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Procès charbon fin : Le rapport d’expertise continue de diviser les parties

C’est loin d’être fini, les débats de forme dans l’affaire dite du charbon fin. Le tribunal s’est encore retiré le mardi 14 janvier 2020 pour statuer sur une demande de nomination d’expert aux fins d’enquête complémentaire formulée par les avocats d’Essakane. Le délibéré sur cette requête est prévu pour le 11 février au Tribunal de grande instance de Ouagadougou. 

 

Il faudra du souffle à tous ceux qui s’intéressent au procès charbon fin, car, à écouter les différentes parties, c’est un marathon judiciaire en perspective. A la dernière audience, le tribunal s’était retiré pour statuer sur les irrégularités relevées par la défense et la demande de saisie conservatoire des biens de la société minière Essakane qu’avait introduite les avocats des parties civiles. Dès l’ouverture des débats, le tribunal ayant constaté que les avocats de l’Etat ont retiré leur requête, une suspension d’une heure a été observée par les juges afin de prendre en compte la nouvelle donne dans leur décision.

De retour dans la salle après plus de deux heures d’échanges, le tribunal a rejeté la demande en annulation des rapports d’expertise introduite par la partie défenderesse. Pour ce qui est du deuxième point, il en a pris acte, ce qui a nécessité une nouvelle suspension, cette fois de 15 minutes, pour permettre aux différentes parties au procès de se concerter.

A la reprise, les citations à comparaître ont été signifiées aux deux personnes morales, à savoir Essakane et Bolloré Transports et Logistics. Il en a été de même pour les 12 personnes physiques. Un exercice qui aura duré une heure. Cela fini, la défense, par la voix de Me Moumouny Kopiho, a rejeté, comme elle l’a toujours fait, le rapport d’expertise. « Le document contient des mensonges scientifiques », a-t-il clamé. Son confrère Me Pierre Yanogo, lui, plaidera avec des termes juridiques. Pour ce dernier, le dossier est technique. Se basant sur une disposition du code de procédure pénale, il a demandé au tribunal d’ordonner une expertise du dossier dans les règles de l’art.

Le rapport d’expertise a été fourni par Arsène Yonli, chimiste, et Aimé Nana, douanier. Ils ont été mandatés par le parquet pour cette tâche. « Ne prenez pas le risque (NDLR : s’adressant au tribunal) de condamner nos clients sur la base de fausses informations. Le mensonge scientifique est très dangereux », a prévenu Me Kopiho.

Pour une des rares fois, le ministère public et la défense parlent le même langage. La partie poursuivante n’est pas contre la demande de la défense. Cependant, elle souhaite la nomination d’un magistrat pour superviser les travaux et la mise en valeur de l’expertise nationale. La sollicitation de la défense, a écouté le parquet, ne perturbe pas sa sérénité, car pour lui les faits sont têtus et le temps n’aura aucun effet sur le dossier.

Contre toute attente, les parties civiles font un contrepied au parquet. Pour Me Rodrigue Bayala, la défense aurait dû formuler sa demande plus tôt. Jugeant la requête imprécise, il a demandé au tribunal de la rejeter. A son avis, a-t-il poursuivi, la défense va vite. Elle devait, selon lui, laisser le tribunal instruire le dossier, et s’il y a des blocages du fait des questions techniques, le juge fait appel aux experts. Son confrère Me Prospère Farama, qui défend les intérêts du REN-LAC, veut couper court aux débats. Pour sa part, la défense devrait s’en tenir à la décision du tribunal. Selon lui, si un chimiste, parlant d’Arsène Yonli, qui plus est professeur à l’université de Ouagadougou, ne peut pas fournir un bon rapport, c’est à désespérer de la qualité de la formation au « temple du savoir ». Il est catégorique : « Le débat sur la qualité des experts ne tient pas la route ».

D’aucuns se demanderont pourquoi les avocats de l’Etat ont retiré leurrequête de saisie conservatoire des biens d’Essakane. A écouter Me Bayala, c’est une appréciation des avocats de l’Etat et il n’y a pas lieu de polémiquer là-dessus. « Un procès est évolutif. Il appartient au justiciable d’apprécier le sens de ses intérêts ». 

L’audience reprend le 11 février 2020 au Tribunal de grande instance de Ouagadougou.

 

Akodia Ezékiel Ada

Dernière modification lemercredi, 15 janvier 2020 19:08

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