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Recherches sur l’extrémisme violent: Le plaidoyer d’un étudiant burkinabè

Dans cette lettre ouverte adressée au ministre de l’Enseignement supérieur, Daouda Sedogo, étudiant en Master 2 de sociologie à l’université Joesph Ki-Zerbo et en étude de développement à Paris 1,  plaide pour l’ouverture d’un Centre de formation sur l’extrémisme violent dans une Université du Burkina Faso.

 

 

 

Monsieur le Ministre, Je suis l’un de vos anciens étudiants de la sociologie et je vous écris pour vous faire part d’un plaidoyer universitaire notamment celui de l’enseignement dans nos Universités. Je tiens à préciser que je ne remets pas en cause la qualité de l’enseignement dans nos Universités car j’ai pu bénéficier de mes enseignants que je salue au passage, une somme de savoir-faire depuis la première année de sociologie. Ce message vise à nous faire prendre conscience de la nécessité de créer un Centre ou une Formation de recherche sur l’extrémiste violent dans l’une de nos Universités. Partout dans le monde, l’insécurité est grandissante et le Sahel,  y compris le Burkina Faso n’est pas en marges de ces insécurités. Notre pays qui ne s’attendait pas à ces attaques, fut réveillé le 16 janvier 2016 par une attaque commando faisant une dizaine de morts sur l’avenue Kwame N’Kruma. Depuis cette date, la menace est devenue réelle et nos habitudes face à cette situation ont changé. Nous avons changé notre manière de voir et de penser tout en vivant dans la peur et dans la menace quotidienne. Le centre de gravité a évolué en passant du Centre vers le Nord puis vers l’Est du pays. Et l'épicentre du terrorisme est en train de se stabiliser dans ces parties citées faisant des vulnérabilités. Selon Mohamed Ibn Chambas, le Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), le nombre de personnes tuées au Burkina Faso est passé d'environ 80 en 2016 à plus de 1.800 en 2019. Ce chiffre nous montre à telle enseigne que nous sommes dans une situation mortifère violente. Evidemment que notre gouvernement travaille pour ramener la stabilité afin que les fils et filles puissent vivre dans l’union, la joie et surtout dans la cohésion. S’il est vrai que vos actions sont à saluer sur le plan national, pour ma part, en tant qu’étudiant, il me semble utile et important de nous associer dans cette lutte asymétrique qui déstabilise les activités socio-économiques et menace notre intégrité territoriale. Lorsque je dis de nous associer, il n’est pas question ici de nous donner des armes militaires mais de nous donner les moyens scientifiques afin de produire des rapports, de faire des analyses, des cartographies etc…sur l’évolution de la situation sécuritaire comme bons nombres de pays le font déjà. Le conseil des ministres du 11 octobre 2019 s’inscrit dans ce sens lorsqu’il a pris un décret portant création, je cite d’« un Centre national d’études stratégiques en défense et sécurité » afin de « traiter des problématiques liées aux questions de défense et de sécurité au niveau national et international ». De ce fait, il est nécessaire pour nous de permettre à l’élite de demain de comprendre les logiques conflictuelles car ces logiques s’inscrivent sur une longue durée et pour le Burkina, nous avons besoin d’une expertise endogène afin de comprendre les équilibres stratégiques de cette guerre que nous menons contre l’autre invisible qui gagne du terrain. Nous pouvons adapter cette formation qui sera issue des sciences sociales et humaines comme le modèle de l’Université du Caire ou être en partenariat avec des instituts de recherche sur la sécurité ou les conflits. Certains étudiants maliens et sénégalais bénéficient déjà de ces partenariats à travers l’octroi des bourses dans les instituts comme ISS (Institut d’Etude et de Sécurité) de Dakar et de Bamako ou dans les Universités Françaises (Paris 1 ou Montpellier). Nous n’avons pas une littérature abondante et fiable pour comprendre ce qui se passe dans notre propre pays. Nous nous referons le plus souvent aux coupures de presse nationale et internationale qui parfois véhiculent des informations non fondées. Aussi, cette question est traitée par des nouveaux acteurs médiatiques qui se font passer pour des experts et cela contribue à développer parfois des idées confuses et des mauvais jugements sur la question sécuritaire pouvant aller à la stigmatisation d’un groupe compte tenu de la sensibilité de la question. C’est face à tous ces constats et conscient que seule la recherche scientifique pourra nous aider que je viens par ce message solliciter votre aide en tant que Premier responsable de la Recherche Scientifique de bien vouloir nous permettre de rêver en mettant en place un Centre enraciné dans une perspective pluridisciplinaire et qui sera orienté vers la compréhension des logiques conflictuelles actuelles au Burkina. Le Président de la République son Excellence Roch Kaboré l’a si bien dit, la réponse est sociale ( pour preuve, nous avons mis en œuvre le Programme d'Urgence Sahel ou le PUS financé à plus de 414,9 milliards de FCFA ) et nous sommes tous unanimes sur cela ( Chercheurs, humanitaires, spécialistes etc..) et si elle est sociale, il convient pour nous en tant qu’acteurs universitaires de comprendre les dynamiques sociologiques, spatiales, et économiques des différentes régions avant d’apporter la réponse car la recherche précède les actions à venir ( j’oubliais que je suis un bébé qui n’a pas encore grandi face à mon grand-père scientifique qui a donné naissance à plusieurs docteurs qui sont devenues mes enseignants aujourd’hui ). La production de ces rapports sera utile pour les ministères de la Défense, de la Cohésion sociale et pour nous car les rapports peuvent inspirer les étudiants à comprendre et à s’impliquer dans cette recherche-action sans oublier les hommes de médias. Pour terminer, je dirai que nous devrons offrir des outils efficaces aux étudiants pour développer des compétences cruciales à la gestion des conflits et de sécurité au Burkina Faso. Nous devrons former des spécialistes pour répondre avec rigueur et détermination dans les domaines de la gestion et de la prévention des conflits ainsi que la cohésion sociale. Permettons une fois de plus à ces étudiants de jouer un rôle significatif dans cette lutte qui doit nous rassembler sans distinction socioprofessionnelle. Ces étudiants peuvent démontrer leur leadership et le Burkina a toujours eu les meilleurs étudiants motivés et engagés même avec des conditions minimales ils arrivent à hisser le drapeau haut. Monsieur le Ministre, permettez-nous d’avoir une perspective actualisée sur les conflits à partir du Centre ou d’une Formation universitaire. Le contexte actuel nous impose cette vision actualisée et nous devrons réorienter nos axes de recherches car depuis 2016, les paradigmes ne sont plus les mêmes, ils ont évolué donc il s'agit pour nous de questionner ces nouvelles dynamiques et dimensions afin de proposer des stratégies durables. Je ne dis pas une fois de plus qu'il s'agit de nous focaliser sur cette question au détriment des autres axes de recherches mais celles-ci méritent une attention particulière. Peut-être que je ne suis pas sur le bon chemin ou encore il existe déjà une réflexion sur cette question mais ce n’est qu’un pauvre plaidoyer parmi tant d’autres et je me réserve sur le fonctionnement administratif du Centre ou de cette Formation qui peut être traité en amont avec les responsables des formations concernées en cas d’approbation. Je vous remercie sincèrement de votre attention et je vous accompagne dans mes prières pour un jour voir la réalisation du centre tout en vous adressant un joyeux ramadan. Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’assurance de ma haute considération.

 

 

 SEDOGO DAOUDA

8 rue Francis de Croisset 75018

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