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L’Afrique et la présidentielle française : Un pis-aller nommé Macron

 

Emmanuel Macron a brisé la petite  malédiction du second mandat qui frappe les présidents en exercice depuis un certain temps. Avant lui, après Jacques Chirac, ni Nicolas Sarkozy,  ni François Hollande n’étaient parvenus à se faire réélire ;  le dernier cité, qui sentait le vent du boulet,  s’étant du reste bien gardé de se représenter en 2017.

 

 

Ce dimanche 24 avril 2022, il a en effet battu de nouveau Marine Le Pen avec 58 % des suffrages exprimés contre 41% à son adversaire. Sans grande  surprise en réalité car sa réélection, le locataire de l’Elysée la doit moins à son bilan somme toute mitigé qu’au front dit républicain contre lequel la candidate du Rassemblement national s’est fracassée. Comme il y a cinq ans face au même Macron et comme son père Jean-Marie il y a vingt ans devant Chirac. La plupart des perdants du premier tour ayant appelé à faire allégeance à  Jupiter ou, à tout le moins, à ne pas voter Marine, le suspense n’était plus vraiment de mise  quoique le scrutin n’était pas joué d’avance. La preuve, même si la passionaria de l’extrême droite, qui ne parvient pas à briser le plafond de verre,  s’est inclinée, elle fait mieux qu’en 2017 quand elle avait engrangé 33 % des voix. Elle progresse donc de huit points et  pour gouverner, le nouveau réélu devra bien tenir compte de  cet  électorat.

 

Marine a perdu et c’est (presque) toute l’Afrique qui pousse un ouf de soulagement dans la mesure où le fonds de son commerce politique se résume à la lutte contre l’immigration, notamment africaine ; les étrangers, particulièrement les Noirs et les Maghrébins étant accusés de tous les péchés de l’Hexagone  et les musulmans suspectés de coloniser insidieusement la  Fille aînée de l’Eglise qui ne se reconnaîtrait plus. Elle a beau être plus subtile que son père,  elle a quand même hérité des gênes puisque  les chiens ne font jamais de chats nonobstant la savante entreprise de dédiabolisation qui ne trompe personne.

 

Pour autant, s’ils peuvent se réjouir du nouvel échec de la porte-étendard du RN, les Africains auraient tort de jubiler car Macron ressemble plus à un pis-aller qu’à autre chose. Sur le plan formel et théorique, son « agenda ambitieux entre l’Afrique et la France » qui devrait être le fil conducteur de sa politique africaine ressemble plus à un catalogue de bonnes intentions et de vœux pieux  sur la  question mémorielle (cas de l’Algérie et du Rwanda), la problématique des investissements et de l’aide publique au développement et, surtout, de la sécurité et de la lutte contre le terrorisme, notamment au Sahel où son intervention militaire est jugée mi- figue mi-raisin.

 

Comment pourrait-on l’oublier, cette présidentielle se tenait alors que  la force Barkhane, lancée en août 2014  à la suite de Serval est contrainte de faire son paquetage au Mali après douze ans de présence « sans  résultats tangibles » selon ses détracteurs dans la mesure où le cancer qui a commencé à ronger le Mali en 2012 s’est depuis métastasé pour gagner le Niger, le Burkina et même  le Golfe de Guinée. Ce qui, au mieux, fait dire à une certaine opinion africaine que malgré son invincible armada,  l’hexagone, au mieux,  est impuissante à éradiquer le fléau, au pire qu’elle est même complice des terroristes et des indépendantistes touaregs pour des desseins inavoués.  Tant et si bien que de plus en plus de voix demandent purement et simplement son départ du Sahélistan quand Barkhane, elle, parle de « réarticulation » de son dispositif.

 

Quid du tout aussi emblématique dossier du franc CFA que Macron et son ami Alassane Ouattara ont transformé en un tour de main en un avorton nommé ECO qui ne règle en rien le problème de l’indépendance monétaire et économique des pays de la zone franc vis-à-vis de l’ancienne métropole ?  Rarement en tout cas l’image de la France en Afrique n’aura été aussi ternie que ces cinq dernières années et l’on se demande bien ce que, au-delà des discours bien ciselés, le rhéteur de l’Elysée  pourra faire pour redorer un tant soit peu ce blason hexagonal.

 

 En un mot comme en mille, pour les Africains, Macron dont ils n’attendent plus grand-chose aura été une grosse désillusion tant et si bien qu’en désespoir de cause, certains, notamment au Sahel en proie depuis une décennie au terrorisme,   sont prêts à s’accrocher à tout et à n’importe quoi, même aux grosses pattes de l’Ours russe, quitte à remplacer un dominateur  et un exploiteur par un autre qui aurait au moins l’avantage de ne pas traîner un lourd passif colonial.

 

 

La Rédaction  

Dernière modification lemardi, 26 avril 2022 00:04

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