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De Jo’burg : Katoumbi sort la grand-voile

 

C’est parti pour les grandes manœuvres et alliances politiques en République démocratique du Congo (RDC) pour des élections générales à deux grandes inconnues.

 

Deux inconnues parce qu’on ne sait pas si la date de décembre 2018 sera enfin la bonne pour la tenue de la présidentielle, le scrutin majeur, encore moins si l’actuel président, Joseph Kabila, qui a terminé ses deux mandats constitutionnels, sera malgré tout candidat à sa propre succession.

 

 

En attendant que le locataire du palais de la Nation dissipe ou pas les forts soupçons qui pèsent sur ses intentions, l’opposition, elle, fourbit ses armes pour deux combats. Le premier, évidemment, c’est d’empêcher que Kabila fils, qui use depuis de subterfuges pour s’accrocher au pouvoir, puisse prendre part à la prochaine présidentielle.

 

Et pour ce combat, la mère de toutes les batailles, les opposants bénéficient du soutien d’une bonne partie de la société civile et, surtout, de la bénédiction de l’Eglise catholique, qui a déjà payé au prix fort son refus de voir « Mobutu light » tordre de nouveau le cou à la loi fondamentale. En effet, les manifestations des catholiques qui ont débuté le 31 décembre 2017 ont été réprimées dans le sang, une répression qui a coûté la vie à au moins quinze personnes.

 

Le second combat des « anti-Kabila », c’est de se préparer à imposer l’alternance en décembre 2018. Le ton vient d’être donné hier lundi 12 mars 2018 à Johannesburg où l’opposant Moïse Katumbi a été désigné candidat d’un nouveau mouvement politique baptisé « Ensemble pour le changement ». Ce nouveau-né de la politique congolaise, qui n’entend pas faire de la figuration, est essentiellement porté par le G7, un regroupement de sept partis politiques, l’Alternance et quinze petites formations politiques.

 

Dans sa brève allocution qui fait déjà le buzz sur les réseaux sociaux  en RDC, le porte-drapeau de cette alliance a décliné son programme de société et s’est engagé à mobiliser cent milliards de dollars pour relever le pays qui concentre tous les maux qui minent le continent africain. Reste à savoir si l’ancien gouverneur du Katanga, qui vit aujourd’hui en exile en Afrique du Sud, pourra battre campagne et participer au scrutin, car on sait qu’il a été condamné en juin 2016 à 36 mois de prison dans une affaire immobilière. Il a toujours crié son innocence, accusant le pouvoir d’instrumentaliser la justice pour se débarrasser d’un opposant sérieux. Le patron du tout-puissant Mazembe semble en tout cas toujours croire à son rêve présidentiel en mettant hier la grand-voile depuis son exil de Jo’burg.

 

S’il faut saluer la naissance d’ « Ensemble pour le changement », dont Katumbi est le champion, on ne peut s’empêcher de s’inquiéter de ce qui pourrait constituer un émiettement de l’opposition à quelques mois des élections générales.

 

En effet, le principal parti d’opposition, l’UDPS (Union pour la démocratie et le progrès social), qui n’est pas membre de ce nouveau mouvement, entend bien présenter son candidat dont le nom sera connu lors de son prochain congrès, prévu dans quelques semaines. Sauf tremblement de terre, c’est un autre fils du père, Félix Tshisekedi, rejeton de feu Etienne Tshisekedi, décédé le 1er février 2017, qui sera investi porte-étendard de l’UDPS.

 

De son côté, le vibrionnant Vital Kamerhe de l’UNC (Union pour la nation congolaise) joue des pieds et des mains pour nouer une alliance avec le MLC (Mouvement de libération du Congo), lequel regarde le PALU (Parti lumumbiste unifié) d’Antoine Gizenga avec des yeux de Chimène.

 

L’opposition aborde donc pour l’heure l’échéance de décembre prochain avec trois têtes de gondoles sans qu’on sache si d’autres ne viendront pas augmenter le nombre de prétendants au fauteuil présidentiel.

 

Dans l’absolu, cette diversité d’adversaires du « petit Kabila » n’est pas, en soi, une mauvaise tactique mais quand on la rapporte au système électoral congolais, on se demande si les pourfendeurs du régime ne sont pas en train de savonner eux-mêmes leur planche.

 

Ne l’oublions pas en effet, la présidentielle se joue ici au scrutin direct majoritaire à un seul tour. Ce qui veut dire qu’il suffit d’obtenir la majorité relative pour emporter haut la main la course au palais de la Nation.

 

Et les précédents gabonais, avec Ali Bongo, et togolais, avec Faure Gnassingbé, ont montré que ce type de scrutin bénéficiait toujours, en tout cas en Afrique, au président sortant. Joseph Kabila a lui-même été élu à la dernière élection avec seulement 48,9% des voix.

 

Il faut donc espérer que d’autres manœuvres verront le jour du côté de l’opposition pour resserrer les rangs contre un ennemi politique commun qui n’attend qu’une éventuelle dispersion de ses adversaires pour rempiler un autre mandat.

 

 

 

Hugues Richard Sama

 

Dernière modification lemardi, 13 mars 2018 21:50

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