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Union africaine/ Tchad : le haut représentant de la discorde

Tempête dans un verre d’eau, avis de brouille diplomatique, quand Mahamat Deby ne s’en laisse pas conter par Mahamat Faki : les caractérisations manquent le moins pour décrire le climat, actuellement tendu, entre la Commission de l’Union africaine (UA) et le Conseil militaire de transition (CMT) qui dirige le Tchad depuis la mort brutale du président-maréchal Deby  le 20 avril dernier.

 

La cause  de ce désamour, la nomination d’Ibrahima Fall par le Conseil paix et sécurité de l’organisation continentale en qualité de haut représentant pour accompagner les autorités du Tchad vers des échéances électorales. « Une nomination cavalière », selon les autorités tchadiennes, qui ne décolèrent pas de n’avoir pas été consultées ni même officiellement informées à ce sujet. Et voilà le diplomate sénégalais qui ronge son frein depuis 3 longues semaines afin d’être reçu à N’Djamena ! Finalement, cet envoyé spécial aura besoin d’un envoyé spécial pour faciliter l’exécution de sa mission.

 

De fait, après que le gouvernement tchadien a opposé « un refus ferme et définitif » à la venue du haut représentant de l’UA à N’Djamena, le Conseil paix et sécurité de l’organisation essaie de sauver les meubles en lui dépêchant un monsieur bons offices, l’ambassadeur du Nigeria à Addis-Abeba. Président du mois courant du Conseil paix et sécurité, le diplomate nigérian arrivera-t-il à gommer  ce  fâcheux malentendu ? Rien n’est moins sûr, selon plusieurs analystes, car non seulement les autorités tchadiennes sont plus qu’agacées d’avoir appris par les réseaux sociaux la nomination d’Ibrahima Fall, en qualité de haut représentant de l’UA au Tchad, mais il se susurre aussi qu’entre Mahamat Idriss Deby, le président du Conseil militaire de transition, et Moussa Faki Mahamat, le président de la Commission de l’UA, il y a des querelles politiques liées à la gestion du Tchad après la disparition brutale du maréchal Deby.

 

Comme quoi, nul n’est prophète dans son pays et le président de la Commission de l’UA, tout tchadien qu’il est, ou justement parce qu’il est tchadien, peine à encourager les nouvelles autorités à prendre résolument la voie d’une sortie de la transition par des élections démocratiques.

 

Véritablement, cette affaire de haut représentant non grata fait plus que gêner aux entournures l’Union africaine et personnellement Moussa Faki. C’est connu, encouragés par la position du président Emmanuel Macron, ni l’une ni l’autre n’avait condamné la prise du pouvoir peu orthodoxe, pour ne pas dire le coup d’Etat du Conseil militaire de transition. De là à dire que Moussa Faki est aujourd’hui payé en monnaie de singe pour sa bienveillante compréhension de la capture du pouvoir d’Etat par le fils après la disparition du père, il y a un pas vite franchi.

 

Et si en définitive cette affaire de haut représentant nommé et rejeté, qui met au jour la discorde entre Mahamat Idriss Deby et Moussa Faki Mahamat, n’est qu’une des prémisses de la déchirure possible entre partisans de feu maréchal-président quand  l’épreuve des urnes s’imposera pour sortir de la période transitoire ?

 

On attend de voir, non sans faire remarquer que cette rivalité entre personnalités tchadiennes éclabousse l’Union africaine dans sa posture de gendarme de la paix, de la sécurité et de la démocratie en Afrique.

 

 

Zéphirin Kpoda

 

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Le président Gbagbo à l’Eglise catholique: «Beaucoup d’Ivoiriens aiment faire la chirurgie de la fourmi»

Une vidéo a circulé sur les réseaux sociaux montrant l’ex-président ivoirien Laurent Gbagbo à la cathédrale Saint- Paul d’Abidjan. Il marquait ainsi son retour dans l’Eglise catholique, ce qui n’a pas manqué de susciter des commentaires. Ceci est la réaction, une sorte d’exégèse, d’un prêtre, le père Marius Hervé Djadji pour ne pas le nommer.

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Prison à vie pour Guillaume Soro: Enterrement politique de première classe

Impitoyable. S’il n’y avait qu’un seul mot pour qualifier cette sentence, ce serait sans doute celui-là.

Hier mercredi 23 juin 2021, le tribunal criminel d’Abidjan a en effet condamné Guillaume Soro à la prison à vie, à l’issue d’un procès qui avait commencé le 19 mai dernier.

L’ancien président de l’Assemblée nationale ivoirienne était poursuivi pour tentative d’atteinte à l’autorité de l’Etat, complot, diffusion de fausses nouvelles et troubles à l’ordre public, en lien avec son retour raté au pays en décembre 2019.

Avec lui, 19 autres personnes comparaissaient dont 14 étaient physiquement présentes sur le banc des accusés, les 6 autres, dont GKS lui-même, ayant été jugées par contumace.

Son avocate et proche collaboratrice, Affoussy Bamba, son ancien chef du protocole, Souleymane Kamagaté, dit «Soul to Soul», son ex-chef de la communication, Moussa Touré ont écopé chacun de 20 ans de prison. Son bras droit Alain Lobognon, et deux de ses frères, Simon et Rigobert Soro, ont, eux, été condamnés à 17 mois.

Outre ces peines, les 20 prévenus doivent payer solidairement 1 milliard de francs CFA de dommages et intérêts. Les juges ont également prononcé la dissolution de Génération et peuples solidaires (GPS), la formation politique dont Soro est le président.

Comme il fallait s’y attendre, les avocats de la défense ont tout de suite indiqué qu’ils feraient appel, pendant que le natif de Kofiplé a, depuis son exil, à travers une déclaration sur sa page Facebook «rejeté ces verdicts iniques, prononcés en dehors de toutes les règles de droit et dictés uniquement par des considérations d’ordre politique».

Sans préjuger de ce qui  se passera en seconde instance, on a bien peur pour Soro que ce soit là le dernier clou planté par la justice sur son cercueil politique. Lui qui avait été déjà condamné en avril 2020 à 20 ans de prison ferme pour recel de deniers publics détournés et blanchiment de capitaux dans l’affaire de la villa de Marcory.

A l’évidence, il faut convenir avec GKS qu’il s’agit de verdicts politiques de procès politiques.

Ses ennuis judiciaires ont curieusement commencé quand il a voulu s’affranchir de la tutelle de son mentor, Alassane Dramane Ouattara, en refusant d’entrer dans les rangs du Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) et en manifestant son ambition présidentielle alors qu’ADO avait déjà jeté son dévolu sur son Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly, finalement décédé le 8 juillet 2020.

Il a été contraint à un exil forcé depuis cette fameuse journée du 23 décembre 2019, où il a dérouté sur Accra l’avion qui le ramenait au bercail après 6 mois passés à l’étranger,  de peur d’être arrêté à sa descente ; son destin n’a cessé depuis de s’assombrir, alors que tout le monde prédisait un avenir radieux à ce jeune homme précoce, et peut-être un peu trop pressé.  L’ancien chef de la puissante Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI), faut-il le rappeler, a été ministre de la Communication à 31 ans, Premier ministre à 35 ans et Patron du Perchoir à 40 ans.

Après avoir pactisé depuis la rébellion de 2002 avec ADO jusqu’à la chute de Laurent Gbagbo en avril 2011 et fait un bout de chemin avec lui dans la gestion du pouvoir, c’est donc désormais un combat à mort entre Alassane Dramane Ouattara et Guillaume Kigbafori Soro. Sans doute ce dernier a-t-il présumé de ses forces, même si on aurait tort de penser qu’il a perdu toutes ses capacités de nuisance.

En tout cas, Laurent Gbagbo doit actuellement rire sous cape en voyant ses principaux tombeurs s’entre-déchirer. Et on peut le comprendre s’il a une sorte de jubilation intérieure.

Ce coup fatal contre Soro intervient en effet  seulement une semaine après que le «Woody de Mama» est rentré à Abidjan après avoir été acquitté par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis pendant le conflit postélectoral de 2010-2011. N’est-ce pas là une étrange ironie du sort?

 

Hugues Richard Sama

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Monnaie unique : L’Eco renvoyé aux calendes ouest-africainesMonnaie unique : L’Eco renvoyé aux calendes ouest-africaines

Les rideaux sont tombés hier en fin de matinée sur le 59e sommet ordinaire des chefs d’Etat de la CEDEAO. A l’ordre du jour de cette rencontre d’Accra, l’examen des questions d’actualité mais aussi des sujets de préoccupation stratégiques pour les pays de la région.

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Laurent Gbagbo : Aujourd’hui c’est aujourd’hui

«Aujourd’hui c’est aujourd’hui» comme on dirait sur les bords de la lagune Ebrié. Trois mois à peine après son acquittement pour crime contre l’humanité par la Cour pénale internationale (CPI), c’est en principe aujourd’hui à 15 h que  l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo rentre à Abidjan, à bord d’un vol ordinaire de la compagnie Brussels Airlines.

10 ans après son transfèrement en catimini à la Haye, c’est un accueil en grande pompe  qui attend «l’enfant terrible de Mama».

Depuis que l’actuel locataire du palais de Cocody, au nom de la réconciliation nationale, a donné son feu vert à la venue de son grand rival, les partisans du «Woody» et les autorités ivoiriennes se sont tiraillés sur les conditions  du retour de celui qui a dirigé le pays entre 2000 et 2011.

Quand ses inconditionnels entendaient lui réserver un «akwaba»  mémorable, les autorités ivoiriennes espéraient un   retour au bercail discret, entre autres, pour des raisons de sécurité et d’ordre public.

Finalement, après moult tractations au sommet, le pouvoir a lâché du lest, Alassane Dramane Ouattara décidant même de mettre à la disposition du comité d’organisation le pavillon présidentiel de l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan. ADO, qui veut mettre tous les Ivoiriens sur la même table,  montre donc sa bonne foi.

Mais il faut néanmoins reconnaître que les inquiétudes de départ soulevées par le pouvoir sont bien réelles.

 Si la journée d’aujourd’hui n’est pas forcément celle de tous les dangers,  elle s’annonce quand même tendue. Au-delà des éventuels débordements,  à ne jamais négliger lorsqu’il y a foule, ce retour dans la ferveur présente des risques pour la sécurité de Laurent Gbagbo lui-même. Il revient en effet  en terre d’Eburnie au moment où le pays est plus que jamais divisé, une partie des tensions se cristallisant autour de sa personne.

Alors qu’à Mama, son village d’origine dans le Centre-Ouest de la Côte d’Ivoire  ou à Yopougon, ce quartier populaire d’Abidjan acquis à sa cause, ses partisans ont commencé à danser, pour ne pas dire à «gâter le coin»,  depuis quelques jours déjà,  les associations de victimes de la crise postélecorale de 2010-2011 qui a fait, en rappel, 3000 tués voient d’un mauvais œil ce retour. Certains n‘hésitent  pas à demander que le héros du jour dès qu’il foule le sol ivoirien soit conduit directement à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA) ou, à défaut, mis en résidence surveillée pour sa condamnation par contumace à 20 ans de prison dans l’affaire dite du casse de la BCEAO. De fait, même s’il a été blanchi par la CPI, cette peine reste pendante sur la tête du champion du Front populaire ivoirien (FPI). Le président Ouattara n’a toujours pas annoncé s’il comptait gracier ou pas son prédécesseur. Et on imagine que c’est un joker qu’ADO garde entre ses mains, attendant le moment opportun. De sa décision dépendra sans doute la suite pour  Laurent  Gbagbo.

Que va-t-il faire maintenant qu’il a retrouvé les siens? Telle est la question qu’on peut légitimement se poser au moment où la Côte d’Ivoire, qui subit désormais le feu terroriste, a plus que jamais besoin de l’union sacrée de ses filles et de ses fils. LG gagnerait a ne pas se remettre toute de suite dans la politique politicienne et à jouer lui aussi la mélodie de la réconciliation nationale. Lui, tout comme les autres crocodiles du marigot  ivoirien, ADO et Henri Konan Bédié notamment, ont là une occasion en or d’acheter une nouvelle conscience après avoir troublé pendant des années les eaux de la lagune Ebrié par leurs querelles intestines.

 

Hugues Richard Sama

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Laurent Gbagbo : Transfèrement en catimini, retour par le pavillon présidentiel

 

Ils ont fini donc par s’entendre. Depuis que le président Laurent Gbagbo et son ex-ministre de la Jeunesse, Charles Blé Goudé, ont été définitivement acquittés par la Cour pénale internationale (CPI) et que le chef de l’Etat, Alassane Ouattara, a annoncé que les deux anciens détenus de la Haye étaient libres de rentrer au bercail, les partisans du « Woody » et les autorités ivoiriennes s’écharpaient à n’en pas finir.

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