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Présidentielle en Ouganda : Les Bazukulu aboient, Sevo passe

 

Lors de la précédente présidentielle en 2017, quand on avait évoqué la possibilité pour le président ougandais de prendre une retraite bien méritée et de goûter enfin aux délices de la chaise longue dans sa ferme, il avait répondu : « Comment puis-je quitter une plantation de bananes que j’ai cultivée et qui a commencé à porter ses fruits ? » C’est dire que Yoweri Museveni, puisque c’est de lui qu’il s’agit, n’est pas près d’abandonner le pouvoir de si tôt. La preuve, la limitation du nombre de mandats à deux a été supprimée en 2005 et le verrou d’âge, qui était de 75 ans, a été sauté en 2017. Et gare au trouble-fête qui aurait l’audace de lui dire que trop, c’est trop.

 

 

Ce n’est pas l’opposant Boby Wine, de son vrai nom Robert Kyagulanyi, qui dira le contraire, lui qui a fait plusieurs fois la case-prison avec son corollaire de torture pour avoir dit ce qu’il pensait du vieil homme de 76 ans. L’ex-chanteur reggae, 39 ans, est d’ailleurs candidat à cette présidentielle qui s’est tenue hier 14 janvier 2020 dans l’ensemble du pays. Un jamboree électoral qui a été précédé d’une campagne sous tension avec pour épicentre cette répression en mi-novembre d’une manifestation qui a fait 54 morts. Il est vrai que pour Museveni, 54 morts, ce n’est que du menu fretin par rapport à ce qu’il estime avoir apporté au pays, lui le héros de l’Armée de libération nationale. Il est vrai qu’il a eu le mérite d’avoir, pendant les deux premières décades de sa gestion du pouvoir, impulsé la paix et le développement dans le pays.

 

Mais à trop tirer sur la corde, elle finit par casser. Ont suivi des années de braise ou toute voix dissonante était matée, et la préoccupation du septuagénaire était plus de pérenniser son pouvoir que de s’en faire pour ses compatriotes. Il est en effet aux affaires depuis 1986, soit 35 ans au compteur. Quand on imagine que ceux qui ont moins de 35 ans n’ont connu qu’un président !

 

Aux dernières nouvelles, le scrutin d’hier s’est déroulé dans le calme, même si le candidat Boby Wine se serait plaint que plusieurs de ses observateurs ont été arrêtés dans la matinée, sans oublier le dysfonctionnement de certains appareils biométriques dans les bureaux de vote qui ont fermé à 16 heures.

 

Une chose est néanmoins sûre : sauf tremblement de terre, Museveni remportera cette présidentielle, qui sera contestée comme les autres à l’exception de celle de 2011. Ses Bazukulu (petits-enfants en langue luganda), comme il appelle affectueusement les Ougandais, qui rêvent d’alternance, aboieront mais « Sevo » passera. Et ceux qui, de guerre lasse, rêvent d’une solution biologique qui pourrait un jour l’emporter sur celle des urnes, n’ont qu’à bien se tenir. D’abord, comme le disait si bien quelqu’un, Dieu seul sait qui va enterrer l’autre. Mieux, le vieux-père affiche la pleine forme ; en attestent les pompes qu’il a exécutées avec prestance lors du confinement.

 

 

Issa K. Barry

Dernière modification lelundi, 18 janvier 2021 22:40

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