de notre hôte.

Après l’accueil protocolaire et un entretien avec le responsable du canard, une visite guidée des différents services a permis à l’illustre visiteur et à sa suite de découvrir les différentes étapes de la production du journal. Passé ce tour de services puis une signature du livre d’or du journal, Naaba Bulga nous a situés sur l’objet de sa visite. Il a expliqué que cette immersion s’inscrit dans le cadre de la célébration du 10e anniversaire de son règne qui aura lieu le 2 mars prochain. A cette occasion, il veut sortir de l’ornière, en d’autres termes innover. Mais derrière le choix de L’Obs. pour cette visite se cache une raison historique, à entendre Naaba Bulga, lequel a invoqué la position de doyen de la presse privée quotidienne du Burkina qu’occupe le journal. Derrière cette visite, il y a cette volonté de Naaba Bulga de montrer à ses notables, et, au-delà, à ses pairs « que le rôle du chef va au-delà des coutumes et des traditions. Il faut aller aussi vers les activités modernes auxquelles s’adonnent les sujets. »

L’occasion a aussi été propice pour le Wogdg-Naaba de nous décliner son rôle dans l’organisation du royaume de Ouagadougou et sa relation vis-à-vis du Moro, qui n’est plus à présenter. Des explications de notre interlocuteur, l’on a retenu que le Wogdg-Naaba est le dépositaire des coutumes, alors que le Moro, en tant que souverain du royaume, s’occupe, lui, de l’administration et de la population. « La terre appartient au Wogdg-Naaba, et la population au Moro ». En d’autres termes, comme l’a rappelé le Naaba-Bulga, « la tradition règne et la coutume gouverne ». A ce titre, la gestion des sacrifices et rituels relève  de son pouvoir.

 

Le Wogdg-Naaba et l’autre casquette d’un chercheur

 

De ce qu’enseigne l’histoire, le chef de terre de Ouagadougou est de descendance des Ninsi qui sont les premiers occupants de la région, ce qui, soit dit en passant, est de nature à justifier les braves Samo, qui sont une variante des Ninsi, lorsqu’ils disent que la terre de Ouagadougou leur appartient. A en croire le Naaba Bulga, leur histoire remonte à six mille ans, soit cinq mille ans avant l’arrivée des Nakomsé du Gambaga qui formèrent avec les Ninsi et bien d’autres ce qu’on appelle aujourd’hui les Moosé.

Aujourd’hui, a poursuivi celui qui fêtera ses dix ans de gouvernance le 2 mars prochain, les Ninsi sont tous ‘’noyés’’ dans ce grand groupe ethnique des Moosé. Comment cela s’explique-t-il ? « Simplement parce qu’à l’arrivée du Moro, il y a eu une entente selon laquelle le chef de terre devait garder sa terre mais en se mettant sous la coupe du souverain mossi et en lui confiant la population. Ainsi, les autochtones que sont les Ninsi sont devenus des Moosé par cette occasion. Lorsqu’on parle aujourd’hui de Moosé, cela ne renvoie pas au sens premier du terme, selon Naaba Bulga.

A l’entendre, ce terme devrait renvoyer à tous les habitants du territoire appartenant au chef de terre, ces habitants confiés au Moro.

Mais le Naaba Bulga ne se contente pas d’être un chef coutumier : il est également un chercheur de haut niveau puisqu’il est doctorant à l’Institut de recherche en sciences appliquées et technologies (IRSAT) où il prépare une thèse sur l’impact des aérosols désertiques sur le rendement du système photovoltaïque.

Que pense-t-il de la situation sécuritaire difficile que traverse le pays ? Naaba Bulga est convaincu que la chefferie traditionnelle peut jouer un rôle important pour un retour à la paix et la stabilité d’antan, à condition de mettre le pardon en avant. Une autre condition est la réconciliation nationale car une seule main ne peut pas porter le pays, il en faut plusieurs de différentes ethnies, étant donné que « l’une des richesses du pays est l’unité, le vivre-ensemble ». Lui, Naaba Bulga, l’a visiblement bien compris, en témoigne la composition de sa cour, composition qui n’est autre qu’un cocktail ethnoculturel où l’on retrouve par exemple Moosé, Yarsé et Peuls. 

 

Bernard Kaboré

(Stagiaire)

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