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Visite Erdogan : Un sultan à la conquête de l’Afrique

 

Après l’Algérie, la Mauritanie, le Sénégal, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, est attendu aujourd’hui à Bamako au Mali. L’homme fort d’Ankara va ainsi boucler 05 jours de visite en Afrique où il a choisi d’effectuer son premier voyage officiel de l’année 2018. C’est du reste par 03 pays du continent, le Soudan, le Tchad et la Tunisie, qu’Erdogan avait terminé ses déplacements présidentiels hors de Turquie en décembre 2017. Plus en amont, depuis que l’homme était Premier ministre de son pays (2005- 2014), on recense une vingtaine de séjours avec autant de pays qui l’ont reçu sur le continent.  De l’Algérie à l’Afrique du Sud, il connaît donc bien l’Afrique. Mais qu’est-ce qui fait donc courir la Turquie et Erdogan vers l’Afrique ?

 

 

Officiellement la volonté de diversifier ses relations économiques et commerciales avec le continent dans une ambition de renouer des liens présumés affectifs et historiques. Cette ambition s’est manifestée fortement au début des années 2000 quand il était devenu évident que la Turquie n’intégrerait pas  l’Union européenne alors que ses aspirations  d’hégémonie au  Proche-Orient étaient fortement contrecarrées par les relations privilégiées entre Israël et l’Egypte d’une part, et entre la Syrie et l’Iran d’autre part, sans oublier les prétentions  de l’Arabie Saoudite.

Les portes de l’Union européenne lui étant fermées, le Proche-Orient compliqué et instable, Erdogan s’est souvenu que l’Afrique n’est pas si éloignée que cela de la Turquie qui plus est, ce continent a entretenu des rapports commerciaux florissants avec  l’ex-empire ottoman. Voilà donc Erdogan, en Sultan du XXIe siècle, à la conquête des territoires perdus par une Turquie nostalgique de son passé. Et si l’homme ne rêve pas de reconstruire l’empire ottoman, il ne veut pas d’une Turquie qui souffrirait de sa situation géographique, à la fois, appendice de l’Occident et de l’Orient.

 

Son offensive diplomatique, économique et commerciale en Afrique relève d’une volonté de concurrencer l’Europe sur un continent historiquement réputé la chasse gardée de cette dernière. C’est ainsi que 2005 fut proclamé « l’année de l’Afrique » par la Turquie et Erdogan d’expliquer : « Bien que notre histoire avec le continent remonte à plus d’un millier d’années, nous avons négligé l’Afrique au siècle dernier. Nous n’avons pas eu l’opportunité de nous ouvrir au continent parce que nous étions occupés à résoudre nos problèmes internes. » Ces problèmes internes sont-ils aujourd’hui totalement résolus ?

Pas si sûr que cela quand on connaît la chape de plomb qu’Erdogan fait peser sur son pays où l’opposition, les intellectuels, les médias et surtout les nationalistes kurdes sont surveillés comme du lait sur le feu et emprisonnés à la moindre peccadille. Alors question : faut-il fermer les yeux sur les dénis en matière des droits de l’homme de la Turquie d’Erdogan pour commercer avec elle les yeux fermés ?

Par ailleurs, quand on sait la pression ouverte et sans la manière exercée par le gouvernement d’Ankara pour que les pays africains qui ont des relations avec lui ferment les écoles de Fethullah Gülen, réputé être le commanditaire du putsch avorté de juillet 2016, on devine aisément  que la cordialité, le respect mutuel dans un partenariat équitable  n’est pas toujours au rendez-vous dans ces relations turco-africaines.

 

Qu’importe, sous l’impulsion d’Erdogan le Terrible, la Turquie a conquis des parts importantes de marchés en Afrique, faisant ainsi passer les échanges commerciaux entre son pays et le continent de 3 à 20 milliards de dollars entre 2000 et 2017 avec  une ambition d’atteindre 100 milliards d’ici 5 ans . On attend de voir non sans émettre le vœu que les difficultés économiques que connaissent nos pays ne soient pas un prétexte pour gober n’importe quel accord de coopération ou traité d’amitié, même avec des fossoyeurs des libertés démocratiques.

 

 

Zéphirin Kpoda

 

 

 

Dernière modification levendredi, 02 mars 2018 14:31

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