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Portrait El Hadj Oumarou Kanazoé : Histoire d’un petit tisserand devenu milliardaire Spécial

Oumarou Kanazoé est décédé hier mercredi 19 octobre 2011 à Ouagadougou. En souvenir de cet homme multidimensionnel, nous vous proposons un portrait que nous lui avons consacré à l'issue d'une entrevue à son domicile en février 2011.

En cet après-midi du 18 février 2011, rendez-vous est pris pour 17 heures afin que nous puissions réaliser un entretien avec le richissime entrepreneur, El Hadj Oumarou Kanazoé. Ponctuel comme une horloge suisse, nous nous retrouvons à son quartier général de Pissy (secteur 17 de la ville de Ouagadougou), où l’ambiance était celle des grands jours : un monde fou et bigarré qui devisait de tout et de rien dans l’attente de celui que l’on dit large à l’extrême et qui constitue la clé de voûte des problèmes de ses semblables. Au Burkina, il est aussi connu que  le FCFA est attractif comme l’aimant.

Habillé d’un grand boubou bazin bleu ciel brodé, des lunettes teintées au visage, un bonnet blanc immaculé vissé sur la tête, l’homme s’imposait une démarche majestueuse pour gravir l’escalier qui le conduit dans son salon situé au premier étage de son palais où il nous a reçu. Le luxe est à la hauteur de sa renommée et de sa richesse ; et le monde présent partagera sa table après que sa première épouse, Adja Alizèta, lui eut ôté ses sandales qu’elle lava soigneusement. L’expression d’une affection vieille d’un demi-siècle. Et le menu était des plus variés : tô de fonio, accompagné de sauce de gombo sec, d’oseille, riz à la sauce, poulet grillé, soupe de poulet, soupe d’agneau, beignets, haricot au couscous, macaronis, pastèques, papaye, etc. Et, comme seule boisson, de l’eau plate. Nous voilà en face de courtisans qui ne le quitteront pas des yeux durant notre entretien. Il se débarrassa alors de son bonnet, de ses lunettes et de son grand boubou  pour nous présenter son vrai visage.

De taille et de corpulence moyennes, sa peau est d’un noir de jais. Tel se présente à nous Oumarou Kanazoé, cet entrepreneur dans le bâtiment et les travaux publics, devenu riche à milliards à la force du poignet. A 84 ans (il dit être né en 1927 à Yako, dans le Passoré), il défie les outrages du temps et respire la pleine forme en investissant et en s’investissant aussi bien au Burkina, au Mali, au Bénin, au Togo qu’au Niger. Comparé à juste raison au richissime nigérian, feu chief Abiola, pour sa fortune, il nous surprend en avouant ignorer l’effectif de son parc automobile. Il sait seulement qu'il possède trois avions dont un CESSNA Citation II de 10 places, qui lui permettent de superviser ses nombreux chantiers. Il ne dira pas un mot de ses avoirs en banque. Top secret.

 

Mais d’où lui vient cette fortune dans un Faso riche seulement de ses hommes ?

 

«Etant enfant unique de mon père et de ma mère, je dus très tôt faire face à la vie, nourri de courage et de l’esprit d’entreprise. Après l’école coranique, je me suis investi dans la confection des bandes de cotonnade qui serviront à la fabrication des vêtements que je vendais dans les villages environnants».

Le jeune  Yarga se fit une place au soleil grâce à la qualité de ses produits ; et ce succès le conduisit par la suite en Gold Coast (actuel Ghana) et au Mali, d’où il ramenait toutes sortes de marchandises, souvent à pied, à dos d’âne et, plus tard, à vélo, en dépit des bêtes sauvages qui décimaient tout sur leur passage à l’époque. Avec ses économies, il ouvrit une boutique et un restaurant qui attiraient plus d’un. Vint ensuite le transport de la main-d’œuvre  vers la Côte d’Ivoire, où il gagnait 125 F sur chaque passager ; et le premier camion, acheté en 1955 à 900 000 FCFA, lui permit d’aller loin dans ses affaires.

Aujourd’hui, c’est un entrepreneur comblé qui verse bon an mal an la coquette somme de 500 millions de nos francs en termes de salaires à ses centaines d’employés. N’ayant ni frère ni sœur utérins, Kanazoé (OK pour certains, Le vieux pour d'autres), qui est pourtant père d’une trentaine d’enfants et grand-père d’environ 120 petits enfants, dit n’avoir aucun loisir, étant constamment sur les chantiers. A dire vrai, l’homme est très occupé. Debout tous les jours à 4 heures du matin, après une prière, il avale rapidement un plat de tô chaud au poulet grillé et commence la ronde des chantiers pour ne regagner son domicile que sous le coup de 19 heures, pour s’occuper de sa famille. Telle est la vie de ce fils unique devenu milliardaire.

 

Boureima Diallo

Dernière modification lemercredi, 19 octobre 2011 21:16

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