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Condamnation Ignace Sossou : Une peine qui entache la justice béninoise

 

Le 24 juin prochain, Ignace Sossou devrait humer de nouveau l’air frais et vivifiant de la liberté dont il est privé depuis décembre 2019.

 

 

Hier mardi 19 mai 2020, la cour d’appel de Cotonou l’a en effet condamné à douze mois de prison dont six ferme ainsi qu’à une amende de cinq cent mille francs CFA. Mais déduction faite de la préventive, il lui reste donc un mois à passer derrière les barreaux.

 

On ne sait pas s’il faut s’en réjouir ou pas, car même si la peine a été allégée, elle reste tout de même.

 

Le 24 décembre, le journaliste d’investigation béninois avait été condamné en première instance à dix-huit mois ferme pour « cyber-harcèlement ».

 

Le mardi 5 mai dernier en appel, le procureur avait requis douze mois ferme, et c’est cette sentence qui vient d’être réduite de moitié. Mais le problème reste entier, car les avocats de l’infortuné scribouillard  entendent aller jusqu’en cassation pour que le casier judiciaire de leur client ne soit pas injustement entaché dans la mesure où, selon eux, l’agent de Bénin Web TV « n’a commis aucune faute déontologique et aucune infraction à la loi pénale ».

 

Qu’y avait-il de bien méchant de la part d’un journaliste de rapporter  publiquement par le biais de Twitter les propos tenus par le procureur de la République au cours d’un atelier sur le fact-checking en période électorale ?

 

« Le Code numérique béninois, c’est comme une arme qui est braquée sur la tempe de chaque journaliste », avait en effet rapporté Ignace Sossou citant le procureur de la République, Mario Métonou.

 

Et quand bien même selon le plaignant les propos auraient été sortis de leur contexte et donc que notre confrère serait effectivement coupable de ce dont il l’accable, était-ce vraiment nécessaire de l’embastiller pour une faute commise dans l’exercice de sa fonction ?

 

C’est vraiment là que le bât judiciaire blesse.

 

L’on s’étonne encore que le Bénin en soit toujours  à l’emprisonnement des journalistes alors que la tendance générale dans les démocraties qui se respectent est à la dépénalisation des délits de presse, entendu dans le sens de non-privation de la liberté, car le journaliste ne saurait être au-dessus de la loi.

 

Mais le Bénin est-il une démocratie digne de ce nom sous le régime Talon ? C’est la question que l’on est en droit de se poser aujourd’hui au sujet du « Quartier latin » tant les actes attentatoires aux droits humains se multiplient depuis que l’homme d’affaires a déménagé  au palais de la Marina.

 

Ainsi de l’instrumentalisation supposée ou réelle de la justice pour écarter Sébastien Adjavon de la dernière présidentielle, de la décision de l’Etat béninois de retirer sa Déclaration du Protocole instituant la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), de l’organisation de législatives houleuses en avril 2019 auxquelles plusieurs partis politiques de l’opposition n’ont pu participer et des municipales de dimanche dernier qui ressemblaient bien plus à une répartition de sièges entre amis qu’à une véritable compétition électorale.

 

En traînant Ignace Sossou à la barre, sans s’en rendre compte, le régime Talon fait son propre procès puisqu’il ne peut en ressortir que sous le sceau infamant de flingueur de la liberté de la presse. Donc avec une image écornée pour quelque chose qui n’en valait vraiment pas la peine.

 

Alain Saint Robespierre

 

Dernière modification lejeudi, 21 mai 2020 21:27

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