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Violences en politique au Burkina : Eh bien, déballons tout alors, chers amis Français !

 

Cher Wambi

 

Le 17 avril dernier, cher Wambi, l’ambassadeur de France au Burkina Faso, Luc Hallade, a remis aux autorités burkinabé le dernier lot des archives relatives à l’affaire Thomas Sankara.   Fort bien, et on ne peut que s’en féliciter si tant est que ces derniers secrets aident à élucider cette affaire.

 

 

 

 

Mais par-delà ce dossier emblématique, s’il en fût, il est bien d’autres crimes que nos régimes d’exception ont pu salir notre histoire et dont les archives françaises pourraient contribuer à éclairer.

 

En disant cela, cher cousin, je ne me mets pas dans la posture idéologique et vindicative de tous ceux-là pour qui l’ancienne puissance coloniale serait la première coupable de tous les maux qui nous accablent.

 

Je me mets seulement dans le sens du rôle que la marche du monde depuis le Congrès de Berlin lui a assigné dans notre histoire.

 

Souvenons-nous, par exemple, que pendant les trois décennies de notre indépendance l’ambassadeur de France fut de droit le Doyen du corps diplomatique à Ouagadougou. La Chancellerie française en sait donc long sur nous et souvent mieux que nous-mêmes.

 

Commençons par le commencement, car au commencement de la violence politique sanglante dans notre pays furent le coup d’Etat du 7 novembre 1982 et la mort non encore tracée du colonel de gendarmerie Badembié Pierre Claver Nézien.

 

Ministre de l’Intérieur du Comité militaire de redressement pour le progrès national (CMRPN) qui venait d’être renversé par le Conseil du salut du peuple (CSP), le colonel Nézien s’est réfugié dans la nuit du 7 au 8 novembre dans la résidence de l’ambassadeur de France. Il n’en est ressorti que le lundi 9 au crépuscule après que les nouveaux hommes forts du pays, foi d’officiers, eurent donné à l’ambassadeur Gaston Boyer l’assurance qu’il ne lui serait fait aucun mal.

 

Cher Wambi, on connaît la suite, puisque sur le trajet qui le conduisait à son lieu d’internement il fut froidement liquidé par des éléments de son escorte.

 

De qui est partie la rafale qui l’a atteint à la poitrine ?

 

Qui a donné l’ordre de tirer ?

 

Mystère et mystère !

 

Pour des raisons évidentes, les services de l’ambassade ont dû documenter cette affaire, vu surtout que le colonel Nézien était de ces militaires que la France suivait à la trace depuis l’école des enfants de troupe de Bingerville jusqu’à l’institut de criminologie de Paris en passant par l’école de formation des officiers de Fréjus et de Melun.

 

Que tu y croies ou que tu n’y croies pas, c’est le sang versé ce jour-là sur le « Ten-peelem », la terre sacrée de nos aïeux, qui a appelé le reste. Tant il est vrai que le sang appelle le sang et que depuis les Robespierre, les Saint-Just, Danton, Desmoulins, la révolution a toujours inexorablement dévoré ses enfants.

 

Dans la liturgie de la réconciliation nationale dont il est question, il faudra programmer une journée de lustration nationale pour purifier les lieux, les cœurs et les esprits de tout ce dont les ont chargés toutes ces années de violence politique. Mais cela passe par la vérité sur ce premier crime de sang que les archives françaises pourraient nous aider à éclairer.

 

Idem pour le massacre du colonel Yorian Gabriel Somé et du commandant Fidèle Guébré dans l’enceinte du Conseil de l’entente la nuit du 9 août 1983, soit quelques jours seulement après l’éclatement de la révolution.

 

Sorti de l’école d’Application de Saint-Maixen, Yorian Gabriel Somé fut également un des tous premiers de notre armée à faire l’école de guerre de Paris. Conscient des divergences idéologiques qui l’opposaient à ses frères d’armes qui venaient de s’emparer du pouvoir, il a trouvé refuge la même nuit du 4 août à la base militaire de Ouahigouya. Dans le même réflexe, le commandant Fidèle Guébré, premier officier voltaïque formé chez les « Marines » aux USA, s’était également retranché à la base commando de Dédougou dont il assurait le commandement.

 

Le 9 août, toujours sur leur foi d’officiers, les nouveaux maître de Ouagadougou dépêchaient une délégation de colonels auprès de Yorian Somé et de Fidèle Guébré pour les convaincre  de regagner la capitale pour des explications entre officiers. Ils y consentent et on connaît la suite car la même nuit du 9 août, quelques rafales de Kalachnikov ont suffi et on découvrira le lendemain 10 août leurs corps horriblement criblés de balles à la morgue de l’hôpital militaire.

 

Cher cousin, à ce jour, sauf erreur de ma part, on n’a jamais officiellement su qui a ordonné cette exécution et qui furent les exécutants de cette basse besogne.

 

D’autres officiers connaîtront le même sort à commencer par le colonel Didier Tiendrébéogo, ancien maire de la ville de Ouagadougou, exécuté dans la nuit du 11 juin 1984 avec six autres personnes pour « complot contre la révolution ».

 

Notons qu’il fit partie de la délégation des colonels allés convaincre Yorian et Guébré de rentrer.

 

Enfin le 18 juillet 1984, l’attentat contre le commandant Amadou Sawadogo sur le barrage n°3. Transporté à Val-de-Grâce de Paris, il succombera à ses blessures.

 

Il est bon de noter, cher Wambi, que c’est grâce à la complicité amicale du commandant Sawadogo au cours des événements du 17 mai 83 que Blaise Compaoré a pu rejoindre Pô pour organiser le pourrissement qui s’est conclu par le triomphe de la révolution du 4 août 83.

 

Autant de faits pour lesquels les archives françaises pourraient parler.

 

 

 

Cher Wambi, comme tu le sais déjà, le 13 avril 2021, la chambre de contrôle de l’instruction du tribunal militaire de Ouagadougou a renvoyé pour jugement Blaise Compaoré et treize autres personnes poursuivies dans le cadre du dossier de l’assassinat du capitaine Thomas Sankara. Suite à cette décision, une de mes connaissances m’a demandé si l’ancien président pouvait être jugé puisque bénéficiant d’une amnistie votée par les députés. En effet, en 2012, plus précisément le 11 juin, les représentants du peuple avaient voté une loi constitutionnelle dont l’article 168-1 précisait : « Une amnistie pleine et entière est accordée aux chefs de l’Etat du Burkina Faso pour la période allant de 1960 à la date d’adoption des présentes dispositions ».

 

Les présidents Maurice Yaméogo et Sangoulé Lamizana étant déjà morts au moment où cette loi était adoptée, ce paratonnerre judiciaire ne couvrait que les chefs d’Etat alors en vie qu’étaient Saye Zerbo (décédé le 19 septembre 2013), Jean-Baptiste Ouédraogo et Blaise Compaoré. Mais cher cousin, personne n’était dupe, car tous, on savait que Blaise Compaoré était le principal bénéficiaire de cette loi d’amnistie.

 

Je me suis alors renseigné sur le sujet et c’est là que j’ai appris que Chériff Sy était passé par là. En effet, cette disposition a été abrogée sous la Transition. En effet, le 5 novembre 2015, les députés du Conseil national de la Transition ont adopté la loi constitutionnelle 072-2015/CNT portant révision de la Constitution et ils en ont profité pour faire sauter le paratonnerre judiciaire qui profitait à Blaise Compaoré. Pour ce faire, les parlementaires ont juste biffé l’article 168-1 et la question était réglée. Cette disposition abrogée, Blaise ne bénéficie plus d’aucune amnistie.

 

 

 

Cher Wambi, dans le cadre de cette affaire Thomas Sankara, la chambre de contrôle, tu t’en souviens, avait décerné contre tous les accusés une« ordonnance de prise de corps » tout en maintenant le mandat de dépôt du général Gilbert Diendéré. C’est dire que sur les 14 personnes poursuivies, seul Diendéré est détenu car il purge depuis 2019 une peine de 20 ans de prison dans le cadre du dossier du putsch manqué de septembre 2015.

 

Exceptés Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando qui sont hors du pays et donc, pour l’heure, hors de portée de la justice, les 11 autres accusés, depuis le début de cette procédure, bénéficiaient de la liberté provisoire. C’est pourquoi depuis le 13 avril, j’ai tout fait pour savoir si l’ordonnance de prise de corps avait été exécutée. Mais des différents recoupements que j’ai pu faire, tout indique que ces accusés n’ont pas été déposés à la Maison d’arrêt et de correction des armées (MACA). La date du procès n’étant pas encore connue, les accusés devraient continuer à humer l’air de la liberté jusqu’à l’approche du procès où ils auront l’obligation de se constituer prisonniers car ils ne devraient pas comparaître libres.

 

 

 

Cher Wambi, à présent, je t’invite à feuilleter avec moi le carnet secret de Tipoko l’Intrigante.

 

 

 

- Le mardi 23 mars 2021, une délégation des anciens ministres du dernier gouvernement de Blaise Compaoré a été reçue en audience par Zéphirin Diabré, le ministre d’Etat  chargé de la Réconciliation nationale  et de la Cohésion sociale. Conduite par l’ancien Premier ministre Luc Adophe Tiao, la délégation a soumis au ministre d’Etat un certain nombre de préoccupations. Le communiqué officiel n’en dit pas plus.

 

Mais il semble que les ex-ministres ont demandé à Zéphirin Diabré de se pencher sur leur sort, notamment sur le problème de mobilité qu’ils ont. En effet, à cause de la procédure judiciaire qui est engagée contre eux devant la haute cour de justice, ils ne sont plus libres de leurs mouvements, obligés qu’ils sont de toujours demandé une autorisation pour quitter le pays que ce soit pour se soigner ou pour des raisons personnelles ou professionnelles car certains ont des contrats de prestations intellectuelles à l’étranger. Les anciens ministres ont aussi demandé la régularisation de leurs carrières car tous n’étaient pas à la retraite et depuis l’insurrection leurs carrières n’évoluent plus et ils ont des difficultés à reprendre service dans leurs ministères d’origine. Il y a aussi la question de leurs indemnités qu’ils n’ont pas perçues. Il s’agit des 6 mois d’indemnités et avantages dont bénéficie tout ministre en quittant l’Exécutif. Enfin, les anciens ministres ont souhaité qu’il y ait une célérité dans le traitement de leur dossier et que le procès devant la haute cour de justice puisse se tenir rapidement afin que chacun soit définitivement fixé sur son sort. Ils espèrent que ce dossier sera vite vidé car il est difficile de vivre avec une épée de Damoclès judiciaire qui plane en permanence sur votre tête.

 

Zéphirin Diabré en a pris bonne note et a promis d’en toucher mot au chef de l’Etat qui seul peut dégoupiller la situation des membres de ce dernier gouvernement de Blaise Compaoré.

 

 

 

- Le «Mouvement U Gulmu Fi» de la société civile a décidé de l’organisation d’une marche le samedi 24 avril 2021 à Fada N’Gourma. Par cette manifestation, il entend exiger le bitumage du tronçon Gounghin-Fada dont l’état de dégradation est souvent à l’origine d’accidents graves de la route.

 

Au-delà de cette préoccupation, ce sont en réalité les différentes difficultés auxquelles la région de l’Est du Burkina Faso est confrontée que les organisateurs de la fameuse marche veulent exposer aux autorités du pays afin qu’elles y trouvent des solutions idoines.

 

Parmi les problèmes que vivent les citoyens dans cette partie du Burkina et qui portent malheureusement un coup dur à l’économie locale, voire nationale, figurent, entre autres, en bonne place la question sécuritaire, l’alimentation, l’accès à l’eau potable et l’éducation, l’insuffisance criarde en matériel du Centre hospitalier universitaire régional de Fada N’Gourma.

 

Pour tous ces soucis vécus au quotidien par les populations, le mouvement interpelle vivement le gouvernement. Hier jeudi 22 avril, une délégation venue de la capitale du Gourma a été reçue en audience par le chef de l’Etat au palais de Kosyam. Rien n’a filtré de cette entrevue qui s’est déroulée à huis clos, mais on imagine aisément qu’elle a porté sur les tribulations à l’Est. On ose alors croire qu’après ce tête-à-tête avec le grand chef, la crise sera désamorcée une fois pour toute au grand bonheur de tous.

 

 

 

- La matinée du samedi dernier à la grande mosquée de Ouagadougou a été le théâtre d’une bataille rangée.

 

En effet, ce jour-là, les  deux camps qui se disputent la direction de la structure associative y ont encore fait parler d’eux et de la façon la plus tonitruante. Les partisans de bureau sortant se sont opposés à l’installation de l’équipe transitoire issue du Congrès de Bobo-Dioulasso et constituée à huit mois de la fin du mandat de celle dirigée par el hadj Abdoul Rasmané Sana. Mais pour le camp d’en face, la cérémonie d’installation du nouveau bureau a bel et bien reçu les « bénédictions » pour ne pas dire l’autorisation du ministère chargé des Cultes, à travers une correspondance datée du 11 avril 2021.

 

La tension est donc montée d’un cran, obligeant les éléments de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) à faire usage de gaz lacrymogène pour disperser les protagonistes et éviter que le pire survienne. Il y a eu également l’arrestation de trois personnes dont le responsable à la sécurité et le président du comité de gestion de ladite mosquée qui ont été placés en garde à vue au commissariat de Ouaga 2000. Aux dernières nouvelles, les personnes interpellées  ont été libérées le mercredi soir après avoir été auditionnées par le procureur du Faso.

 

A cette même date, une rencontre a eu lieu entre la Fédération des associations islamiques du Burkina (FAIB) et le ministre de l’Administration territoriale, Clément P. Sawadogo. Ce dernier était au siège de la faîtière des structures islamiques pour une prise de contact. Il en a profité pour solliciter des bénédictions dans la conduite de sa mission et surtout appeler les uns et les autres à mettre de l’eau dans leur…zom-koom en vue de préserver la quiétude des Burkinabè.

 

 

 

- Détenu à la Maison d’Arrêt et de correction de Kaya depuis le 3 mars 2021, Issaka Sawadogo, dit « Excellence Isaac », maire de Pensa, a vu sa santé se dégrader depuis le début du mois d’avril. Bénéficiant d’une permission du tribunal de grande instance de Kaya, le bourgmestre a été admis, sous surveillance pénitentiaire, au Centre hospitalier régional (CHR) de ladite ville depuis le mardi 13 avril dernier. Selon les informations, le maire de Pensa  souffre de douleurs abdominales depuis plusieurs années et avait même subi une intervention chirurgicale en 2019.

 

En rappel, l’édile Issaka Sawadogo et un de ses proches, lui aussi conseiller municipal de Pensa, ont été déférés à la maison d’arrêt et de correction de Kaya depuis le 3 mars 2021 pour « faux et usage de faux en écriture sur une procuration » lors de la session budgétaire délocalisée à Kaya le 27 novembre 2020. Ladite session avait été reprise le 23 janvier 2021 suite à son invalidation par l’administration pour « irrégularités ». 

 

Elu sous la bannière du MPP, Issaka Sawadogo a été porté à la tête de la municipalité de Pensa le 3 août 2020 en remplacement du défunt maire Souleyman Zabré du RDS, parti majoritaire au conseil avec 47 élus sur 72. Ce dernier  avait trouvé la mort lors d’une embuscade terroriste le 6 juillet 2020 sur l’axe Pensa-Barsalogho.

 

 

 

- Le mercredi 21 avril 2021, une équipe de patrouille mixte des Forces de défense  et de Sécurité (FDS) ainsi que des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) du détachement de Yirgou a été victime d’une embuscade. Comme à l’accoutumée, l’attaque a été perpétrée par des hommes armés non identifiés. Pour l’heure, le bilan provisoire fait état de quatre soldats tués, tous de deuxième classe.

 

Ce sont Diasso Djimaldine, Palenfo Pascal, Maïga Pascal et Nakanabo Abdoul Fatao. On compte également deux blessés graves. En plus, un véhicule pick-up a été incendié et un autre emporté.  

 

    

 

- Décès mardi 20 avril 2021 à Ouagadougou du magistrat Barthélemy Toé, ancien président de la Cour suprême.

 

Après la veillée de prières  le lundi 26 avril à partir de 20 h en son domicile de la Zone du Bois, une messe d’absoute sera dite le mardi 27 avril 2021 en l’église Saint-Camille de Dagnoën suivie de l’inhumation au cimetière municipal de Ouagadougou.  

 

 

 

Tipoko l'Intrigante n'apprend rien d'elle-même, elle n'invente jamais rien. Tipoko l'Intrigante est un non-être. Elle n'est ni bonne en elle-même, ni mauvaise en elle-même. Elle fonctionne par intuition, car "l'intuition c'est la faculté qu'a une femme d'être sûre d'une chose sans en avoir la certitude..."

 

 

 

Ainsi va  la vie.

 

Au revoir.

 

 

 

Ton cousin

 

 Passek Taalé

 

 

 

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