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ATT : Un homme, 3 dates

 

Presque coup sur coup, le Mali a perdu deux de ses anciens présidents : 

 

en effet, deux mois après le décès de Moussa Traoré le 15 septembre 2020, son successeur immédiat, lui  aussi général, vient de passer l’arme à gauche ;

 

Amadou Toumani Touré, puisque c’est lui que les Maliens pleurent aujourd’hui, est décédé hier lundi 10 novembre à Istanbul où il avait été évacué par vol régulier.

 

Peu avant cette évacuation, il avait subi une intervention chirurgicale du cœur à l’hôpital du Luxembourg à Bamako qu’il avait fait construire.

 

 

 

Depuis l’annonce de ce décès, c’est une pluie d’hommages qui s’abat sur celui qui venait de souffler ses 72 bougies pas plus tard que le 4 novembre dernier.

 

Beaucoup de ses compatriotes portent aux nues l’homme de consensus qu’il a toujours été pour son pays,  et pour bien d’autres pays africains où ses talents de médiateur ont contribué à circonscrire bien d’incendies, notamment en République centrafricaine.

 

Si on devait résumer sa carrière politique en trois dates, ce serait celles-ci : le 26 mars 1991, le 8 juin 2002 et le 22 mars 2012 :  

 

au début des années 90,  alors que souffle sur le pays de Modibo Kéïta, à l’image de bien de contrées africaines, le vent de la démocratisation consécutif au chute du mur de Berlin et au Discours de la Baule, ce commando parachutiste dépose Moussa Traoré, mettant ainsi fin à la violente répression contre les étudiants. S’ensuit une petite transition militaire à l’issue de laquelle il remet le pouvoir à un civil démocratiquement élu, Alpha Omar Konaré, en 1992 avant de se lancer dans une aventure humanitaire et caritative, parcourant  ce vaste territoire de plus d’un million de Km2 dans tous les sens ;

 

un investissement  dans le social qui était autant de jalons posés pour mieux revenir aux affaires avec cette fois-ci  pour seule arme un bulletin de vote.

 

Le 8 juin 2002, le militaire de carrière troque le treillis contre le costume-cravate et surtout le boubou empesé.

 

Il n’aura malheureusement  pas le temps de terminer son second mandat puisqu’à deux mois seulement de son terme, il est à son tour renversé le 22 mars 2012 suite à une mutinerie de soldats de la garnison de Kati qui étaient initialement sortis pour réclamer des armes et d’autres moyens afin de lutter contre l’hydre terroriste qui avait posé le pied dans le pays en début d’année.

 

ATT a-t-il été victime du consensus qui était sa seconde nature puisque c’est après avoir ouvert les bras et accueilli des compatriotes en fuite de la Libye en plein effondrement du régime de Kadhafi, parmi lesquels des djihadistes, qu’il a été obligé de quitter la Colline de Koulouba ?

 

On raconte comment alors il a dû puiser dans ses réserves de soldat pour échapper aux putschistes.

 

Celui qui a porté la démocratie malienne sur les fonts baptismaux  aura été aussi quelque part l’artisan involontaire de la perte de son pays. Car, depuis sa chute, l’ancien Soudan français n’entrevoit pas le bout du tunnel dans lequel il patauge.

 

Mais il faut croire que les Maliens ne tiennent pas trop rigueur à ce «soldat de la démocratie», toujours aussi affable,  qui après un exil de sept ans au Sénégal, est revenu au bercail en grande  pompe  en 2019 et c’est à peine si sa popularité  a été entamée.

 

Le voici qui quitte la vallée des larmes alors que son pays est à la croisée des chemins. Avec cette fatalité qui semble frapper les chefs d’Etats maliens, car excepté Alpha Omar Konaré, aucun d’eux n’est allé jusqu’au bout de son mandat, le successeur d’ATT ayant été à son tour victime d’un coup d’Etat militaire le 18 août dernier.

 

 

Alain Saint Robespierre

 

Dernière modification lemercredi, 11 novembre 2020 21:36

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