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FESPACO 2019 : Un Etalon diplomatiquement correct ?

Rideaux ! Vous pouvez maintenant quitter les salles obscures et passer à autre chose. Ouverte le samedi  23  février 2019 au stade municipal  par le président du Faso, un acteur d’un tout autre genre, celui de la scène politique en  l’occurrence,  la 26e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou a en effet rangé ses caméras le samedi 2 mars dernier au Palais des sports de la capitale.

 

Par le sacre de Joël Karekezi qui a enfourché l’Etalon d’or de Yennenga en direction de Kigali. Il devient ainsi le premier Rwandais à inscrire son nom au Palmarès de la plus grande manifestation cinématographique du continent africain.

 

« The mercy of the jungle », c’est ce film antimilitariste qui critique l’absurdité de la guerre qui a valu à ce jeune réalisateur de se hisser sur la plus haute marche du podium du FESPACO. Plutôt à la surprise générale, à commencer par celle de l’intéressé, arrivé presque par effraction dans le milieu du septième art puisque celui qui, à seulement huit ans, a perdu son père lors du génocide de 1994 a effectué des études de biologie, chimie et d’éducation avant d’intégrer Cinécours,  une école de cinéma canadienne en ligne.

 

En emportant l’adhésion du jury de cette cuvée 2019, c’est donc la consécration  pour lui à seulement trente-quatre ans.  Ça ne peut pas être le fait du hasard, quand bien même les artistes et le grand public ne seraient pas toujours d’accord avec les choix des jurés, que ce soit ici ou ailleurs.

 

Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que dans de nombreux festivals il est institué un prix du public, tant il est vrai que souvent les   profanes, voire certains critiques pas toujours outillés pour apprécier la qualité intrinsèque des œuvres, ne s’attardent pas sur les considérations purement techniques : scénario, son, image, décor, jeu d’acteur, musique, montage, costumes, etc.  

 

En tout cas, on voit mal le président de la section longs métrages, Ahmed Bedjaoui, universitaire algérien, directeur artistique du festival du film engagé d’Alger et ses camarades,  qui jouent aussi leur réputation dans l’affaire, oindre ce qui doit être loin d’un navet  et qui, en plus de la distinction suprême, a obtenu le prix de la meilleure interprétation masculine avec son principal acteur, Marc Zinga. Comme on dirait en droit, il faut de ce fait s’incliner devant l’autorité de la chose jugée, cela d’autant plus que le jury est souverain.

 

Pour autant, sans renier le mérite du lauréat, il y a quelque chose de gênant dans l’histoire, et si ça se trouve, lui-même doit être le premier embarrassé. Pour la simple raison que, comme par hasard, le Pays des mille collines était l’invité d’honneur de cette édition du cinquantenaire et que le président Paul Kagame a effectué exprès le déplacement à la capitale burkinabè. On lui aura donc doublement déroulé le tapis rouge et, pour un  peu, on pourrait être tenté de croire qu’on a eu droit à  un palmarès diplomatiquement correct.

 

 

Si tel devait être le cas, ce ne serait du reste pas la première fois dans les annales de la biennale. On se rappelle en effet qu’après le premier conflit entre le Mali et le Burkina en 74-75, la diplomatie  du grand écran semble avoir tourné à fond, tant et si bien que Baara de Souleymane Cissé avait fort opportunément remporté le premier prix en 1979. Ce qui, soit dit en passant, n’enlevait rien à la valeur du produit et de son auteur qui,  quatre ans plus tard, récidivera avec Finyé (Le vent). Comme quoi, l’art peut très bien s’accommoder des préoccupations politico-diplomatiques. 

 

La Rédaction

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