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Echange téléphonique avec Hamed Bagayoko : Gbagbo fait d’un coup de fil deux coups

 

Plus qu’un simple coup de fil, c’est une main tendue que Laurent Gbagbo vient de faire aux autorités ivoiriennes. Hier, on a en effet appris par ses avocats, qui ont voulu rendre l’affaire tout de suite publique, que l’ancien président a  échangé mercredi au téléphone avec le Premier ministre Hamed Bagayoko.

 

Ce n’est certes pas (encore) avec son successeur, Alassane Dramane Ouattara, mais c’est  en soi un événement puisque c’est la première fois depuis qu’il a été délogé le 11 avril 2011 de sa résidence au son de la canonnière des troupes françaises et des FRCI, puis transféré en novembre à La Haye  qu’il a un échange direct avec  le pouvoir en place.  

 

Objet de l’appel selon ceux qui l’ont éventé : plaider la cause d’Henri Konan Bédié, de Pascal Affi N’Guessan, d’Assoa  Adou, d’Albert  Mabri Toikeuse,  de fait en résidence surveillée depuis mardi ;  leurs  domiciles ayant été encerclés par un cordon sécuritaire après  qu’ils eurent annoncé la naissance  d’un Conseil national de transition (CNT) suite à la victoire d’ADO à la présidentielle du 31 octobre dernier.

 

La tension, il est vrai, est montée à nouveau d’un cran après la proclamation des résultats provisoires par la CENI - si tant est qu’elle fût jamais retombée - et les morts continuent de s’entasser, creusant encore plus le fossé, déjà abyssal, entre la galaxie ADO et ses  contempteurs, décidés à s’opposer par tous les moyens au troisième mandat du président sortant.

 

C’est donc dans ce contexte que «le Woody» a décidé de briser la glace pour jouer à l’apôtre de la  paix,  demandant notamment au chef du gouvernement «d’apaiser la situation en favorisant le dialogue plutôt que la répression». Et ce dernier aurait promis à son interlocuteur  de «poser des actes en faveur de la décrispation du climat politique».

 

On devrait de ce fait assister au desserrement de l’étau autour  des insurgés de la lagune Ebrié même si on doute fort qu’un tel geste de bonne volonté puisse se faire sans contrepartie, notamment la renonciation au virage insurrectionnel que prenait l’opposition au locataire de la résidence présidentielle de Cocody.

 

En attendant, on aura tout vu dans cette Côte d’Ivoire où  Gbagbo se fait aujourd’hui l’avocat de HKB et du leader de la tendance dissidente de son FPI qu’ils ne voulaient  plus voir même en peinture. C’est qu’en vérité l’ex-enfant terrible de Mama fait d’un coup de fil deux coups : tout en prenant fait et cause pour ceux qu’il défend, il joue aussi  dans cet épisode sa propre carte. On ne le sait que trop, celui qui a été acquitté en janvier 2019 par la Cour pénale internationale où il est jugé pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis pendant la crise postélectorale de 2010-2011 et qui a été autorisé à quitter sous certaines conditions la Belgique qui l’a accueilli,   ne rêve à 75 ans que d’une chose : pouvoir rentrer au  bercail pour attendre son éventuel procès en appel.

 

  Un rêve qui ne peut se réaliser qu’avec l’assentiment d’Abidjan qui  renâcle à lui établir le passeport qu’il demande depuis des mois. Maintenant que le gourou du RHDP a renouvelé son bail contre vents et marées, Gbagbo  a donc tout intérêt à être dans les bonnes grâces du régime, et c’est peut-être là l’objectif ultime de celui qui, dans une récente interview à TV5, disait qu’il était «résolument dans l’opposition à la pratique du troisième mandat» avant d’ajouter, on ne peut plus lucide, «mais je dis, vu mon expérience, qu’il faut négocier». Ce doit être les premiers pas de la négociation qu’il vient de poser pendant que Guillaume Soro, l’autre exilé de luxe tel un cabri mort qui n’a plus peur de couteau, demande depuis Paris aux forces de défense et de sécurité «d’agir».

 

 

Ousséni Ilboudo

Dernière modification lelundi, 09 novembre 2020 22:17

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