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58 morts dans l’explosion d’un camion-citerne à Niamey : L’argument trop facile de la pauvreté

58 corps calcinés, 37 personnes gravement brûlées, 5 véhicules et 25 motos réduits en ferraille. Tel était le décor apocalyptique qu’il y avait dans la nuit du dimanche au lundi 6 mai aux alentours du mur d’enceinte de l’aéroport international Hamani Diori de Niamey.

 

Résultat de l’explosion d’un camion-citerne qui s’était renversé un peu plus tôt en face d’une station-service avec ses 36 000 litres d’essence, suite visiblement à une mauvaise manœuvre du chauffeur.

La densité de la population dans la zone explique en partie le bilan particulièrement lourd du sinistre, causé sans doute par ceux qui étaient venus siphonner le carburant et qui ont fini en torches humaines.

Si c’est la première fois que ce genre de drame survient au Niger, de nombreux autres pays sur le continent sont habitués à  ce type de tragédie. Le scénario est chaque fois le même : un véhicule de transport d’hydrocarbure accidenté ou en difficulté est assailli par des badauds venus récupérer le carburant, une étincelle et c’est l’hécatombe. Ce fut par exemple le cas en janvier 2009 au Kenya (122 personnes tuées), en novembre 2016 au Mozambique (90 morts) et en juillet 2010 en RDC (au moins 230 décédés).

Et que dire du Nigeria, pays voisin du Niger, qui doit détenir le triste record en la matière puisque là, c’est même souvent des pipelines qu’on siphonne avec des conséquences tout aussi désastreuses. Jugez-en vous-même : plus de 250 riverains morts calcinés à Warri en juillet 2000, 8 personnes tuées et 15 autres brûlées grièvement dans l’Etat de Cross River en janvier 2019, 104 morts et une cinquantaine de blessés près de Port Harcourt en juillet 2012, 9 décès à Lagos en juin 2018, au moins 30 morts à Aba en octobre 2018, et on en oublie beaucoup.

Comme c’est souvent le cas quand arrive ce genre de catastrophe, on brandit l’argument trop facile de la pauvreté des populations pour qui avoir même un litre d’essence relève parfois du parcours du combattant, et qui se frottent donc les mains si une occasion de se ravitailler gratis se présente comme ce fut le cas dans la nuit de ce dimanche noir dans la capitale nigérienne.

On ne peut que s’incliner devant la mémoire des disparus, dont certaines sont sans doute de simples victimes collatérales, et compatir à la douleur des blessés et des familles éplorées, mais la misère ne aurait être une excuse ici. Il y a en effet comme un mélange détonant de bêtise, d’insouciance et d’inconscience face à un danger pourtant évident. Mais comme on n’est jamais instruit par le malheur des autres, demain au Niger ou ailleurs, on trouvera encore des gens qui vont jouer avec leur vie en allant siphonner en toute connaissance du danger des oléoducs ou des camions-citernes. Après on dira avec cette fatalité bien africaine que c’est le destin, que c’est Allah qui l’a voulu. Mais à voir systématiquement la main de la providence dans nos malheurs, on exonère du même coup l’Homme de ses propres responsabilités.

 

Hugues Richard Sama

Dernière modification lejeudi, 16 mai 2019 21:45

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