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Marche-meeting : « Blaise Compaoré est parti, mais Compaoré Blaise est resté » Bassolma Bazié

A l’issue de la course-poursuite engagée entre la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) et les manifestants le 16 septembre 2019, nous avons tendu notre micro à la tête de proue de la marche, Bassolma Bazié. Il nous a expliqué ce qu’il pense de la mesure gouvernementale et de l’attitude des forces de l’ordre.

 

 

 Comment vous vous portez à l’issue de cette chaude journée où les forces de l’ordre ont usé de gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants ?

 

Je me porte à merveille, et  je me suis assez bien requinqué.

 

Y a-t-il des blessés ? Si oui combien sont-ils ?

 

Il y a eu des blessés. Nous sommes en train de faire le point. Ceux qui ont été recensées ont été pris en charge, et nous attendons de faire le point exhaustif à la fin.

Pouvez-vous revenir succinctement sur le film des évènements ?

 

C’est désolant. C’est une victoire pour nous d’autant plus que ceux qui sont au pouvoir viennent de montrer à la face du monde que c’est eux, pendant 27 ans, qui ont véritablement conduit l’ancien président Blaise Compaoré dans ce bourbier.  Ils ont fini par le chasser dans les méandres de l’histoire pour revenir sur le fauteuil présidentiel. En esprit et en corps, ils n’ont changé ni dans le fond ni dans la forme. Ce sont les mêmes acteurs. Cela nous a permis d’avoir une preuve concrète pour les populations à l’endroit desquelles nous avons réaffirmé que  Blaise Compaoré est parti, mais Compaoré Blaise est resté. C’est le même système qui demeure depuis 1983.

 

On sait que les autorités n’ont pas approuvé la tenue de cette marche. Est-ce qu’en bravant cette interdiction, vous ne vous mettez pas en porte-à-faux avec la loi régissant les manifestations publiques ?

 

Cela indique clairement que nous avons des  dirigeants qui n’ont aucunement un esprit républicain. Quand vous organisez une manifestation, il y a une note d’information qui est adressée aux autorités sur laquelle il est marqué le nom de 3 responsables avec leurs contacts. Si une manifestation est jugée illégale, il faut la laisser se dérouler et en interpeller les leaders après, mais je note que ni ceux qui à  la tête ni ceux qui les conseillent n’ont le niveau, à plus forte raison les capacités de gouverner puisqu’ils nous ont montré qu’ils ne maîtrisent pas  le contenu des textes. Je veux parler des secrétaires généraux, des gouverneurs, hauts-commissaires et préfets. Nous ne sommes pas dans ce cadre. Tous ceux qui interviennent directement dans l’action gouvernementale, c’est 10 jours francs pour les autres corps et 5 jours francs pour les ouvriers. De ce point de vue, nous avons déposé un préavis qui couvrait ceux qui allaient en grève.

S’ils  estiment qu’il faut  forcément 15 jours francs, les prochaines fois, nous allons le respecter.  Nous prendrons le soin d’inviter la presse à venir dénombrer combien de secrétaires généraux, de ministres, de hauts-commissaires de gouverneurs nous allons retrouver au niveau des piquets de grève. De ce point de vue, la grève portant sur la loi 45-60 a été scrupuleusement  respectée, et c’est légal.

Pour ce qui concerne la manifestation, il faut se référer à la loi 22 du 21 octobre 1997, précisément à ses articles 4, 7, et 10 qui  disent qu’il faut en informer l’autorité à 3 jours francs ouvrables de la manifestation. Là aussi nous l’avons fait  sur 14.  Si on prend 14 divisé par 3, nous avons 4 fois respecté les conditions de cette loi. Les autorités   par parachutage arrivent à des postes de responsabilité par les méandres de l’histoire, dans la promotion de la médiocrité et ne peuvent donc pas maîtriser les lois. Concernant ceux qui les représentent,  il ne suffit pas de jouer les Django à travers les rues de la ville de Ouagadougou, en s’en prenant à des manifestants aux mains nues. Ceux qui ont les capacités sont invités à rejoindre les unités qui sont face aux terroristes. Ce n’est pas honorable que le responsable des unités spéciales se promène à travers Ouagadougou comme un brave homme. L’histoire retiendra qu’il n’en est qu’un piètre visage et il va en porter toutes les conséquences.

 

D’aucuns pensent qu’il y a des objectifs inavoués à travers cette marche. Quel commentaire en faites-vous ?

 

Est-ce que le fait de lutter pour  qu’il  y ait une  dotation conséquente des forces de défense et de sécurité afin qu’elles tiennent face aux terroristes est  inavoué ? En quoi demander que le pillage des ressources de l’Etat, tel l’exemple  de charbon  fin dans des wagons  se promenant dans la nature, prenne fin est un objectif inavoué ? Est-ce que  demander que cesse le chevauchement des années universitaires et scolaires  est inavoué ? En quoi  exiger qu’il y ait un fichier unique sur le foncier de sorte à mettre fin  pour  S’interroge Bassolma Bazié. C’est plutôt les personnes qui estiment que les revendications faites par les syndicats dont nous sommes les responsables   qui ont des objectifs inavoués.  Avoir des ambitions, c’est  transformer  le peuple burkinabè en un peuple orphelin, en herbe sauvage  qu’on pourrait  fouetter sans qu’il ait un répondant. Mais cette situation, dit-il, n’arrivera pas. Car le peuple burkinabè aura toujours des porte-parole  aguerris,  engagés et  déterminés, ayant un  esprit de sacrifice pour faire face à toute velléité de vouloir le réduire au méandre. Toutefois il faut constater à travers  l’adoption du nouveau code pénal un moyen de réduire au silence les journalistes. C’est historiquement  maladroit que ceux qui se considèrent comme des insurgés adoptent un tel code. De ce fait il nous appartient de nous assumer, car  ce  n’est pas du journalisme  lorsqu’il est écrit que telle ou telle chose  a été dite  par RFI ou France24.

 

Est-ce que les objectifs visés ont été atteints, étant donné que la marche s’est terminée en queue de poisson ?

 

Les objectifs ont été largement atteints  et vont au-delà de nos  attentes. Aujourd’hui nous allons au-delà des 45 provinces. Mais nous vérifions le nombre de  communes, sur les 351 communes existantes, qui ont pris part à la manifestation. Une chose qui  semble évidente est que la répression n’était probablement pas dirigée contre toute la marche vu qu’il n’y a pas eu de répression ailleurs qu’à Ouagadougou. L’objectif visé par cette répression était de mettre mal à l’aise les premiers responsables, parmi lesquels je figure, afin que le message ne soi pas livré. Mais les autorités ont compris qu’il ne suffisait pas de porter atteinte à la vie d’un individu pour bloquer tous les porte-parole du peuple. J’ai toutefois été momentanément absent de la marche,  mais cela n’a eu aucun incident sur la diffusion du message. De ce fait  nous sommes engagés, car ayant  des hommes capables de prendre à tout moment le flambeau pour poursuivre le combat. Concernant le déroulement de la marche, nous avons montré un exemple de maturité face au monde entier et  pour lequel il y avait les caméras  braquées. Et cela traduit  un signal fort à l’endroit de nos gouvernants.

 

Y a-t-il eu des arrestations en votre sein puisque les autorités avaient annoncé des représailles si toutefois la marche avait lieu ?

 

A l’heure où je parle,  je ne peux communiquer sur des cas d’arrestation. Mais si arrestation  il  y en a, je vous en aviserai. Mais en attendant  tout le monde est sain et sauf, et nous  tenons à souhaiter un prompt rétablissement aux blessés. Une chose est certaine : celui  qui a donné l’ordre aux forces de l’ordre d’être là alors que leur place est au Sahel assumera devant l’histoire  l’entière responsabilité de tout dégât qui adviendrait.

 

W. Harold Alex Kaboré

Roukiétou Soma  (Stagiaire)

Dernière modification lemardi, 17 septembre 2019 22:33

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