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Réouverture progressive des marchés : Des commerçants de Dassasgho refusent de marchander

 

Chaude journée le 28 avril 2020 sur le tronçon allant de l’échangeur de l’Est à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou. Les commerçants de Dassasgho, mécontents que leurs commerces, à l’image d’autres, soient restés fermés alors que Rood-Woko a rouvert ses portes ont matinalement érigé des barricades pour exiger la réouverture express du marché.

 

 

 

 

La série de manifestations pour exiger la réouverture des marchés semble contagieuse : dans la matinée du 28 avril, les commerçants de Dassasgho sont bruyamment entrés dans la danse en barrant, eux aussi, la route afin que les autorités entendent leur colère. La veille, c’était ceux de Naby yaar et de Sankaryaar… qui avaient bloqué  la circulation.

 

De l’échangeur de l’Est jusqu’à la MACO, les faiseurs de lois du jour ont, à l’aide de caissons, de vieilles tôles, de briques, de pneus usés, de troncs d’arbres, érigé des barrières de fortune à plusieurs niveaux. « Personne ne passe », tel est l’irréversible mot d’ordre donné pour paralyser la circulation. Les usagers vont de négociations en négociations dans une atmosphère souvent  tendue.  Mais peine perdue, car impossible de franchir le marigot jouxtant la principale maison d’arrêt du pays. Conséquence, beaucoup sont contraints de rebrousser chemin ou de se faufiler entre les pistes empourprées des « 6-mètres » dans l’espoir de rejoindre le goudron un peu plus loin. A ce niveau aussi, se trouve le dernier barrage  stratégiquement construit. 

 

Avec la fermeture des marchés et yaars de Ouagadougou depuis le 26 mars, beaucoup crient famine. « Nous demandons aux responsables de craindre Dieu en nous permettant de reprendre nos activités commerciales, car pour vivre il faut manger. Cependant, ça fait plusieurs semaines que la pitance quotidienne n’est plus un acquis », dit une commerçante. Tous ici souhaitent retrouver les étals le plus vite possible. « Avec l’apparition du coronavirus, cela fait plus d’un mois que nous ne travaillons plus.  Nous n’avons plus de quoi nous nourrir. La faim est aussi une maladie », estime Amado Kafando.

 

Composés majoritairement de femmes et d’enfants, les mécontents de cette partie Est de Ouagadougou avancent qu’il y a deux poids deux mesures dans la réouverture des marchés. Ils comprennent difficilement que le marché central, qui reçoit beaucoup de monde soit rouvert et qu’on n’en fasse pas autant pour les yaars où l’affluence est relativement moins importante. « Rood-Woko est ouvert. Pourtant, c’est le marché du pays qui accueille le plus grand nombre de personnes par jour. C’est quand même incompréhensible», dit Kafando Amado, estimant que la batterie de mesures prises à Rood-Woko peut aussi bien s’appliquer aux autres dont la taille est moins importante.

 

Face aux manifestations qui commencent à prendre de l’ampleur, les douze maires de la capitale se sont retrouvés dans la soirée du 27 avril et ont discuté de la question de la réouverture des marchés. Mais la bonne nouvelle qu’attendaient les commerçants n’est pas tombée ce jour-là. Cela a causé la colère des marchands à l’image de ceux de Dassasgho qui disent ne plus trop croire aux patrons des municipalités qu’ils accusent au passage d’avoir pris des décisions antérieures de manière unilatérale. « A la fermeture, il nous a été dit que le marché serait rouvert le 20 avril. Le jour arrivé, on nous a opposé l’argument qu’il faut désinfecter les lieux avant l’ouverture effective le lendemain. Nous n’avons pas trouvé à redire. Sauf que la parole donnée n’a pas été respectée par les autorités. Le 21 avril, ils ont unilatéralement fermé le lieu de commerce jusqu’à nouvel ordre. Si nous attendons la décision de la municipalité, nous risquons de mourir de faim », a longuement expliqué Kafando Amado. Déçus, ils ne veulent plus d’un quelconque soutien. Leur ultime souhait étant la levée de la mesure interdisant l’accès au marché. « J’ai entendu que notre marché a bénéficié de trente sacs de riz. Vu la taille du marché, la quantité est infime. D’ailleurs nous ne voulons même plus de leur aide. Nous voulons simplement retrouver nos étals », fulmine un autre, cheveux grisonnant.

 

Malgré la colère des commerçants lors de la manifestation, aucun incident en notre présence. Les éléments de la Compagnie républicaine de sécurité, postés sur une bretelle de la route, n’ont pas eu recours aux matraques ou aux gaz lacrymogènes pour maintenir la foule à bonne distance ou éviter les débordements. Quand le mécontent public s’approchait d’eux de très près, ceux-ci faisaient des pas en avant, boucliers levés, et les croquants se dispersaient avant de se reconstituer aussitôt.

 

Aux environs de 10h 30, la route est de nouveau ouverte à la circulation, mais les commerçants menacent de revenir dans les prochains jours si les autorités ne donnent pas une suite favorable à leur revendication.

 

 

Hadepté Da

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