Récusation du Sao Naaba par l’opposition politique: « Si on ne le remplace pas, nos commissaires ne siégeront pas à la CENI » (Alain Zoubga, membre du CFOP)
- Écrit par Webmaster Obs
Le cadre de concertation de l’institution Chef de file de l’opposition politique (CFOP) a donné une conférence de presse le 14 juillet 2021 à son siège, à Ouagadougou, à l’effet de se prononcer sur sa récusation de Bonaventure Dimsongdo Ouédraogo comme commissaire à la Commission électorale nationale indépendante (CENI) au titre de la société civile. Le jugeant « trop marqué MPP », l’opposition a demandé à la structure d’origine du Sao Naaba, la personne contestée, de lui trouver un remplaçant sinon ses commissaires ne siégeront pas dans cet organe chargé de l’organisation des élections au Burkina.
L’opposition politique burkinabè au détour d’une rencontre avec la presse, a dit prendre acte du report de la date de désignation du président et des vice-présidents de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) à aujourd’hui, 15 juillet 2021. Mais avec cette sortie, on se demande si ces élections auront lieu. En effet, celui qui est pressenti pour être à la tête de cet organe durant les cinq prochaines années ne rencontre pas l’assentiment d’Eddie Komboïgo et de ses camarades du CFOP. Le Sao Naaba, Bonaventure Dimsongdo Ouédraogo à l’état civil, puisque c’est de lui qu’il s’agit, a fait preuve d’engagement politique avéré en faveur des candidats du parti au pouvoir au cours de la récente consultation électorale, selon le Dr Alain Zoubga. Pour le président de L’Autre Burkina/ PSR et les autres responsables de l’opposition, accepter cette personne au sein de l’organe tripartite (5 de la majorité, 5 de l’opposition et 5 de la société civile) créera un déséquilibre qui profitera à la composante politique et plus exactement à la majorité présidentielle. Alors que le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, Clément P. Sawadogo, un jour plus tôt, a affirmé que « rien n’empêche le Sao Naaba de sièger » à la lumière des textes régissant l’institution, l’opposition martèle qu’elle ne saurait cautionner la présence d’une personnalité politiquement engagée et manifestement partisane. Selon ses explications, cela remettra en cause les principes d’indépendance et d’impartialité de cette structure, pourtant acquis de « haute lutte » et consacrés par des instruments législatifs nationaux et internationaux. « Tout autre représentant de la société civile reconnu engagé et manifestement partisan choisi parmi les cinq membres sera récusé comme monsieur Bonaventure Dimsongdo Ouédraogo », a prévenu le Dr Alain Zoubga. Appelant à la mise en place d’une CENI consensuelle et impartiale, l’opposition a invité la chefferie coutumière à reconsidérer la désignation du Sao Naaba en vue de préserver la neutralité et l’impartialité de la société civile. En d’autres termes, elle demande le remplacement de celui-ci, sinon « les commissaires de la composante opposition politique ne siégeront pas à la CENI », a averti celui qui a lu la déclaration liminaire qui, auparavant, a mis en garde le gouvernement contre une mise en place au forceps d’une administration électorale qui n’obéirait pas à ses principes fondamentaux. Mieux ou pire, celle-ci serait susceptible de créer une crise institutionnelle, donc d’être source de menaces de la stabilité et de la paix nationale.
La voie judiciaire ?
Les conférenciers, tout en déplorant ce qu’ils ont qualifié de « différentes manœuvres de diabolisation » des actes républicains du CFOP orchestrés par le MPP et ses alliés, ont exhorté le parti majoritaire et ses soutiens à faire preuve de responsabilité afin de ne pas détériorer le climat social et politique. Ils ont fini par renouveler leur volonté d’œuvrer, pour ce qui les concerne, à consolider l’ancrage démocratique, la préservation de la paix et la concorde nationale. « Est-ce que vous ne craignez pas d’avoir contre vous toute la communauté coutumière, surtout quand on sait que politiquement lorsque ça ne va pas, c’est vers ces personnes-ressources qu’on se tourne ?» a interrogé un de nos confrères. Et le principal orateur du jour de répondre : « Je voudrais vous assurer que nous n’avons pas une démarche contre les autorités coutumières. Seulement, le bon candidat selon les critères n’y est pas. Je peux, du reste, vous informer que nous avons pris l’engagement solennel avec la chefferie coutumière de voter pour son candidat à la présidence de la CENI. Ils le savent déjà, nous sommes avec eux et les soutenons mais ce candidat-là, monsieur Ouédraogo, ne répond pas aux bons critères pour être un commissaire, encore moins un président ». Une autre question a été relative à cette autre récusation par un mouvement de la société civile d’un représentant d’une composition politique ; récusation de la personne du commissaire reconduit, Tasséré Savadogo de l’Alliance pour la démocratie et la Fédération/ Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA). « Ils disent que monsieur Tasséré fait preuve d’activisme politique, donc ne saurait être retenu comme membre de la CENI. Mais il est à la CENI à quel titre ? C’est au titre d’une composante politique. C’est donc une aberration de comprendre ou de faire croire qu’une composante politique puisse envoyer à la CENI des éléments non politiques, c’est exactement l’inverse de notre récusation où une société civile envoie un politique pour la représenter », a argumenté Achille Tapsoba, un cacique du CDP. Le président de ce parti, Eddie Komboïgo, lui, martèlera que l’opposition, sous sa houlette, ne saisira jamais les tribunaux contre les « bonnets rouges ».
Aboubacar Dermé