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Débits de boissons à proximité des écoles : Des parents d’élèves sonnent la fin de l’anarchie

Les débits de boissons aux abords des établissements scolaires, où toutes sortent de bières coulent à flots les douze mois de l’année, sont un phénomène tellement répandu qu’il peut passer pour un fait divers. Pourtant cette situation trouble le sommeil des parents d’élèves. Le mardi 28 janvier 2020, des hommes de médias ont fait le constat avec eux dans les arrondissements 03, 10 et 11 de Ouagadougou. Les chefs de famille demandent au maire de la capitale, Armand Béouindé, de prendre ses responsabilités.

 

 

L’ambiance autour de certaines écoles à Ouagadougou laisse à désirer : des élèves qui fument et boivent avant, pendant et après les heures de cours. Tout cela, sous le regard impuissant des premiers responsables des établissements scolaires concernés. Un beau matin, pendant que Léokadi Ramdé, conseillère principale d’éducation, et ses collègues étaient en conseil de classe, le proviseur a reçu un appel  anonyme l’informant que des élèves du lycée municipal de Sigh-Noghin, à la sortie nord de Ouaga, se la coulaient douce dans un débit de boissons à proximité de leur lieu d’apprentissage. Grande était leur surprise quand une fois sur les lieux, ils ont constaté que le groupe était en majorité constitué de filles. Leurs parents en ont alors été avisés et l’école leur a infligé des sanctions. Mais ces actions sporadiques sont loin de mettre un terme au goût prononcé que les jeunes gens ont très tôt pour la bibine. Pour la conseillère principale, les élèves subissent une sorte de «harcèlement» des tenanciers de  débit de boissons, car c’est la première chose qui leur saute aux yeux dès qu’ils franchissent la cour de l’école. «Les installations attirent nos élèves. Ils sont tentés d’y faire un tour. Nous voulons un assainissement de notre cadre de vie pour mieux faire notre travail», a plaidé l’éducatrice. Selon le recensement fait par la commune de Ouaga, sur les 35 installations autour du lycée Sigh-Noghin, il y a que 2 occupants qui ont des papiers en bonne et due forme.

Au lycée municipal Bogodogo, à l’arrondissement 10, le phénomène est moins développé. Un seul débit de boissons est visible. Les occupants des lieux sont au nombre de 4 et aucun n’a d’autorisation d’occupation du domaine public. Une chose qui inquiète le proviseur, Martin Kaboré, car les élèves pourraient y avaler des repas pas du tout hygiéniques.  «Nous avons aux alentours du lycée des kiosques où on vend de la nourriture. Mais nous ignorons si les mesures d’hygiène sont respectées.  C’est fort probable qu’il y ait des produits illicites en vente, mais nous n’arrivons pas à y mettre de l’ordre». S’il n’y a pas une affluence de commerçants autour du lycée municipal de Bogodogo, cela est dû au fait que l’école vient de bénéficier d’une clôture. Ces derniers jours, les responsables de ce lycée reçoivent des demandes à la pelle. Etant des personnes averties du comportement vicieux de certains commerçants, les responsables de l’école ont demandé du temps pour examiner minutieusement les requêtes. «Nous demandons l’accompagnement de la mairie pour assainir ce milieu. Depuis la construction du mur, il y a des particuliers qui nous approchent pour installer des boutiques et des kiosques tout autour. Pour l’instant, nous avons refusé de donner une suite à leurs demandes. Nous entendons travailler de concert avec la mairie pour l’examen des différents dossiers, de sorte que les commerces qui seront autour du lycée soient en phase avec les besoins de l’éducation de qualité que nous voulons donner aux enfants».

«On nous demande de quitter les lieux, où est-ce que nous allons partir ?», c’est la ritournelle chaque fois qu’il y a une opération de déguerpissement en vue. Ablassé Sana, propriétaire de quincaillerie à proximité du lycée Rimvougré dans le quartier Yamtenga, non loin de Rayongo, l’a répété avec amertume. Son commerce constituant sa seule source de revenus, il se demande comment il va nourrir sa famille si la mairie lui intime l’ordre de quitter les lieux. «Nous avons aussi des enfants qui suivent les cours comme les autres. Si nous n’arrivons pas à solder la scolarité, est-ce que l’administration va les laisser suivre gratuitement les cours ? Où allons-nous manger ? Nous ne savons pas où aller», s’est-il lamenté. En son âme et conscience, le plaignant savait quand il installait ses pénates que c’était de façon provisoire. Donc il n’est pas contre le déguerpissement si l’opération devait avoir lieu. «Nous ne nous y opposons pas, seulement nous ne voulons pas que ça soit brusque». Le lycée Rimvougré, situé à l’arrondissement 11, détient la palme des occupations anarchiques. Il y a au total 162 occupants dont aucun n’a présenté d’autorisation d’installation même si quelques-uns ont brandi des reçus de contribution à l’aménagement du domaine public.

Quand les enfants boivent et se saoulent, bonjour les dégâts. Et leurs parents trinquent aussi. C’est pourquoi depuis novembre 2018 la coordination des associations des parents d’élèves de la région du Centre a interpellé les autorités compétentes sur la dégradation de la situation aux abords des établissements. Elle a dit avoir insisté pour que des actions soient menées pour garantir aux élèves, aux enseignants et au personnel administratif un cadre sécurisé pour une éducation de qualité. Malheureusement, a déploré Adama Yago, président de la Coordination, leur lettre est restée sans réponse.  «Nous avons le sentiment que l’autorité communale ne nous écoute pas et n’entreprend rien en vue de trouver des solutions aux problèmes que nous soulevons et qui sont bien réels», a affirmé le président. Soucieux de l’avenir de leurs enfants, la Coordination a demandé aux autorités communales de prendre incessamment des mesures urgentes pour débarrasser les alentours des établissements des installations anarchiques et d’y mettre fin aux  commerce de produits tels que la cigarette et les boissons alcoolisées ; cela, en concertation avec tous les acteurs impliqués dans le fonctionnement des établissements scolaires.

Quelle est l’autorité qui délivre les autorisations d’occupation : la commune de Ouagadougou ? Les maires d’arrondissements ? S’il y a déguerpissement, est-il prévu un site pour accueillir les déguerpis ? Quel type de commerce peut-on tenir à proximité des établissements scolaires ?  Mystère et boule de gomme. La commune de Ouaga n’a pas voulu se prononcer.

 

Akodia Ezékiel Ada

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