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Quelque part à Karpala : Les Poulets blessés vous disent bonjour

 

Je suis en vacances, et de mon île paradisiaque, je vous dis bonjour. Comme les humeurs, elles, ne connaissent pas de congés, je me fais l’agréable devoir et le plaisir de vous annoncer une bonne nouvelle qui a pour cadre Karpala, un quartier pittoresque grand comme deux fois la France.

 

On ressort rarement entier d’une escapade dans cette zone. La preuve, la dernière fois, je suis revenu avec un enjoliveur de mes roues en moins. Il s’est certainement détaché dans une crevasse mal négociée. Mais qu’on ne s’y trompe : le bled recèle des ressources insoupçonnées, d’où la bonne nouvelle dont je vous  ai parlé tantôt. Le jour où vous aurez rendez-vous à Karpala, longez les pylônes, et remarquez un espace vert qui ne désemplit jamais.

 

Est-ce parce que la boisson y est très fraîche ou que l’accueil est spécial ? Que nenni. L’explication est toute simple : c’est l’un des rares endroits au monde où l’on peut s’offrir à 1500 francs TTC un plateau de poulet entier grillé et assaisonné au soumbala. Oui vous avez bien lu : 1500 francs, au lieu des 3500 habituels. Et le grilleur de gallinacés ne fait pas mystère de son altruisme puisque c’est écrit en grandes lettres sur sa méchante plaque ceci : « Grillade Poulets blessés ». Seuls les initiés comprendront. Mais pour que le secret soit le mieux gardé de la République côté invités, le client se doit de respecter un mode opératoire séculaire : aller sur place faire la commande soi-même et régler en même temps la note.

 

Toi qui me lis, tu te demandes certainement comment ça se fait. 1500 francs le poulet grillé à Ouagadougou, une capitale qui commet chaque soir que Dieu fait un génocide aviaire ? Est-ce des poulets subventionnés ? Pas du tout. L’explication est pourtant toute simple : notre bon samaritain de grilleur s’approvisionne chez les revendeurs de poulets, mais lui a l’exclusivité des volailles qui ont rendu l’âme en cours de voyage, soit dans les camions qui les ramènent depuis les villages ou à l’arrivée. Mais quel avantage pour le consommateur au portefeuille fragile qui peut même se payer le luxe de faire occire deux poulets pour le prix d’un ! Le premier pour agrémenter la conversation, le second à emporter : un  présent à la future belle-mère par exemple.

Issa K. Barry

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