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Diabète et hypertension chez l’homme : «Ces maladies évoluent, à coup sûr, vers une dysfonction érectile» (Dr Aristide Kaboré, urologue andrologue)

 

Cent millions de rapports sexuels, excusez du peu, ont lieu par jour dans le monde. Mais combien sont satisfaisants ? Pas tous en tout cas. Selon des études, en effet, 1/3 des hommes vont faire l’expérience d’une dysfonction érectile après 40 ans : il s’agit notamment des diabétiques (69%) et des malades de pathologies cardiovasculaires (40%). Dans cette interview réalisée le mardi 7 août 2018, à son bureau de l’hôpital Yalgado, le Dr Aristide Kaboré, urologue andrologue, chef du service Urologie, explique les différents mécanismes pouvant aboutir à une dysfonction érectile en cas de diabète et d’hypertension artérielle (HTA), non sans prescrire de traitements contre. 

    

Le diabète, l’hypertension artérielle (HTA) et les dysfonctions érectiles sont, selon le Dr Aristide Kaboré, chef du service Urologie de l’hôpital Yalgado, trois pathologies qui partagent une origine commune, à savoir les vaisseaux. Tout comme le diabète, a-t-il relevé, l’HTA va entraîner des altérations de la vascularisation. La dysfonction érectile va alors être la conséquence de ces altérations.

 

La vascularisation, a-t-il expliqué, c’est le processus par lequel le sang arrive dans les organes et en ressort pour être épuré au niveau des poumons et des différents organes. Elle concerne des vaisseaux que sont les artères et les veines. Les artères sont chargées d’apporter le sang oxygéné, riche en nutriments, aux tissus et les veines, elles, de ramener le sang contenant les déchets au niveau du poumon et des organes.  Qu’est-ce qui entraîne alors la dysfonction érectile ?    

 

A en croire le Dr Kaboré, en cas d’HTA, deux mécanismes vont aboutir à des dysfonctions érectiles : le premier, a-t-il indiqué, c’est le problème vasculaire. «Comme vous le savez, une des causes de l’HTA est la surcharge pondérale des vaisseaux. Donc l’obésité, l’âge, la sédentarité, le tabagisme, qui sont des facteurs de risque de l’HTA, vont aussi être facteurs de risque de la dysfonction érectile ».

 

L’érection, a expliqué l’urologue, est un processus purement vasculaire : «Le sang va parvenir aux structures  (au niveau du pénis) qu’on appelle des corps caverneux qui s’en rempliront. Et ce sang va être bloqué dans les corps caverneux, par une fermeture des veines. C’est ça qui va entraîner la rigidité du pénis pour permettre le rapport sexuel. Donc si vous avez une altération de l’artère, comme c’est le cas dans l’HTA, vous allez avoir une diminution de la capacité à avoir une érection» ;

 

le deuxième mécanisme, toujours selon le Dr Kaboré, ce sont les médicaments qu’on utilise pour traiter l’HTA. «On entre ainsi dans un cercle vicieux, la maladie en elle-même peut entraîner une dysfonction érectile et les différents médicaments qu’on utilise pour combattre la maladie peuvent aussi entraîner la dysfonction ».

 

Dans le cas du diabète, a fait savoir celui-là qui est aussi enseignant à l’Université Ouaga I Pr Joseph Ki-Zerbo, le mécanisme est beaucoup plus complexe, car le diabète peut agir de plusieurs façons : dans la première, qui se passe toujours au niveau vasculaire, le diabète va entraîner une angiopathie diabétique (des anomalies au niveau des vaisseaux) qui va occasionner la dysfonction érectile.

 

A cela s’ajoutent d’autres mécanismes, beaucoup plus complexes, comme l’inflammation et le stress oxydatif qui vont entraîner des dysfonctionnements de l’appareil d’érection.

 

 

 

Un tiers des patients en urologie ont des dysfonctions érectiles

 

 

 

Même si, au Burkina, il n’y a pas de chiffres clairs dessus, à en croire le Dr Kaboré, les dysfonctions érectiles prennent de l’ampleur : « Selon les études, les publications et les consultations au service d’urologie, on est à 1/3 de patients qui ont des dysfonctions érectiles. Mais il serait bien d’avoir des études étendues à la population générale pour en savoir l’ampleur réelle », a-t-il confié.  

 

Comment se pose le diagnostic  d’une telle pathologie ? vous demandez-vous. Il y a plusieurs procédés pour diagnostiquer ce mal, à en croire le patron du service Urologie de Yalgado :

 

« La première manière et la plus simple provient du patient qui va faire cas de sa difficulté à avoir une érection. Mais nous, on ne va pas se contenter de ce qu’il dit. On va l’interroger sur, entre autres aspects, sa vie sexuelle, sa libido, ses envies, ses partenaires, l’atmosphère au niveau du couple, du travail et de la famille.

 

En plus de cela, il y a des outils dont nous disposons pour évaluer et savoir s’il y a oui ou non des dysfonctions érectiles. L’outil le plus utilisé à cet effet est l’index international sur la fonction érectile dont la version la plus courte comporte cinq ou six questions, que l’on pose au malade sur un formulaire que celui-ci doit remplir. Les réponses à ces questions permettent de détecter les personnes atteintes de dysfonctions érectiles. La troisième manière, c’est de procéder à des tests organiques qui sont des tests objectifs. Cela consiste en des injections de produits directement au niveau du pénis qui entraînent l’érection s’il y en a», a-t-il énuméré.

 

 

 

L’érection est la sentinelle du cœur

 

 

 

Des traitements existent, fort heureusement. Ils vont de la psychothérapie à la chirurgie, a assuré le Dr Kaboré.

 

La psychothérapie, a-t-il indiqué, c’est le simple fait de discuter avec le patient et de le rassurer. « Cet entretien peut déjà permettre de régler le problème, surtout lorsque l’érection n’est pas liée à des anomalies comme la tension, le diabète ou l’hypertension artérielle. En effet, il y a des dysfonctionnements érectiles qui sont purement liés au psychique : par exemple, suite à un conflit de couple ou à un stress important au travail. Et dans ces cas de figure, l’accompagnement psychologique du patient, la discussion qu’on peut avoir avec lui suffisent parfois à résoudre le problème sans recours à des médicaments», a assuré le médecin.

 

Il y a également l’utilisation de médicaments qui favorisent l’érection, a-t-il ajouté avant de relever : «Dans le cas extrême où tous ces traitements ne marchent pas, on peut être amené à faire de la chirurgie. Mais cette chirurgie est invasive et consiste à mettre en place des prothèses d’érection au niveau du pénis avec un mécanisme d’actionnement lorsque le patient a besoin d’acte sexuel ».

 

Cette interventionpeutêtre réaliséeau Burkina, mais, a vite fait de relever le Dr Kaboré, elle est très coûteuse.

 

Pour donc éviter d’arriver à cette situation extrême, l’urologue andrologue a bien voulu prodiguer des conseils aux malades du diabète et de l’HTA, à appliquer rigoureusement.  

«La première des choses, c’est de respecter les traitements. Il faut absolument équilibrer le diabète et l’hypertension lorsqu’ils existent parce qu’à coup sûr, ces anomalies vont évoluer vers les dysfonctions érectiles. Mieux, lorsque les problèmes d’érection existent, c’est parfois un signe important de la gravité de l’hypertension ou du diabète. Cela veut dire que chez un patient qui vient en consultation pour une dysfonction érectile qui n’est pas connue comme étant diabétique ou hypertendu, on va systématiquement rechercher les symptômes du diabète ou de l’HTA. Ces patients-là sont des personnes qui vont avoir plus de risques que les autres à développer les complications de leur diabète ou de leur hypertension. Nous disons que l’érection est la sentinelle du cœur, pour dire que devant toute personne qui a des problèmes d’érection, on doit aussi rechercher des facteurs de risques de diabète et d’hypertension artérielle.

 

Alima Séogo née Koanda

 

Tél. : 79 55 55 51

 

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