Décès Arap Moi : «Empreinte» n’aura pas laissé une trace indélébile
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On avait oublié jusqu’à son existence. Il a fallu qu’il meure pour qu’on se souvienne de lui. Daniel Toroitich Arap Moi est décédé hier, mardi 4 février 2020, dans sa 95e année. Celui qui vient de disparaître avait succédé, en 1978, à Jomo Kenyatta, le père de l’indépendance du Kenya, dont il fut le vice-président, et avait régné sans discontinuer jusqu’en 2002.
Un quart de siècle pendant lequel celui qu’on avait surnommé « Empreinte », du fait qu’il répétait à qui voulait l’entendre qu’il marchait sur les pas de son prédécesseur, a imposé sa férule, et c’est un bilan on ne peut plus clair qu’il laisse aujourd’hui.
Il y a ceux qui se souviennent du rassembleur qu’il fut, de l’infatigable médiateur qu’il a été, notamment en Ouganda et en Somalie, et même, dit-on, de son altruisme, de sa loyauté et de sa sincérité.
D’autres, par contre, et ils sont peut-être les plus nombreux, dépeignent Mzee, le « vieux » en swahili, sous les traits d’un impitoyable tyran et très peu regardant sur les droits de l’homme, pour ne pas dire pire.
Pour certains, son virage autocratique date de 1982, année à laquelle il fut victime d’un coup d’Etat manqué qui a fait 59 morts.
Dès lors, les adversaires politiques seront arrêtés, torturés et même assassinés.
La tache la plus sombre du règne d’Arap Moi demeure le massacre de Wangalla dans le Nord du pays, une opération militaire menée en février 1984, officiellement pour désarmer des clans somalis, et qui aurait fait 57 morts, mais plus de 5 000, selon certaines sources.
Les sicaires du régime de l’époque auraient même alors obligé des suppliciés à porter des vêtements imbibés d’essence, les transformant en de véritables torches humaines à la moindre étincelle.
Ajoutez-y la corruption qui avait fini par devenir endémique et l’on comprendra que le nonagénaire qui vient de mourir paisiblement dans son lit ne laisse sans doute pas un souvenir indélébile à nombre de ses compatriotes.
Dans ces conditions, on a beau ne pas vouloir tirer sur le corbillard de Moi, force est de reconnaître qu’il ne fut pas un enfant de chœur et qu’il ne quitte pas ce bas monde par la grande porte, quand bien même un deuil national aurait été décrété en sa mémoire jusqu’à la date des obsèques.
Alain Saint Robespierre
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