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Expulsion coordinatrice des Nations unies : Le Burkina et l’indésirable Manzi

Signora Barbara Manzi se souviendra pendant longtemps de ce Noël 2022.

 

En guise de « cadeau » de la Nativité, la coordinatrice résidente du système des Nations unies au Burkina Faso a, en effet, été déclarée persona non grata le vendredi 23 décembre et sommée de quitter le territoire national le même jour.

Il faut croire qu’elle a dû commettre un péché inexpiable pour que pareille sentence tombe sur sa tête, telle une trique.

Sitôt le communiqué officiel rendu public, la ministre des Affaires étrangères, de la Coopération régionale et des Burkinabè de l’extérieur, Olivia Rouamba, a donné les raisons de cette fatwa au cours du JT de 13h sur les antennes de la Télévision nationale.

Il ressort de cette intervention que nombreux sont les griefs retenus par le gouvernement contre l’Italienne.

Il lui est notamment reproché de « jeter le discrédit » sur le pays en appelant à l’évacuation des familles du personnel des Nations unies au Burkina.

« …Mais contre toute attente, la coordonnatrice résidente du système des Nations unies prend une note qui fait cas de l’évacuation des familles des diplomates du système des Nations unies de Ouagadougou pour raisons sécuritaires. Nous trouvons cela inconcevable. La décision a été unilatéralement prise, nous n’avons pas les éléments de preuves et les indicateurs y relatifs », a longuement déploré la patronne de la diplomatie burkinabè.

Et ce n’est pas tout ni la plus grave des récriminations : « Au cours d’une audience avec le ministre délégué, elle a affirmé avoir des liens avec des chefs terroristes au Burkina Faso. Les preuves sont légion, elle part à Djibo et revient comme elle veut alors que même nos FDS ne peuvent pas effectuer ce genre de déplacements. En plus de cela, elle interdit aux représentants des 33 agences du système des Nations unies de s’afficher avec nous alors que ce sont des agences spécialisées qui devraient avoir des contacts directs avec les différents départements ministériels. Ce qui n’est pas le cas et c’est sur son interdiction », a renchéri Olivia Rouamba.

Comme on peut le constater, c’est à peine, si on lit entre les lignes, nos autorités ne suspectent pas dame Manzi d’intelligence avec les terroristes.

Comme il fallait s’y attendre, dans une note de son porte-parole publiée le lendemain de l’expulsion, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a regretté la décision du gouvernement et apporté son soutien à sa représentante dans notre pays : « Le Secrétaire général a pleinement confiance dans le système des Nations unies au Burkina Faso, ainsi que dans l’engagement et le professionnalisme de Madame Manzi ».

Sauf erreur ou omission de notre part, c’est bien la première fois qu’un diplomate, qui plus est du système des Nations unies, est chassé comme un malpropre sous nos cieux.

Pour certains, c’est moins le fait de la déclarer persona non grata, après tout chaque Etat est libre de le faire, que la manière, peu diplomatique, qui pose problème ici.  

Et il faut dire que cette locution latine n’évoque pas de bons souvenirs à la célèbre Maison de verre de New York.

En effet,  en avril 1987, l'ancien secrétaire général des Nations unies de 1972 à 1981, Kurt Waldheim, fut déclaré persona non grata aux États-Unis et ne fut plus le bienvenu dans de nombreux pays en raison des révélations sur son passé nazi.

En tous les cas, on ne peut que regretter que l’on en soit arrivé à une telle décision qui, à n’en  pas douter, pourrait contribuer à braquer nos partenaires bilatéraux et multilatéraux, même si dans le cas présent c’est une personne, et non l’institution onusienne, qui est visée.

On ne saurait oublier que cet incident inédit dans les annales de la diplomatie du Burkina Faso intervient dans un contexte où bon nombre de nos partenaires, occidentaux en l’occurrence, ne sont plus en odeur de sainteté avec une frange de la population et même des plus hautes autorités. 

On se rappelle, en effet, les saccages, dans la foulée de la prise du pouvoir du capitaine Ibrahim Traoré, du consulat de France et des instituts français à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso. Sans compter les menaces qui pèsent sur la représentation de l’Union européenne dans la capitale.

Tout cela, sur fond de rapprochement à petits pas avec la Russie de Poutine et de Prigojine, fondateur du groupe Wagner.

Mais de là à penser qu’il y a une relation de cause à effet, c’est sans doute un pas qu’il faut se garder de franchir.

Toutefois, on a le sentiment que le capitaine Ibrahim Traoré marche doucettement mais résolument sur les pas du colonel Assimi Goïta du Mali.

Reste à espérer que l’ostracisation de la coordinatrice du système des Nations unies n’impactera pas l’intervention des organismes spécialisés de l’ONU dans notre pays, notamment dans les secteurs sociaux, à un moment où la crise humanitaire qui découle du terrorisme devient de plus en plus intenable.

 

Alain Saint Robespierre

Dernière modification lemercredi, 28 décembre 2022 20:11

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