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Conférence des magistrats du Burkina : Catharsis de la Justice après quatre années d’autonomie

Comment rétablir le dialogue entre les magistrats pour un meilleur fonctionnement des institutions judiciaires ? Comment poursuivre la lutte contre la corruption et les manquements sur la base d’un strict respect des procédures afin d’avoir une justice forte, crédible et respectueuse des droits humains ? C’est ce à quoi tenteront de répondre la quatre-vingtaine de magistrats émanant de plusieurs juridictions du pays, à travers la toute première Conférence des magistrats du Burkina, qui se tient du  27 au 29 mai 2019, à Ouagadougou. 

 

Initiée par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), la Conférence des magistrats du Burkina se veut, pour les acteurs du milieu, l’occasion de marquer une halte et de jeter un regard rétrospectif sur les quatre dernières années, notamment en matière de progrès accomplis, de difficultés rencontrées, de forces et de faiblesses constatées dans les textes adoptés afin de mieux envisager l’avenir. C’est du reste ce qu’a indiqué la Secrétaire permanente du CSM, Victoria Kibora/Ouédraogo qui expliquait tout l’enjeu de la tenue de ce forum de 72h. Pourquoi ces quatre dernières années ? C’est, en effet, en 2015 qu’ont été organisés les Etats généraux de la Justice ; lesquels ont engendré des engagements contenus dans le Pacte national pour le renouveau de la Justice. Ainsi, des réformes ont été adoptées dans la foulée : loi portant statut de la magistrature, loi portant composition, attributions, organisation et fonctionnement du CSM (25 août 2015). La plus importante est sans conteste, la révision constitutionnelle du 5 novembre 2015 qui a consacré à son article 132 la rupture du lien ombilical entre l’exécutif et le judiciaire en ce sens que le président du Faso n’était plus le président du CSM, même s’il reste le garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire. Le ministre de la Justice, Garde des sceaux n’en était plus aussi le vice-président. «Mais une chose est d’acquérir son indépendance et une autre est de savoir s’en servir», a déclaré la SP, par ailleurs présidente du comité d’organisation de la rencontre. Selon elle, la révision de la Constitution étant postérieure à l’adoption des lois ci-dessus citées, il convenait alors d’opérer un travail d’harmonisation en vue de corriger les imperfections constatées. De plus, s’il y a une affaire qui a émaillé le Conseil, c’est bien celle de la commission d’enquête, instituée pour faire la lumière sur les faits de corruption et de manquements à la déontologie commis par les magistrats. L’on se rappelle, dans cette dynamique, l’organisation des sessions disciplinaires qui a entraîné de vives critiques par voie de presse et suscité un climat délétère au sein du corps, mettant de facto à mal l’indépendance du pouvoir judiciaire. Et pour ne rien arranger, quatre mois après les sessions du Conseil de discipline, le CSM a cessé de fonctionné, s’étant trouvé dans une situation de blocage due à des raisons indépendantes de la volonté de ses membres. Il s’agit notamment de la non-disponibilité du décret de nomination des nouveaux membres devant permettre à l’organe de poursuivre ses activités.

 

Une conférence qui vient à point nommé

 

«C’est face à cette situation que le Secrétariat permanent entend faire le bilan à mi-parcours de l’institution dans sa nouvelle formule depuis sa création jusqu’à maintenant avec comme objectif, le rétablissement du dialogue entre les magistrats pour un meilleur fonctionnement des institutions judiciaires et la poursuite de la lutte contre la corruption et les manquements sur la base d’un strict respect des procédures afin d’avoir une justice forte, crédible et respectueuse des droits humains de tous les citoyens», a signifié Victoria Kibora/Ouédraogo.   

Le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, a, quant à lui, magnifié une rencontre qui vient à point nommé en ce qu’elle offrira un cadre de dialogue et d’échanges aux magistrats autour des difficultés rencontrées dans l’application des réformes législatives issues de la période de la transition. «Ces réformes, intervenues quelques mois avant la révision constitutionnelle, semblent comporter des incohérences avec certaines dispositions constitutionnelles et leur relecture s’avère nécessaire pour un alignement aux dispositions de la loi fondamentale », a précisé Bessolé René Bagoro. Et de donner un exemple de contradiction : «Quand on prend l’esprit de la Constitution, les procureurs du Faso sont nommés de la même manière que les juges du siège, c’est-à-dire par appel à candidatures. Or, si on doit tenir compte de la loi qui a été adoptée, les procureurs continuent d’être nommés suivant proposition du ministre de la Justice ». Le ministre a confié qu’il a déjà mis en place un comité chargé de mener la réflexion dans ce sens et s’est, d’ores et déjà, engagé à reverser les recommandations issues des travaux à ce comité pour une prise en compte en vue de l’élaboration d’un avant-projet de loi relative au CSM et au statut de la magistrature.     

Aboubacar Dermé

 

Encadré :

Au menu des échanges

 

-         Lecture comparée des statuts français et burkinabè de la magistrature

-         La procédure disciplinaire des magistrats au Sénégal

-         Forces et limites des réformes des lois portant sur le statut de la magistrature et portant sur le Conseil supérieur de la magistrature. 

 

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