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Laurent Gbagbo : Aujourd’hui c’est aujourd’hui

«Aujourd’hui c’est aujourd’hui» comme on dirait sur les bords de la lagune Ebrié. Trois mois à peine après son acquittement pour crime contre l’humanité par la Cour pénale internationale (CPI), c’est en principe aujourd’hui à 15 h que  l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo rentre à Abidjan, à bord d’un vol ordinaire de la compagnie Brussels Airlines.

10 ans après son transfèrement en catimini à la Haye, c’est un accueil en grande pompe  qui attend «l’enfant terrible de Mama».

Depuis que l’actuel locataire du palais de Cocody, au nom de la réconciliation nationale, a donné son feu vert à la venue de son grand rival, les partisans du «Woody» et les autorités ivoiriennes se sont tiraillés sur les conditions  du retour de celui qui a dirigé le pays entre 2000 et 2011.

Quand ses inconditionnels entendaient lui réserver un «akwaba»  mémorable, les autorités ivoiriennes espéraient un   retour au bercail discret, entre autres, pour des raisons de sécurité et d’ordre public.

Finalement, après moult tractations au sommet, le pouvoir a lâché du lest, Alassane Dramane Ouattara décidant même de mettre à la disposition du comité d’organisation le pavillon présidentiel de l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan. ADO, qui veut mettre tous les Ivoiriens sur la même table,  montre donc sa bonne foi.

Mais il faut néanmoins reconnaître que les inquiétudes de départ soulevées par le pouvoir sont bien réelles.

 Si la journée d’aujourd’hui n’est pas forcément celle de tous les dangers,  elle s’annonce quand même tendue. Au-delà des éventuels débordements,  à ne jamais négliger lorsqu’il y a foule, ce retour dans la ferveur présente des risques pour la sécurité de Laurent Gbagbo lui-même. Il revient en effet  en terre d’Eburnie au moment où le pays est plus que jamais divisé, une partie des tensions se cristallisant autour de sa personne.

Alors qu’à Mama, son village d’origine dans le Centre-Ouest de la Côte d’Ivoire  ou à Yopougon, ce quartier populaire d’Abidjan acquis à sa cause, ses partisans ont commencé à danser, pour ne pas dire à «gâter le coin»,  depuis quelques jours déjà,  les associations de victimes de la crise postélecorale de 2010-2011 qui a fait, en rappel, 3000 tués voient d’un mauvais œil ce retour. Certains n‘hésitent  pas à demander que le héros du jour dès qu’il foule le sol ivoirien soit conduit directement à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA) ou, à défaut, mis en résidence surveillée pour sa condamnation par contumace à 20 ans de prison dans l’affaire dite du casse de la BCEAO. De fait, même s’il a été blanchi par la CPI, cette peine reste pendante sur la tête du champion du Front populaire ivoirien (FPI). Le président Ouattara n’a toujours pas annoncé s’il comptait gracier ou pas son prédécesseur. Et on imagine que c’est un joker qu’ADO garde entre ses mains, attendant le moment opportun. De sa décision dépendra sans doute la suite pour  Laurent  Gbagbo.

Que va-t-il faire maintenant qu’il a retrouvé les siens? Telle est la question qu’on peut légitimement se poser au moment où la Côte d’Ivoire, qui subit désormais le feu terroriste, a plus que jamais besoin de l’union sacrée de ses filles et de ses fils. LG gagnerait a ne pas se remettre toute de suite dans la politique politicienne et à jouer lui aussi la mélodie de la réconciliation nationale. Lui, tout comme les autres crocodiles du marigot  ivoirien, ADO et Henri Konan Bédié notamment, ont là une occasion en or d’acheter une nouvelle conscience après avoir troublé pendant des années les eaux de la lagune Ebrié par leurs querelles intestines.

 

Hugues Richard Sama

Dernière modification lejeudi, 17 juin 2021 22:27

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