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Vœux du nouvel An de Faure Gnassingbé : Du suspense pour rien

Coup de com ou attentisme d’un pouvoir aux abois ? Le président Faure Gnassingbé aura attendu plus que d’ordinaire pour délivrer son message du nouvel an aux Togolais. Alors que la plupart de ses pairs ont sacrifié à la sacro-sainte tradition de la présentation des vœux à leurs administrés dans la nuit du 31 décembre, Gnassingbé a attendu trois jours de plus pour le faire : c’est en effet le 3 janvier au soir qu’il s’est adressé à ses compatriotes. Si ce décalage fait partie d’un calcul de ses stratèges en communication pour capter l’opinion togolaise, celle régionale et internationale, il faut dire que c’est un coup bien réussi. L’attente a fait monter le suspense et bien des observateurs, après les flonflons de la Saint-Sylvestre et du 1er janvier, étaient tout ouïe à l’allocution espérée de Faure Gnassingbé. L’attente fut longue, les espoirs grands pour peu de chose.

 

Le discours à l’occasion du nouvel an de Faure Gnassingbé n’a pas volé haut en audace politique pour sortir le Togo de la crise dans laquelle il se débat depuis bientôt cinq mois. En digne successeur de son père, Faure a fait dans le dilatoire d’un disque rayé : celui de « la vertu du dialogue ». Espère-t-il, pour faire passer son idée de référendum, une démobilisation des Togolais partisans de l’opposition qui est vent debout depuis plus de quatre mois ? Pourtant les Jean Pierre Fabre, Tikpi Salifou Atchadam et Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson étaient revenus d’Accra, une semaine plus tôt, gonflés à bloc par le fait que la CEDEAO était consciente de la gravité de la situation togolaise et en redoutait les conséquences d’une plus grande dégradation. Dans la foulée, ils avaient réussi une grande mobilisation de leurs partisans pour insister sur le fait qu’ils attendaient les bons offices de l’organisation régionale tout en réitérant leur refus d’un dialogue où le pouvoir togolais serait juge et partie.

Faure Gnassingbé a-t-il entendu ce message de son opposition ? Il faut croire que non puisqu’il n’a pas attendu que le médiateur désigné par la CEDEAO, le président Nana Akufo Addo du Ghana, communique les résultats de ses entretiens avec l’opposition togolaise pour s’entêter, dans sa fuite en avant, à organiser un référendum, non consensuel. Si on peut comprendre sa volonté d’avoir l’initiative dans la gestion de la crise, on saisit moins bien les tenants et les aboutissants de cette stratégie de la carotte et du bâton – proposition de dialogue, dure répression des manifestations de l’opposition et proposition unilatérale de référendum - qu’il met en œuvre depuis bientôt cinq mois.

Il est vrai que l’opposition ne lui rend pas la tâche facile en s’agrippant bec et oncles à un retour à la Constitution de 1992, donc à une démission, hic et nunc, du président Faure. Réponse du berger à la bergère, oui à une réforme constitutionnelle qui rétablirait la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux et le scrutin uninominal à deux tours, mais non à la rétroactivité de cette loi fondamentale si elle venait à être adoptée. Rétroactivité ou pas de la loi fondamentale, c’est le nœud gordien de la crise togolaise. Qui saura le dénouer aura la solution pour sortir le pays de cette situation de ni paix ni guerre qui plombe son économie depuis la mi-septembre 2017.

En tout cas Faure Gnassingbé, dans ses vœux du nouvel an, n’a pas laissé entrevoir que la ligne de démarcation entre lui et son opposition a bougé d’un pouce. La crise demeure donc en l’état et le jusqu’au-boutisme des protagonistes n’annonce pas de bonnes nouvelles pour 2018.

 

Zéphirin Kpoda 

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