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Investiture Patrice Talon : Ces promesses qui jurent avec la réalité

C’est dans la sobriété, non sans solennité, que Patrice Talon, réélu président du Bénin le 11 avril dernier, a prêté serment le 23 mai.

 

 

Sobriété parce que ce n’est pas devant un aéropage de ses pairs ou d’autres invités prestigieux, comme on a l’habitude de le voir ici et ailleurs, que le président réélu a été réinvesti dans ses fonctions. Cette sobriété, marquée par des manifestations sommaires, voire symboliques, a été un choix des organisateurs et du protocole d’Etat pour coller, disent-ils, au style de l’homme.

C’est néanmoins au rythme de 21 coups de canon que Patrice Talon a prêté le serment « devant Dieu, les mânes des ancêtres, la nation et devant le peuple béninois, seul détenteur de la souveraineté » de respecter et de défendre la Constitution que le peuple béninois s’est librement donnée ; de remplir loyalement les hautes fonctions que la nation lui a confiées ;  de ne se laisser guider que par l’intérêt général et le respect des droits de la personne humaine, de consacrer toutes ses forces à la recherche et à la promotion du bien commun, de la paix et de l’unité nationale, etc.

Justement à propos d’intérêt général, le golden boy de Ouidah, devenu l’homme fort de Cotonou, a promis dans son discours d’investiture de renforcer la bonne gouvernance et la démocratie au Bénin durant son second mandat. Fortes promesses qui ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd. Le peuple béninois, au nom duquel le président de la Cour constitutionnelle a reçu ce serment devant l’Assemblée nationale, tout comme la communauté internationale seront attentifs aux faits et gestes politiques de Patrice Talon les 5 prochaines années.

Déjà, pendant son premier mandat, il s’est beaucoup parjuré sur sa volonté d’affermir la démocratie dans son pays. Ainsi, l’homme qui promettait de ne faire qu’un mandat à la tête du Bénin, le temps pour lui d’y balayer les scories qui polluent le fonctionnement normal des institutions républicaines, s’est mué en politique autoritaire : les révisions de la Constitution, du code électoral, de la loi sur la liberté d’association ont été des tours de passe-passe pour museler l’opposition et les syndicats et restreindre la liberté d’expression dans un pays réputé jadis être une des vitrines démocratiques de l’Afrique subsaharienne. En lieu et place d’institutions fortes qui auraient permis au Bénin de poursuivre la série d’alternances démocratiques, signe d’une vitalité du multipartisme, le pays vit aujourd’hui une autocratie digne des premières années de sa révolution pseudo marxisme-léninisme (1975-1990). Les opposants les plus en vue sont harcelés, emprisonnés ou en exil comme c’est le cas de Mme Rekya Madougou, de Bio Dramane Tidjani et de Sébastien Adjavon. Tout se passe comme si le balayeur des scories démocratiques, Patrice Talon, qui ne voulait qu’un mandat, s’est épris de la fonction présidentielle au point d’ériger des barricades d’inéligibilité contre ceux qui pourraient lui ravir le fauteuil de chef d’Etat.

De fait, le 11 avril dernier, les principaux opposants n’ayant pas eu la possibilité de se présenter à l’élection présidentielle, Patrice Talon a été réélu dès le premier tour avec 86% des voix. Mais le taux de participation, d’à peine 50%, traduit bien la désaffection de la majorité des Béninois à l’égard de sa politique.

Dès lors, sur sa promesse de renforcer la bonne gouvernance, on peut lui accorder le bénéfice du doute. Quant à celle de mieux enraciner la démocratie, beaucoup de Béninois et d’observateurs de la scène politique béninoise lui rétorqueront que c’est déjà tout vu : cette promesse jure avec la réalité de ses actes.

La Rédaction

 

Dernière modification lelundi, 24 mai 2021 23:56

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