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Mouvement du 5-Juin : Il voulait la démission d’IBK, il a obtenu sa destitution

Il y a à peine trois semaines, lors du sommet virtuel convoqué par la CEDEAO pour se pencher sur la crise malienne, le président Ibrahim Boubacar Keita parlait de «coup d’Etat rampant» au sujet des manifestations lancées début juin par le Mouvement du 5-Juin. Tellement « rampant » qu’il a fini par arriver au palais de Koulouba, ou plutôt à la résidence présidentielle de Sebenikoro : hier à l’issue d’une journée tumultueuse, IBK a en effet été arrêté et conduit par des militaires avec son Premier ministre, Boubou Cissé, et de hauts gradés au camp Soundiata-Keita de Kati.

 

 

Alors, coup d’Etat, révolution de palais ou simple mutinerie qui a tourné au vinaigre pour les dirigeants maliens… une fois de plus, c’est à Kati, le plus important camp militaire à une quinzaine de kilomètres de la capitale, que le sort du locataire du palais de Koulouba a été scellé. C’est en effet de cette ville garnison qu’était partie en 2012 la révolte des bérets verts sortis au prétexte de réclamer plus de moyens pour combattre le terrorisme qui venait de prendre pied dans le pays. Un mouvement d’humeur qui s’était terminé par l’éjection d’Amadou Toumani Touré au profit d’Amadou Haya Sanogo. Un pronunciamiento qui, en son temps, avait aggravé une situation sécuritaire déjà suffisamment préoccupante et dont le pays de Soundiata Keita n’est toujours pas sorti.

Bis repetita hier 18 août 2020 où, dès 7h30 - 8h00, les premiers coups de feu ont commencé à se faire entendre. Hasard du calendrier, ces évènements surviennent alors qu’un rapport secret de l’ONU qui a fuité accuse de hauts responsables politiques et militaires maliens d’entraver la paix en torpillant notamment l’accord d’Alger.

Même si jusqu’à l’heure où nous tracions ces lignes aucune déclaration officielle n’avait précisé les tenants et les aboutissants de ce coup de force, comment ne pas y voir une conséquence directe des turbulences politiques qui ébranlent le Mali et ses premiers responsables depuis maintenant 3 mois ? Tout est parti de l’invalidation par la Cour constitutionnelle des mandats de 31 députés principalement issus des rangs de l’opposition à l’issue des législatives de mars dernier, et le Rassemblement des forces patriotiques, véritable conglomérat de responsables politiques, de chefs religieux, de syndicalistes et d’organisations de la société civile, cornaqués par l’imam Mahmoud Dicko, a donc finalement obtenu la tête d’IBK. Ils réclamaient à cor et à cri sa démission, ils auront obtenu sa destitution à la grande joie d’une partie de la population, à en juger par les you-you et les scènes de fraternisation avec la soldatesque. Tout ça au grand dam de la CEDEAO dont la tentative de médiation entre les différents protagonistes de la crise était au point mort et qui dès hier a réaffirmé « sa ferme opposition à tout changement politique anticonstitutionnel ».

C’est donc l’épilogue (?) du bras de fer dont on se demandait comment il pourrait se terminer. Les contempteurs du régime semblent avoir gagné, même si en fait c’est tout le Mali qui perd. A l’heure qu’il est, Ibrahim Boubacar Keita fait peut-être partie de l’histoire du Mali, mais les problèmes du pays, eux, restent entiers particulièrement l’insécurité endémique dans laquelle il est plongé depuis bientôt une décennie. Et il faudra bien plus que la déchéance de son premier magistrat pour en venir à bout.

 

H. Marie Ouédraogo

Dernière modification lemercredi, 19 août 2020 19:42

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