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Crash d’un hélicoptère à Koubri : Que s’est-il passé ?

L’armée de l’air burkinabè a perdu le 31 janvier 2020 un hélicoptère au cours de ce qui semblait être un banal exercice de routine. L’accident, qui n’a pas fait de victime, a eu lieu à Nambé, un village de la commune de Koubri, à une trentaine de kilomètres de Ouagadougou. De source bien informée, l’accident serait survenu suite à une mauvaise manœuvre de jeunes pilotes en entraînement.

 

 

 

Nambé est une bourgade située à environ 3 km  à droite de la route nationale 5, peu après le péage à la sortie de Ouagadougou. Vendredi  vers 8h, les habitants ont été alertés par un bruit. Un hélicoptère venait de finir son vol au sol dans une zone inhabitée du village. Et il ne s’agissait pas d’un atterrissage contrôlé…  Arrivé sur place dans l’après-midi, nous n’avons eu aucun mal à retrouver le lieu du crash. Le premier autochtone que nous croisons nous indique sans peine le chemin. Tout le monde, ou presque, ici s’y est pressé pour voir la carlingue. Mais plusieurs heures après la chute de la libellule de fer, la vie avait repris son cours normal. Le crash, qui venait d’avoir lieu, ne préoccupait pas outre mesure les villageois, même s’il est vrai que l’incident alimentait les conversations autour des calebasses de bière de mil, en ce jour de marché.

 

L’aéronef s’est crashé dans une zone habituellement marécageuse, mais asséchée en cette période de l’année. De nombreux maraîchers s’y adonnent néanmoins au travail de la terre. Au milieu des parcelles de cultures de contre-saison, nous devons abandonner le véhicule pour poursuivre le reste du chemin à pied. Sous un soleil de plomb, un groupe de jeunes dans un champ de chou remplissent des dizaines de sacs du fruit de la récolte. Au loin, on aperçoit l’épave de l’hélicoptère autour duquel fourmillent des gendarmes. Les maraîchers n’ont pas été des témoins directs de ce qui s’est passé. Accourus sur place après l’accident, ils nous apprennent que deux personnes, en tenue militaire, ont été extirpées saines et sauves de l’épave. Les villageois n’arrivent pas à s’expliquer la tragédie puisque les manœuvres d’aéronefs sont fréquentes dans les environs. Nambé est visiblement une zone d’entraînement de l’armée. Un peu plus tôt avant le crash, l’un d’eux assure avoir entendu ce qu’il pense être le même hélico se poser plusieurs fois. Mais manifestement quelque chose d’anormal s’est produit entre-temps. Quoi précisément ?

 

C’est ce que cherchaient à déterminer les enquêteurs sur place. Les deux véhicules présents sur place, l’un estampillé « Identification criminelle », et l’autre appartenant à un service spécialisé de l’aéroport international de Ouagadougou, renseignent sur le profil des hommes commis à la tâche. L’hélico gît ventre en l’air. Ses pales se sont détachées et se trouvent à quelques mètres du reste de l’épave. De nombreux débris, notamment des bris de verre et des voyants, parsèment le sol. Un pandore prend sous différents angles photographiques  « la scène de crime ». Un peu plus loin, des gendarmes, le nez plongé dans les fourrés, sont à la quête d’autres indices, qu’ils prennent le soin d’identifier avec des marqueurs multicolores. A bonne distance, un groupe de gamins épient sous un arbre le travail des enquêteurs.

 

A peine avons-nous pris contact avec les jeunes badauds qu’un pandore, à grandes enjambées, vient dans notre direction. « Qui êtes vous ? » Après que nous avons décliné notre identité, il poursuit sur un ton amical : «Vous ne pouvez pas rester ici. On ne peut pas vous dire de ne pas venir, mais nous devons travailler dans la discrétion. Comprenez ! » Les bras étendus, il nous fait savoir  que la zone de recherche est vaste et que nous nous trouvons dans une zone où peuvent se trouver de possibles indices. Sans discuter, nous nous éloignons. Les enfants, dont la présence étaient tolérée jusqu’à notre arrivée, sont  eux aussi sommés  de se mettre au-delà du périmètre de sécurité qui avait été délimité par des hommes en armes.

 

Une mauvaise manœuvre

 

De notre position retranchée, nous ne voyons plus grand-chose. La nouvelle du crash s’était répandue comme une traînée de poudre.  Un groupe de jeunes, venus de Koubri-ville, sont sur les lieux pour satisfaire leur curiosité. Les apprentis-experts spéculent sur les causes probables de l’incident, chacun y allant de sa théorie. Une femme, bébé au dos, qui les accompagnait croit savoir pourquoi les occupants sont sortis indemnes de l’appareil : «Les pilotes ont sauté en parachute »…  Nous ne la contredisons pas.

 

Au moment où nous laissons Nambé derrière nous, un convoi de véhicules militaires, avec notamment un remorqueur, arrivaient sur place, pour, de toute évidence, emporter l’épave. Sur la base d’images d’archives, il apparaît que l’hélico accidenté est un U1-H1 dont  deux exemplaires avaient été offerts au Burkina en juin 2017 par Taïwan. Le premier prototype de cet hélico léger de manœuvre, qui a fait ses preuves sur les champs de bataille du Vietnam, a été construit autour des années 1960. Les pilotes burkinabè vantaient à l’époque, malgré son ancienneté, les qualités de l’appareil, particulièrement résistant. Qu’a-t-il donc pu se passer pour qu’un de ces hélicoptères de fabrication américaine de l’escadrille burkinabè s’écrase ? De source digne de foi, deux jeunes pilotes étaient aux commandes de l’appareil pendant un entraînement. Ils effectuaient une  procédure d’atterrissage d’urgence lorsqu’une mauvaise manœuvre leur en a fait perdre le contrôle.

 

Hugues Richard Sama

Dernière modification lemardi, 04 février 2020 00:20

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