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Lutte contre Boko Haram : La bataille de Gamboru aura lieu

Ils ont donc franchi la frontière. Les soldats tchadiens, qui étaient jusque-là stationnés à Fotokol en territoire camerounais, ont en effet engagé hier dans la matinée une opération terrestre qui leur a permis d’entrer à Gamboru au Nigeria, en vertu d’un accord avec Abuja sur le droit de poursuite. L’intervention au sol dans cette ville vidée de sa population depuis sa prise il y a un an par Boko Haram fait suite à des bombardements des armées tchadiennes et camerounaises qui ont, pour ainsi dire, déblayé le terrain pour les fantassins. Reste maintenant à déloger la secte islamiste de cette localité, l’objectif à terme étant de reprendre la base militaire de Baga qui était tombée dans son escarcelle début janvier, confortant de ce fait les positions et les visées expansionnistes de la pieuvre qui ne cesse d’étendre ses tentacules au Nigeria et dans les pays voisins, menacés, eux aussi, de déstabilisation.

 

La bataille de Gamboru, dans laquelle sont engagés quelque 2000 soldats d’Idriss Déby Itno, aura donc lieu. Du coup, après Maiduguri, la capitale de l’Etat de Borno dans le nord-est, Ndjaména se retrouve sur deux fronts et a plus que jamais les deux pieds dans le bourbier nigérian où beaucoup de gens n’aimeraient pourtant pas s’aventurer.

Comment ne pas s’incliner devant cet investissement qui témoigne si besoin en était encore de l’expertise militaire tchadienne éprouvée par les longues années de guerre civile que le pays de François Tombalbaye a connue. Et dont on a déjà pris toute la mesure au Nord-Mali où, avec les militaires tricolores, les « déby boys », comme certains les appellent, étaient parmi les plus vaillants.

Cela dit, ce n’est pas uniquement par charité chrétienne, ou islamique si vous préférez, que le Tchad entreprend cette nouvelle équipée militaire en dehors de ses frontières. Elle répond aussi à des préoccupations économiques, puisque Ndjaména dépend du port de Douala pour ses importation/exportations, sans oublier le port de Kriby par où passe son pétrole. Tout ce dont il n’a pas besoin, c’est que le Cameroun soit à son tour déstabilisé par les djihadistes du « chacal » ainsi qu’on surnomme Abubakar Shekau, le gourou de la secte. Sur le plan régional également, ça conforte le statut de puissance militaire du Tchad qui est devenu depuis quelques années un interlocuteur incontournable malgré la démocratie à dose homéopathique que distille le général Déby dont les ambitions monarchiques sont servies par ces considérations sécuritaires. Un peu à l’image d’un Blaise Compaoré qui était considéré comme un maillon indispensable de la chaîne sécuritaire en Afrique de l’Ouest ; au point que ses thuriféraires en avaient fait un argument de vente du tripatouillage de l’article 37. Mais la «plaque tectonique Compaoré» a fini par bouger sans que, jusqu’à preuve de contraire, le séisme tant redouté ne survienne.

Mais bon, on ne va pas décourager les bonnes volontés, et si l’appui du Tchad, en attendant d’autres forces africaines, peut permettre de tuer le monstre, c’est tant mieux, même si, ce faisant, celui-ci met un peu la honte à ce géant aux pieds d’argile qui finit par nous désespérer. Une sagesse africaine le dit bien, «quand la chèvre en vient à mordre l’étranger, il n’y a pas pire humiliation pour le chien de la maison».

Pourvu seulement que Goodluck Jonathan, qui vient d’échapper à un attentat dimanche dernier, se réveille enfin, lui qui ne semble plus préoccupé que par sa réélection à dix jours de la présidentielle alors que son mandat aura surtout servi à montrer toute l’étendue de son incapacité à vaincre le fléau salafiste.

 

Ousséni Ilboudo

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