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Nouveaux titres de transport : Arrêt à la DGTTM

Les locaux de la Direction générale des transports terrestres et maritimes (DGTTM), à Ouagadougou, ne désemplissent pas depuis qu’elle a commencé à établir les titres de transport nouvelle formule, c’est-à-dire le permis de conduire, la carte grise numérisés et la plaque d’immatriculation. Déjà qu’en temps normal les files étaient longues devant les guichets, elles sont  désormais inépuisables depuis qu’a été lancée  cette campagne  de renouvellement des titres de transport.  Face aux bousculades qui s’ensuivent  et qui mettent à rude épreuve la patience des usagers, toutes les techniques  de débrouillardise  et de courte échelle sont mises à profit : est de celles-là le recours  aux intermédiaires couramment appelés margouillats qui, eux, ont le temps  et la patience  de passer la nuit sur les lieux, histoire d’être les premiers le lendemain à déposer les dossiers à l’ouverture des guichets. Mais alors pourquoi  se donner tant de peine pour se procurer  les nouveaux sésames puisque les usagers ont jusqu’en  2023  pour se conformer à la nouvelle donne ? Sans prétendre trouver une quelconque rationalité à l’impatience des usagers, allons  sur les lieux.

 

 

 

Il est un peu plus de 14h ce mardi 20 août 2019 devant les guichets de la Direction générale des transports terrestres et maritimes (DGTTM). Documents d’identité en main, Jean Bationo, commerçant, juge ce moment propice pour s’acquitter d’une obligation : mettre aux nouvelles normes  son permis de conduire.

Mais il a à peine le temps  de s’aligner  qu’il est déjà  15 heures et donc l’heure de la fermeture des guichets. Il reviendra demain. Mais d’autres, n’ayant ni le temps ni la patience de faire ces va-et-vient, optent  pour la débrouillardise et la politique du raccourci, à savoir le recours aux démarcheurs moyennant rétribution.

Il s’ensuit  que, pour la plupart, ceux qui prennent d’assaut chaque matin  les guichets de la DGTTM  sont justement ces intermédiaires. Eux ont la patience d’attendre même  si ce n’est pas toujours facile.

L’un  d’entre eux déclare, d’un ton exaspéré, qu’il lui arrive  de passer trois jours de suite  devant les guichets sans pouvoir déposer le moindre dossier. Raison pour laquelle, eux, ils y élisent carrément domicile à la belle étoile. « Nous  quittons nos domiciles pour passer la nuit dans les nids  de moustiques sans obtenir gain de cause », renchérit-il.

Sur le plan sécuritaire, la DGTTM se trouvant dans une zone rouge, à quelques pas du commissariat central, ils sont l’objet  de toutes sortes de tracasseries lors des patrouilles  nocturnes de la police quand elle vient à passer sur les lieux. Cela débouche parfois sur des courses-poursuites, ajoute le nommé Yacouba Konané.

Mais nos démarcheurs n’en ont cure, car pour ces jeunes,  qui n’ont d’autre gagne-pain que ce genre d’activité, c’est une période de vaches grasses dont il faut savoir profiter, d’autant plus qu’ils sont fortement sollicités.

 

Pourquoi un tel engouement?

 

Le premier responsable du ministère des Transports, de la Mobilité urbaine et de la Sécurité routière, Vincent Dabilgou, lors de sa conférence de  presse du 14 août 2019 en rapport avec ces nouveaux titres, assurait que les usagers ont jusqu’en 2023 pour être en règle. Pourquoi donc de tels embouteillages à la DGTTM alors qu’il reste ce délai de quatre bonnes  années à courir ? Est-ce  pour pouvoir se vanter  d’être parmi les premiers à détenir les nouveaux documents ou la crainte qu’à la dernière  minute, c’est-à-dire en 2023, l’affluence soit  plus monstre encore qu’aujourd’hui ?   On ne sait trop.

Le lendemain 21 août, un autre démarcheur poursuit la narration  de la veille en nous expliquant comment ils s’organisent entre eux pour avoir accès le plus tôt possible aux guichets.

«Au cours de la nuit, dit-il, aux environs de minuit, nous procédons nous-mêmes à un appel pour établir le rang de ceux qui sont là. Avant 7h du matin, cet appel est réitéré dans le but de s’assurer qu’il n’y a pas  d’intrus infiltrés ».

Mais ils ont beau y veiller, il y a toujours  de petits malins qui font fi des rangs.

Face à  de telles velléités de tricherie, les bousculades sont légion, et  ça fulmine de partout. «Voilà des gens qui ont quitté tranquillement leur maison à  7h et veulent nous devancer dans le rang, nous qui avons  dormi ici. Ce n’est pas normal», s’offusque un des démarcheurs.

Pour mieux s’autodiscipliner et éviter le désordre, surtout après le passage du ministre de tutelle qui était venu visiter la DGTTM ce jour-là,  un groupe se retire sous un arbre pour en discuter. Mais ce fut peine perdue. Car dès le lendemain la bousculade a repris de plus belle, obligeant la police à faire usage de lacrymogènes pour ramener le calme.

 

Tous ces désagréments, les usagers en général, les démarcheurs en particulier, les imputent à la DGTTM. Le nombre limité de guichets en est la principale cause, à les écouter : «Il y a juste 4 guichets pour toute la population de Ouagadougou. De plus, ces guichets, qui sont censés ouvrir à 7h 30, c’est avec une bonne demi-heure de retard que la majorité ouvre souvent pour refermer avant l’heure prescrite », tonne AbdoulRahimSinaré. Pour cet élève de terminale reconverti dans ce métier de démarcheur  pour meubler et également rentabiliser ses vacances et qui a quitté sa bicoque depuis 3h du matin, le bout du tunnel est encore loin. Il se trouve dans une file visiblement courte, mais ô combien longue à ses yeux. Les lignes semblent ne pas  bouger puisque chaque démarcheur a en sa possession plusieurs dossiers, explique-t-il sans pour autant perdre espoir. Ses compagnons, eux non plus, ne résistent pas à l’envie de se lâcher dans notre micro : «Il faut que la  DGTTM change sa manière de travailler», fulmine Bachirou Bikenga. Et de brandir un récépissé de dépôt de dossier d’immatriculation d’une voiture datant du 26 juillet dernier. Normalement, à l’en croire, la plaque lui devait être remise 7 jours plus tard, à savoir le 1er août. Mais voilà que, jusqu’au 20 du même mois, il ne l’avait toujours pas. «Ils nous donnent des délais qu’ils passent leur temps à prolonger avec des explications  qui ne sauraient satisfaire : « Ce n’est pas encore prêt».  Facile en effet à dire mais  difficile  à accepter pour le démarcheur.

 

De bonnes affaires malgré tout

 

Malgré tout, il doit y avoir de bonnes affaires à la DGTTM ! C’est ce que reconnaît  en tout cas l’un d’entre eux. Mais alors à combien peuvent s’élever leurs prestations par dossier ? Et selon quelles modalités de calcul ? Au pourcentage ? A la tête du client, répondent-ils. En recoupant les informations, nous apprenons que pour le renouvellement de la carte grise et de la plaque d’immatriculation d’une moto, l’usager dépose dans les mains  du démarcheur la coquette somme de 22 000 francs CFA contre 16 200 francs officiellement. En ce qui concerne les véhicules quatre roues les montants sont bien sûr plus élevés : 45 000 contre 28 000 francs officiellement. (Confer encadré 2)

Autre lieu, autre décor. Nous sommes à TM diffusion, l’une des entreprises concessionnaires de plaques d’immatriculation. Là, il n’y a pas foule ou peut-être sommes-nous arrivés à un moment de faible affluence. En tout cas, on y perd moins de temps.

En fait de concessionnaires, ils sont au nombre de 13 dont 5 étaient déjà fonctionnels à la date du 20 août. Qui mieux est, certains de ces concessionnaires dépêchent des agents  à la DGTTM pour démarcher  des clients.  Une fois les quittances péniblement acquises à la DGTTM, c’est là qu’il faut se rendre pour la plaque proprement dite.

 

Mais pourquoi renouveler ces titres de transport et pourquoi maintenant ?

 

Pour bon nombre d’usagers, cette opération ne vise rien d’autre qu’à renflouer les caisses de l’Etat. Mais tout le monde n’est pas de cet avis. C’est le  cas d’Emile Sawadogo qui  n’a  pas encore la nouvelle plaque. Pour ce maîtrisard, la mesure vise plutôt  la sécurité. Elle va contribuer à réduire les cas de vol d’engins. Propriétaire d’un engin à deux roues, il déplore cependant les coûts, qui seraient élevés. Il se demande pourquoi débourser autant pour renouveler sa plaque et sa carte grise  qu’au moment de la première acquisition. Thomas  Millogo, fonctionnaire venu fixer sa nouvelle plaque de couleur jaune, va dans le même sens en expliquant que la nouvelle mesure va permettre d’identifier réellement chaque véhicule et son propriétaire.  

En quoi  cette nouvelle mesure est-elle réellement sécurisante ? Quelle sera la durée de vie  de ces nouveaux documents ? En raison des vacances ministérielles, nous n’avons pas  eu d’interlocuteurs avisés  pour répondre à ces questions.

Mais, sans être un expert du système, Joseph Sidibé, directeur de TM diffusion évoluant dans le domaine depuis 2000, donne quelques éléments d’appréciation. Selon lui, le nouveau système bénéficie d’une sécurité fiable. «Entre ce que nous faisions avant et ce qui est fait aujourd’hui, il y a une nette différence», précise-t-il avant d’expliquer le processus (voir encadré 1).

 

Assiata Savadogo

 

 

Encadré 1 :

Un système sécuritaire bien ficelé

 

«Lorsque nous recevons une demande de confection de plaque, nous voyons d’abord quel type de plaque correspond au véhicule, notamment s’il s’agit d’un véhicule administratif, de particulier, d’ambassade, d’ONG, etc. L’ensemble des cartes grises et des plaques confectionnées délivrées est faits à travers le logiciel de l’administration où chaque type de plaque est doté d’un code QR.  De plus, il est affecté à chaque concessionnaire un certain nombre de numéros. Donc quand nous devons concevoir une plaque, avant son importation, l’administration nous communique le numéro qu’elle doit porter. Par la suite, nous vérifions que la carte grise est authentique. La prochaine étape : elle est intégrée dans le système général de la Direction des transports. Son authenticité avérée, nous faisons la lecture de l’étiquette. L’étiquette est unique et individuelle, et contient des informations relatives à l’identité du propriétaire et à celle du véhicule. C’est à l’issue de tout cela  que nous avons le droit de placer  la plaque».

A priori cette plaque, selon Joseph Sidibé, ne peut pas être falsifiée. Sauf si les entreprises n’exécutent pas correctement leur travail. De plus, en  cas de contrôle, l’agent de police à travers un lecteur de code-barres peut voir, sur les paramètres de sécurité de la plaque, l’identité du véhicule et celle de son détenteur. Et si elles ne sont pas conformes avec les informations contenues sur la carte grise ou si elles sont illisibles, cela signifie que la plaque n’est pas authentique. Pour l’instant ce sont 1550 plaques qui ont été posées par l’entreprise.  

 

 

Encadré 2

Les tarifs  officiels

 

Tarifs des prestations relatives  aux cartes grises payables dans les régies  de recettes de la DGTTM et des directions générales

 

Désignation de la prestation

 

Tarifs

Première mise en circulation/véhicules charge utile ≤ à 1000 kg

10 000

Première mise en circulation/véhicules charge utile ˃ à 1000 kg

13 000

Première mise en circulation/vélomoteurs et motocyclettes, tricycles et quadricycles  à moteur

6 000

Changement de propriétaire/ Véhicule charge utile ≤  à 1000 kg

10 000

Changement de propriétaire/véhicules charge utile ˃ à 1000 kg

13 000

Changement de propriétaire/vélomoteurs et motocyclettes, tricycles et quadricycles à moteurs

6 000

Duplicata véhicule charge utile ≤ à 1000 kg

14 000

Duplicata véhicule charge utile ˃ à 1000 kg

17 000

Duplicata vélomoteurs et motocyclettes, tricycles et quadricycles à moteur

11 000

Transformation - RTI + carte grise véhicules lourds et autocars

 81 000

Transformation - RTI + carte grise  véhicules légers et minibus

56 000

Transformation - RTI + carte grise vélomoteurs et motocyclettes, tricycles et quadricycles à moteur

16 000

Renouvellement  nouveau  format (détérioration, expiration, levée de gage, immatriculation particulière, banalisation, changement région, etc.)

6 000

Renouvellement ancien format

6 000

Inscription de gages + carte grise/véhicules charge utile ≤ à 1000 kg

24 000

Inscription de gages + carte grise/véhicules charge utile ˃ à 1000 kg

36 000

Inscription de gages + carte grise/vélomoteurs et motocyclettes, tricycles et quadricycles à moteur

21 000

Certificat de mise en circulation  international ancien format (carte grise international)

10 000

 

Les timbres fiscaux autrefois exigibles et apposables sur les cartes grises sont compris dans les tarifs des prestations ci-dessous fixés, à l’exception du timbre fiscal de 200 francs apposable sur le formulaire  de demande de  carte grise et du timbre fiscal de 5 000 francs apposable sur le formulaire de demande de vérification de véhicule dans les cas de première mise en circulation qui sont exigibles en nature.

 

Prix des plaques d’immatriculation payables chez les concessionnaires

 

Véhicules ou engins concernés

Nombre de plaques

Prix unitaire

Prix total

Véhicules automobiles autres que les engins à deux roues

2

11 000

22  000

Remorques et semi-remorques

1

11 000

11 000

Engins à deux roues soumis à immatriculation

1

10 000

10 000

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