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Débits de boissons et établissements d’enseignement : Le nouveau décret est-il du bon cru ou du frelaté ?

Un proverbe persan stipule que « l’ivresse de la jeunesse est plus forte que l’ivresse du vin ». Bon sang, pourquoi nos rejetons s’empressent-ils donc de boire ?

 

Par leur faute, leurs géniteurs devraient bientôt aller plus loin pour se la couler douce dans les bras de Bacchus. Au dernier Conseil des ministres, l’Etat vient de réitérer, dans les textes en tout cas, sa volonté d’éradiquer la trop grande proximité des débits de boissons avec les établissements d’enseignement. Un décret signé récemment précise que désormais aucun lieu de vente d’alcool ou de tabac ne doit être à moins de 400 mètres des lycées et collèges. Pareille mesure existait déjà, mais la dernière en date paraît plus volontariste et coercitive. En effet, cette fois-ci, l’obligation est faite pour les maires de faire cesser les violations constatées dans un délai de 15 jours et la possibilité est offerte aux fondateurs d’établissement d’engager des poursuites judiciaires contre les tenanciers en cas d’inaction du maire.

Est-ce trop tôt de mettre le holà ? Pas du tout. Il n’y a plus un jour qui passe sans qu’un fait divers nous rappelle l’urgence à agir. Dans un reportage paru dans L’Observateur paalga du 28 janvier dernier, notre reporter relatait l’ahurissement d’un proviseur, celui du lycée municipal de Bogodogo dans l’arrondissement 10 de Ouagadougou, qui, pendant un conseil de classe, reçoit un appel outré qui l’informait qu’un groupe d’élèves de son établissement constitué majoritairement de… filles, était en train de picoler à fond dans un débit de boissons non loin du lycée. Et que dire de ces 13 élèves du Bambata, tous de la classe de 5e, qui sont passés en conseil de discipline le 19 février 2020 pour violence exercée sur leurs camarades suite à la consommation d’alcool au lycée. Les fouilles de leurs sacs d’écolier ont plutôt révélé qu’ils contenaient de l’alcool à très fort degré.

Le hic dans toutes ces histoires est que nous autres adultes, qui devrions assumer notre part de responsabilité, nous nous renvoyons la balle : Fondateurs d’établissement, associations de parents d’élèves et autorités communales s’invectivent dans ce bateau ivre, même si la plupart des plaignants pointent un doigt accusateur sur les maires qui devraient soigner le mal à la racine en interdisant l’installation de ces débits de boisson à proximité des centres d’enseignement.

Espérons qu’avec la nouvelle fatwa gouvernementale, rien ne sera plus comme avant, pour utiliser une formule galvaudée. Mais le doute est vraiment permis, nous qui sommes rompus dans l’art de concevoir de beaux textes qui restent des vœux pieux. Dans ce sens, qu’est devenue la décision prise par le ministère du Commerce, en septembre 2018, de l’interdiction de la production et de la vente des alcools dans les sachets (à 25 francs, 50 francs ou 75 francs) et dans les bouteilles de moins de 30 centilitres contenant le même… poison ? Par curiosité, passez à « La Morgue » (1) de votre quartier vous renseigner. Le plus vexant est que même si on arrivait à interdire l’installation de maquis à moins de 400 mètres des écoles, nos garnements pourraient se saouler à souhait plus loin, eux que nous avons dotés de bolides capables d’avaler des kilomètres en moins d’une minute.

Issa K. Barry

 

(1)Surnom très évocateur donné par les consommateurs eux-mêmes aux kiosques qui servent ces tord-boyaux

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