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Développement du Burkina: Le MINEFID ne fait pas que délier les cordons de la bourse

On a tendance à l’oublier, mais la dimension «développement» est l’une des attributions du bien nommé ministère de l’Economie, des Finances et du Développement (MINEFID). A ce titre, le département dirigé par Lassané Kaboré depuis le 28 janvier 2019 porte une dizaine de Projets et programmes de développement (PPD) à fort impact sur le terrain. Voici un tour d’horizon de quelques projets portés par le MINEFID.

 

 

 

C’est une « banale » publication sur les réseaux sociaux, mais cela a suffi à changer la vie des élèves de l’école de Kouri dans la commune de Ouahigouya. Comme de nombreux enfants Burkinabè, c’est dans des classes de fortune, faites de paillote, de bric et de broc, qu’ils recevaient le savoir. La force de l’image et la magie de la toile ont suffi à mettre fin à leur calvaire puisque bientôt ils pourront installer leurs tables-bancs dans des bâtiments flambant neufs. Si à Kouri, c’est de Facebook qu’est venu le salut, ailleurs comme à l’école Ouézzin-Ville E à Bobo, c’est un reportage de la télévision nationale qui a alerté sur les effectifs pléthoriques et permis la construction de trois classes supplémentaires. Parfois, ce sont les populations elles-mêmes, les autorités locales, voire le ministère de l’Education nationale, qui lancent un cri du cœur et, autant que faire se peut, ils trouvent un écho favorable auprès du Programme de réalisation des infrastructures socio-économiques (PRISE). Doté d’une enveloppe de 11 milliards de FCFA, le programme, qui a amorcé sa mise en œuvre en 2020, a déjà à son actif, dans le domaine de l’éducation, la construction de 42 complexes scolaires sur tout le territoire national. On peut y ajouter 23 CSPS, 69 forages positifs, une Adduction d’eau potable simplifiée (AEPS).

L’aménagement des pistes rurales est aussi pris en compte dans ce projet dont l’ambition première est d’apporter des réponses aux préoccupations urgentes des populations. Le PRISE a ainsi aménagé 10 km de routes en terre, construit 17 radiers et 16 dalots. Ces ouvrages de franchissements ont permis à n’en point douter de sauver de nombreuses vies, comme en témoigne le Tansoba de Koutoumtenga, dans la commune de Boussouma, qui a en mémoire les nombreux drames pendant la saison pluvieuse. « Sauf en cas d’urgence, personne ne voulait venir chez nous pendant cette période », se souvient le chef coutumier.

Partie au départ pour une durée d’une année, la mise en œuvre du PRISE a été prolongée en 2021, et le gouvernement au vu des résultats engrangés ayant décidé d’allouer au projet 11 milliards de plus. Plusieurs autres réalisations devront ainsi voir le jour, notamment 31 complexes scolaires, 18 CSPS, 116 forages, 1 AEPS et une retenue d’eau. Le 19 juillet dernier, on a assisté déjà à la réception provisoire du barrage de Ziga dans le Sanmantenga, et le 24 juillet était inauguré le CSPS  d’Ouroukou en présence du directeur du cabinet du président du Faso, Seydou Zagré, et des ministres de la Santé et de la Sécurité.

Dans le microcosme des projets et programmes, le PRISE cultive une certaine particularité. Pour son fonctionnement, le projet, qui squatte le bâtiment du MINEFID, dispose de seulement 5 cadres qui se déplacent avec leur véhicule personnel. « Nous avons voulu que pratiquement 100% des ressources aillent à la réalisation des infrastructures sur le terrain. C’est une autre approche que nous voulons donner aux projets et programmes », explique le coordonnateur du PRISE, Olivier Sawadogo. Le projet met en outre un point d’honneur à  assurer la qualité des réalisations et veille à ce que toutes les commodités y soient. « Notre objectif était de faire en sorte que lorsque vous arrivez dans un de nos CSPS, vous ayez le sentiment d’être à Ouagadougou, quel que soit le lieu où vous vous trouvez. Même nos latrines sont carrelées. Et vous avez l’eau courante grâce aux forages, qui fonctionnent avec l’énergie solaire. Au niveau des écoles, nous avons voulu que les enfants puissent revenir étudier la nuit. Pour faire face à la chaleur, nous avons décidé de mettre dans beaucoup d’établissements des ventilateurs », détaille Olivier Sawadogo. S’il peut s’enorgueillir des résultats atteints par le PRISE en seulement une année, Olivier Sawadogo se dit conscient que les préoccupations des populations restent énormes et que le PRISE à lui seul ne peut pas subvenir à leurs besoins.

On comprend donc les grandes ambitions de ce qui est sans doute l’un des fers de lance du programme de gouvernance du pouvoir actuel, à savoir le Programme d’appui au développement des économie locales (PADEL), qui est doté d’une enveloppe de près de 400 milliards de FCFA.  L’objectif du PADEL est de lutter contre la pauvreté et de réduire les disparités inter et intra régionales.

La mise en œuvre du PADEL sur le terrain se fait à travers 4 composantes interdépendantes qui sont :

- le développement des filières économiques porteuses et la transformation des unités de production informelles ;

- le développement des services énergétiques modernes et d’infrastructures socioéconomiques de base ;

- la protection sociale et l’inclusion des ménages vulnérables dans le circuit économique ;

- la promotion de l’inclusion financière et sociale des populations.

Le PADEL tire ses fondements du Schéma national d’aménagement et de développement durable du territoire (SNADDT) adopté par décret le 29 mars 2017.  L’un des constats dressés par ce document-boussole, c’est le fait que les 13 régions du Burkina ne sont pas logées à la même enseigne en matière de développement économique et social. Certaines sont en effet mieux loties que d’autres en équipements, infrastructures et ressources naturelles.

Au nom d’une forme de discrimination positive, explique le coordonnateur du PADEL, Charles Félix Dalla, sont priorisées dans le cadre des réalisations du programme les communes au bas de l’échelle en ressources financières. Lancé en 2019 dans la région-pilote du Sahel, le PADEL, dont la durée a été prolongée  à 2023, couvre aujourd’hui l’ensemble des régions et des communes du Burkina. De nombreuses infrastructures portent la marque du PADEL sur tout le territoire national. Cela va des gares routières comme celle de Dori, inaugurée le 20 février 2020 en présence du chef de l’Etat, en passant par les marchés de bétail, les sites maraîchers, les boutiques, les parcs de vaccination, les CSPS, les magasins de stockage, etc.

Dans un autre registre, ce sont déjà plus de 101 000 ménages vulnérables qui ont bénéficié de transferts de cash d’un montant global de plus de 20 milliards de FCFA. Des crédits d’un montant total de 77 040 000 FCFA ont été alloués à 617 bénéficiaires, 1 439 bénéficiaires ont reçu du crédit par mobile banking, et 3350 femmes et jeunes ont bénéficié de crédits pour un montant total de plus de 643 millions de FCFA.

« Nous avons injecté 80 à 700 millions par commune. C’est la première fois qu’un projet investit autant d’argent en si peu de temps dans les collectivités territoriales », résume le coordonnateur du PADEL.

 

FBDES, le « bébé » de Lassané Kaboré

 

 Outre les projets et programmes, l’implication du MINEFID dans le développement se fait à travers d’autres mécanismes. C’est le cas notamment du Fonds burkinabè de développement économique et social (FBDES) qui s’illustre particulièrement par son dynamisme. Mais si c’est seulement maintenant que le FBDES est sous le feu des projecteurs, l’institution a presque un demi-siècle d’existence. C’est en effet jusqu’en 1975 que remonte la création du Fonds qui avait alors pour dénomination «Fonds de voltaïsation des capitaux». L’objectif initial de cette structure, qui compte parmi ses pères fondateurs  feu le général Tiémoko Marc Garango, ancien ministre de l’Economie et des Finances, était de favoriser l’entrée des nationaux dans le capital de sociétés détenues par les étrangers. Le FBDES dans sa forme et dans son appellation actuelle a été créé  par décret le 6 avril 1998. L’initiateur était un certain Lassané Kaboré. L’actuel ministre de l’Economie, des Finances et du Développement était à l’époque le directeur des affaires monétaires et financières. « Le ministre a retrouvé son bébé », souffle le directeur général du fonds, Wendpanga Bruno Compaoré. Le FBDES est régi par un décret, adopté sous la Transition en 2015, portant adoption des statuts particuliers, et sa tutelle technique et financière est assurée par le MINEFID. Le FBDES, qui peut être considéré comme « le bras financier » du ministère de l’Economie, a ainsi notamment pour mission d’acquérir des actions et des obligations ; d’apporter son concours sous forme de prêts directs, de garanties ou d’aval dans le cadre de la création d’entreprises nouvelles et du développement d’entreprises existantes dans les secteurs jugés prioritaires. Il a également pour rôle de procéder, le cas échéant, à la cession des titres financiers qu’il détient dans son portefeuille et d’apporter un appui financier aux structures publiques ou privées intervenant dans le soutien à la production ainsi que dans la lutte contre le chômage à travers des placements structurants.  «A travers le fonds, l’Etat a réalisé de grands projets structurants de développement et  participé à la mise en place de grandes unités industrielles », fait savoir Bruno Compaoré, qui cite les exemples de SOFITEX, de Dafani ou de la BCB (Banque commerciale du Burkina). Si on fait une rétrospective, depuis 2008, le Fonds a financé, selon son directeur général, 2999 personnes individuelles et 1046 entreprises toutes catégories confondues.

Si le FBDES fait surtout parler de lui, c’est principalement grâce au programme « Burkina Start-up ». Ce programme entièrement pensé et mis en place par le Fonds depuis 2017 vise à financer des projets très innovants et ayant un potentiel élevé de rendement. L’institution entre notamment dans le capital de ces entreprises à hauteur de 10% ou leur octroie des crédits pour leur lancement ou croissance. Chaque année, deux ou trois sessions sont ouvertes pour recevoir les candidatures. Une centaine de projets ont déjà été financés par « Burkina Startups » qui est doté d’une enveloppe de 10 milliards de FCFA pour une durée de 5 ans.

L’autre programme phare du FBDES, « Agrinova », vise à inciter les jeunes Burkinabè à la création d’entreprises dans le secteur de la production agro-sylvo-pastorale.

Le Fonds verra bientôt la modification de ses statuts et deviendra un fonds d’investissement à caractère stratégique. «Ça va changer notre mode d’intervention. Ça va lui donner plus de force et lui permettre de lever des ressources, au lieu de compter uniquement sur les ressources de l’Etat. Selon les orientations du ministre de l’Economie, il faut qu’on soit plus ambitieux. On finance de grandes entreprises mais on peut aller au-delà», soutient Bruno Compaoré.

Pour sûr cette mutation du fonds était attendue également par les bénéficiaires, parmi lesquels Silvère Salga. Le jeune inventeur, patron de Salgatech, a, grâce à l’accompagnement du FBDES, pu développer sa chambre froide solaire multifonction ou «grenier frais».  La présentation officielle du KLYMAX-Z1000, ainsi qu’a été baptisée l’invention, a eu lieu le 11 février 2021 en présence du ministre de l’Agriculture, Salifou Ouédraogo, et de son collègue de l’Energie, Bachir Ismaël Ouédraogo.  Tout en saluant l’initiative « Burkina Startups », Silvère espère que le Fonds pourra très bientôt augmenter son enveloppe et plaide par ailleurs pour qu’il soutienne les startups dans le plaidoyer pour l’accès à la commande publique.

En tout ce sont 16 projets et programmes relatifs à plusieurs domaines que porte le ministère de l’Economie et des Finances. Le département chapeauté par Lassané Kaboré entend ainsi, au-delà de son rôle classique de mobilisateur des ressources pour financer le développement, être lui-même un artisan de ce développement à travers les PPD qu’il héberge.

 

Hugues Richard Sama

Dernière modification lemercredi, 28 juillet 2021 21:29

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