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Rencontre Ouattara/Gbagbo : Au-delà des salamalecs

 

Il n’était pas dit que ces deux là se rencontreraient un jour. Quand le 29 novembre 2011 le vainqueur du scrutin présidentiel, Alassane Ouattara, transférait nuitamment  à La Haye Laurent Gbagbo après quelques mois de détention à Korogho, sans doute se disait-il que son ennemi avait peu de chances de sortir du piège politico-judiciaire qui se refermait sur lui. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous le pont Houphouët.

 

 

Poursuivi pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, l’enfant terrible de Mama, après de longues années de procès et de procédures, a finalement été acquitté en première instance le 15 janvier 2019. Un acquittement confirmé par la Chambre d’appel de la juridiction internationale le 31 mars de la même année, ouvrant la voie au retour du « Woody » sur les bords de la lagune Ebrié. Ce fut chose faite le 17 juin 2021 à l’issue de tractations d’abord souterraines puis au grand jour.

 

Plus de 10 ans après leur dernière rencontre le 25 novembre 2010, date à laquelle ils s’étaient affrontés dans un débat télévisé quelques jours avant le second tour de la présidentielle, voici de nouveau Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo face à face. 40 jours après son retour au bercail, l’ancien prisonnier de Scheveningena en effet été reçu hier au palais présidentiel par le locataire des lieux. « Comment tu vas, Laurent ? Content de te revoir, » a lancé Alassane Ouattara à Laurent Gbagbo en l’accueillant sur le perron du palais présidentiel à Abidjan. Un tête-à-tête qui aura duré une trentaine de minutes. Pour les partisans de Laurent Gbagbo, il s’agissait d’abord d’une visite de courtoisie dans une éthique républicaine.

 

On imagine que le « Woody » n’a pas fait le déplacement juste pour prendre des nouvelles de la famille Ouattara et parler de la pluie et du beau temps avec le maître de céans ! Deux personnalités de cette trempe pouvaient-elles se contenter de salamalecs alors que cette rencontre s’inscrivait avant tout dans le sens de la réconciliation, qui demeure un vœu pieux après la fin de la crise postélectorale ?

 

Laurent Gbagbo a appelé l’actuel chef de l’Etat à libérer les personnes arrêtées pendant la violente crise postélectorale de 2010-2011 qui sont toujours en prison. « J’étais leur chef de file, je suis dehors aujourd’hui  et ils  sont en prison. J’aimerais que le président fasse tout ce qu’il peut pour les libérer », a déclaré Laurent Gbagbo. Pour sa part, Alassane Ouattara a affirmé : « Cette crise a créé des divergences mais cela est derrière nous. Ce qui importe, c’est la Côte d’Ivoire ; c’est la paix pour notre pays ».

 

 Au cours d’un point de presse, ils ont salué tous deux une rencontre « fraternelle » et « détendue ».

 

De ce point de vue donc, l’événement d’hier, qui s’est tenu dans une ambiance très décontractée, est un pas dans la longue marche pour le vivre-ensemble. En acceptant qu’il entre chez lui et en le recevant, ADO se met dans la posture du bon père de famille qui tend la main à tous ses enfants, même à ceux qui sont séparés de lui par une mare de sang et 3 000 morts. Cela dit, les retrouvailles d’hier ont beau être importantissimes, il faut sans doute plus que des actes symboliques pour parvenir à une réconciliation vraie entre Ivoiriens, alors que l’imposante machine ivoirienne a jusque-là broyé les vaincus, qui n’ont pourtant pas été les seuls bourreaux de cette tragédie ivoirienne.

 

Une des questions qui se pose d’ailleurs au moment où Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara se rencontrent est de savoir quel traitement juridique sera réservé à l’ancien président qui, rappelons-le, avait été condamné à 20 ans de prison pour le casse  de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) pendant les événements de 2010-2011.      

 

 

 

D. Evariste Ouédraogo

 

Dernière modification lemercredi, 28 juillet 2021 21:13

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