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Chirurgie réparatrice et intime : Pour retrouver la plénitude de ses sensations

 

Si au Burkina Faso certaines femmes peuvent de nouveau toucher leur clitoris et jouir de ses avantages, c’est grâce au professeur titulaire de gynécologie obstétrique Charlemagne Ouédraogo. En effet, c’est cet ancien interne des hôpitaux de Ouagadougou qui a introduit, avec un de ses confrères, la reconstruction du clitoris dans le pays. Ainsi, depuis 2006, une campagne gratuite de chirurgie réparatrice et intime est organisée pendant le mois de mars, période à laquelle est aussi célébrée la Journée internationale de la tolérance zéro aux MGF (mutilations génitales féminines). Cette année, elle aura lieu du 9 au 20. Pour en savoir plus, nous avons fait un tour dans ledit hôpital le mercredi 26 février 2020.

 

 

 

 

Abzèta Sinaré a été excisée trois fois de suite, respectivement à 7, 12 et 15 ans. A cette époque, les exciseuses avaient estimé que l’opération n’avait pas réussi et, lors de leur dernière tentative, l’adolescente qu’elle était a perdu connaissance. Un souvenir qu’elle se remémore avec un pincement au cœur. « Par la suite, j’ai vraiment souffert des séquelles. Les accouchements ont été difficiles, les médecins en parlent mais le mal est déjà fait… », s’est résignée la quadragénaire, mère de trois enfants, même si elle a porté plus de trois grossesses. « Aujourd’hui, je suis contente de savoir que l’excision est interdite. Je n’aimerais pas que mes enfants connaissent le même calvaire », nous confie-t-elle, soulagée. Lorsque la jeune dame a entendu parler de la campagne gratuite de reconstruction du clitoris qui aura lieu du 9 au 20 mars 2020 au CHU de Bogodogo, elle a tout de suite pensé à sa jeune nièce qui n’a pas pu consommer son mariage et qui a donc dû retourner chez ses parents.

 

Pour notre interlocutrice, cette opération est une lueur d’espoir. Et c’est exactement le genre de message que le Dr Charlemagne Ouédraogo, professeur titulaire de gynécologie obstétrique des universités, tente de faire passer à travers l’organisation de ladite campagne.

 

En effet, le « docteur des femmes » veut offrir une chance à toutes celles qui souffrent des séquelles de l’excision. C’est pourquoi il a introduit, avec un de ses confrères, la reconstruction du clitoris dans le pays. Une étude a d’abord été menée (entre février 2014 et février 2015) sur 68 patientes à l’hôpital Yalgado Ouédraogo. Suite à ses résultats, significatifs, la première campagne a ainsi été organisée en 2006. Cette année, les inscriptions ont commencé le 10 février et prendront fin le 10 mars prochain. Elles se font au terme d’une consultation de gynécologie du lundi au vendredi, entre 8h et 12h, au CHU de Bogodogo. Comme chaque année, ce sera encore l’occasion de former une vingtaine de médecins. En plus de la reconstruction du clitoris, d’autres types d’interventions sont proposées. Il s’agit de la réparation des séquelles d’excision, de la réparation des périnées endommagés par les accouchements, de l’amplification du point G, du traitement des incontinences urinaires d’effort et d’autres conseils en sexualité.

 

Si l’on en croit le consultant international en santé de la reproduction, il y a de l’engouement pour cette activité. L’an passé, par exemple, il y a eu 300 inscrites pour 100 places. Certaines femmes viennent même de la Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger, de la Guinée ou de l’Ethiopie  pour demander cette intervention. Il semble que parmi les pays de l’Afrique de l’Ouest et centrale, seul le Burkina est leader en la matière. Et même si le taux de prévalence des mutilations génitales féminines (MGF) est de 76% (selon l’enquête de démographie et de santé) dans ce pays, les spécialistes notent une régression progressive et recommandent que la lutte soit poursuivie.

 

En rappel, il existe quatre niveaux de MGF : l’ablation du capuchon du clitoris qui est communément appelée excision ; l’ablation des petites lèvres, du capuchon du clitoris et du clitoris ; l’infibulation qui est la coalition des petites et grandes lèvres, elle ne laisse qu’un petit pertuis. Le quatrième degré concerne toutes les autres formes d’agression de l’appareil génital féminin (scarification, tatouage, piercing). Les MGF peuvent avoir des conséquences immédiates (saignement, décès brutal) et des complications infectieuses (tétanos, infection bactérienne, contamination par le VIH, hépatite, etc.). A l’âge adulte, la femme peut avoir des difficultés pour consommer son mariage parce que son vagin est fermé (type 3), sans oublier les complications hémorragiques à  l’accouchement avec risque de césarienne. A cela s’ajoutent l’absence de plaisir sexuel et les séquelles psychologiques (elle se sent inférieure aux autres ou revit régulièrement la scène de l’excision).

 

 

 

Zalissa Soré

 

 

 

 

 

Encadré

 

 

Une bonne partie du clitoris reste enfouie

 

 

 

Saviez-vous que le clitoris mesure environ 10 cm et que les exciseuses n’arrivent à en couper que 2 ou 3 ? Selon le Pr Charlemagne Ouédraogo, une bonne partie de l’organe reste enfouie en dessous des tissus. L’intervention, qui dure environ vingt minutes, consistera donc à enlever la partie cicatricielle et à aller rechercher le corps du clitoris pour le ramener à la position initiale, de sorte qu’il conserve ses propriétés physiologiques, vasculaires et nerveuses. La patiente pourra alors profiter du plaisir qu’il peut lui offrir mais seulement après une période de cicatrisation de deux mois ferme (sans rapports sexuels). A en croire le chef de service de gynécologie obstétrique et médecine de la reproduction du CHU de Bogodogo, la femme pourra, pendant ce temps, vaquer à ses occupations et faire les soins à domicile. Bien sûr elle aura de quoi gérer la douleur et elle sera revue à des intervalles par le spécialiste qui va s’assurer que la guérison se passe bien.

 

 

Z.S.

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