Législatives tunisiennes : A la recherche d’une introuvable majorité
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Les résultats officiels devraient être connus demain mardi, mais les tendances, vingt-quatre heures après les législatives de dimanche dernier, ne laissent pas de doute sur la configuration de la future Assemblée nationale tunisienne.
Les premiers chiffres disponibles donnent en effet le parti islamo-conservateur Ennahda en tête avec une quarantaine de sièges, suivi de la formation de Nabil Karoui, Qalb Tounès, créditée de près de trente-cinq députés. Viennent, loin derrière, Tahya Tounes du Premier ministre Youssef Chahed, et Karama, qui récoltent chacun 17 sièges, tous deux talonnés par le Parti destourien libre et le Courant démocratique, qui obtiendraient chacun 14 sièges. Une foultitude de partis et de listes indépendantes viennent compléter ce décor parlementaire fragmenté.
Ces législatives confirment donc un large rejet de la classe politique tunisienne sur fond de net recul des islamistes qui en sortent prostrés. Bis repetita, peut-on dire, puisque c’est le même scénario qui a marqué le premier tour de la présidentielle du 15 septembre 2019.
A l’issue du scrutin de dimanche dernier, le premier parti de la Tunisie est désormais celui des abstentionnistes, puisque près de 60% de l’électorat, blasé par les promesses non tenues d’un Printemps arabe parti de leur pays, ont préféré aller se bronzer sur les plages d’Hammamet ou de Sousse plutôt que d’aller glisser un bulletin dans l’urne.
La future majorité parlementaire devrait donc se nouer autour d’Ennahda ou de Qalb Tounès, le parti de Nabil Karoui, derrière les barreaux mais qui a réussi la prouesse de se qualifier pour le second tour de la présidentielle du 13 octobre.
« Majorité » semble être un bien grand mot, car à l’allure où vont les choses, l’on a bien peur qu’aucun parti ne parvienne à réunir la majorité requise de 109 sièges sur les 217 que doit compter la future Assemblée nationale afin de former un gouvernement.
Personne ne pouvant donc gouverner seul, l’on s’achemine vers un véritable mercato législatif avec d’interminables tractations, des compromis et même des compromissions. Et si par extraordinaire l’un des camps réussissait le tour de force de réunir le quantum de sièges exigé, la majorité parlementaire ainsi constituée ne pourrait qu’être fragile, et ce serait la porte ouverte à une instabilité politique à l’italienne ou à l’israélienne. Et le moindre coup de vent politique pourrait l’emporter.
Il faut aussi craindre qu’aucun des regroupements contre-nature qui vont s’opérer ne puisse obtenir l’onction parlementaire pour former un gouvernement, ce qui obligerait les Tunisiens à aller aux urnes dans les quatre mois à venir.
En attendant, la question que l’on se pose, c’est de savoir si ces résultats préfigurent de quelque manière l’issue du second tour de la présidentielle.
Difficile de lire dans ce marc de café tunisien et même le mage de Tozeur, ce célèbre voyant fréquenté par des politiques et célébrités du monde entier, ne s’y serait pas risqué.
L’exercice est d’autant difficile que Kaïd Saïed, le candidat indépendant arrivé en tête du premier tour de la présidentielle, n’avait officiellement pas de candidats aux présentes législatives. Même si environ quatre-vingts élus antisystème sont susceptibles d’être charriés à l’hémicycle par cette vague antiparti, difficile de présager l’avenir politique du pays d’Habib Bourguiba dans les prochaines années.
Alain Saint Robespierre
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