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Soins du nouveau-né : «Le clitoris fendillé est naturel» (Mariam Nonguierma, présidente de l’Association burkinabè des sages-femmes)

 

«Les agents de santé couperaient le sexe des petites filles au cours de l’accouchement.»  Avez-vous jamais entendu cela ? C’est en tout cas une plainte récurrente au sein des parents. L’information est assez sérieuse pour être ignorée. Carnet de santé est donc allée à la source pour comprendre. Selon la présidente de l’Association burkinabè des sages-femmes, Mariam Nonguierma, il n’en est rien. Aucune accoucheuse ou sage-femme n’oserait couper le clitoris d’un bébé à la maternité. L’aspect de fente dont parlent certains parents est tout à fait naturel et relève de l’anatomie de la vulve.

 

 

 

Après un accouchement qui s’est bien déroulé, quels sont les soins apportés à la mère ?

 

 

 

Nous avons des soins immédiats et des soins ultérieurs. Une femme qui vient d’accoucher doit être suivie jusqu’au 42e jour. Concernant les soins immédiats, il faut veiller à ce qu’elle ne saigne pas, voir s’il n’y a pas de déchirure de l’appareil génital, si le globe de sécurité (là où était l’enfant : ndlr) est bien rétracté, prendre régulièrement toutes les constances (température, tension artérielle, pouls), ausculter les conjonctives pour voir si la femme n’est pas anémiée. Vers le 42e jour, on refait les mêmes examens et on conseille à la maman une méthode de planification familiale. De nos jours, on n’attend même plus d’arriver  au 42e jour pour le faire, nous le faisons dès que la femme quitte la salle d’accouchement, et c’est ce que nous appelons la planification post-partum. Cela, parce qu’une femme qui sort de la maternité sans avoir eu des informations sur la planification familiale est en danger, car elle peut immédiatement contracter une grossesse,  ce qui l’exposerait à des risques de mortalité maternelle.

 

 

 

Et au nouveau-né ?

 

 

 

Lui aussi bénéficie de soins : il faut d’abord vérifier s’il a bien crié, ce que nous appelons le score d’Abraham, s’il est bien tonique, s’il remplit un certain nombre de critères que nous avons définis. Après on l’essuie bien, on examine tout son corps (les yeux, la fontanelle, l’abdomen, l’ombilic qui est sectionné). Nous en vérifions aussi le poids et la taille. Nous examinons également les pieds pour voir si le bébé n’a pas de pied bot (malformation congénitale caractérisée par un pied tordu, qui semble à l’envers : ndlr).

 

En plus de ces examens,  nous surveillons, pour  ce qui est des filles, les seins pour voir s’il n’y a pas d’anomalie. Les organes génitaux sont aussi contrôlés, car certaines naissent avec un accolement de la vulve. On examine jusqu’à l’anus pour voir s’il n’y a pas d’imperforation anale.  En tout cas le bébé est soumis à un examen minutieux avant d’être remis aux parents.

 

 

 

Concernant les bébés filles, d’aucuns prétendent que vous, agents de santé, fendillez leur sexe à la maternité ?

 

 

 

Ces rumeurs et plaintes nous reviennent fréquemment. Et c’est du genre : on a excisé ma fille, on a coupé ma fille. Mais cela est dû au fait que les femmes ne connaissent pas l’anatomie de la vulve de la petite fille.  Vous savez, il y a une fente au milieu du clitoris, et les femmes non excisées peuvent bien le vérifier. A la naissance tout le corps du bébé est couvert de sang. Et des taches de sang peuvent se retrouver sur la vulve en ce qui concerne les bébés filles. C’est au constat de cela que les mères pensent qu’on a coupé ou qu’on a fendillé leur enfant. Or il n’en est rien.  Le clitoris fendillé est tout à fait naturel comme les deux yeux que nous avons à la naissance.  En plus, la vulve est une muqueuse, donc elle est très sensible. C’est alors tout à fait normal qu’au contact de l’eau chaude qu’on utilise pour laver le bébé, ce dernier crie.

 

Aucune accoucheuse ou sage-femme ne peut, après accouchement, prendre une lame pour couper le clitoris d’un bébé. Certaines femmes même reviennent quelque temps après l’accouchement se plaindre à nous qu’on a fendillé le sexe de leur fille et qu’elle saigne. Pourtant, c’est la crise génitale qui fait que quelque temps après la naissance la petite fille peut avoir des saignements du fait des hormones que lui transmet sa maman. Et beaucoup de bébés ont ces petits saignements que nous appelons les premières règles ; autrement dit à l’hôpital nous ne touchons pas au clitoris. Seulement, il y a un manque de communication à ce sujet.

 

 

 

Parlant de communication, nombreuses sont les femmes qui se retiennent de poser des questions aux sages-femmes de peur de se voir crier dessus ou d’être rabrouées.  Pourtant elles ont droit à l’information…

 

 

Tout à fait. Quand une femme vient pour accoucher, elle, ainsi que ses accompagnateurs ont le droit de poser toutes les questions liées à sa santé.  Et la sage-femme a aussi le devoir de tout leur expliquer pour en retour avoir l’information juste. Cela on ne cesse de l’enseigner aux agents de santé. Mais les plaintes sont récurrentes. On entend que les sages-femmes ne sont pas gentilles, qu’elles crient sur les parturientes. Mais, comme on le dit, quand ta réputation est ternie, c’est difficile de laver complètement ton honneur. Celles qui ont déjà accouché le savent, la douleur est si insupportable parfois qu’on pense que celle qui est à nos côtés ne coopère pas. L’accoucheuse voudrait, après la délivrance, voir  une mère en bonne santé et un bébé qui va répondre aux besoins de sa communauté, car il ne suffit pas de mettre au monde un enfant mais un enfant qui a toute son intégrité et toute son intelligence. Je dis cela car, si au cours de l’accouchement, la femme ne veut pas pousser et que la sage-femme ne la force pas à le faire, l’enfant peut naître avec un cerveau compressé, ce qui va occasionner des stigmates dans le futur. Ce n’est pas pour trouver des excuses, mais je pense que les torts sont partagés. Mais il revient  à la sage-femme d’y mettre du sien, d’avoir de la compréhension et de la compassio0n pour que tout se passe bien.

Alima Séogo née Koanda

 

Tél. : 79 55 55 51

 

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