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Forêt classée de Kua: «Je pouvais perdre la vie pour avoir demandé une étude» (Député Moussa Zerbo, président du MPFK)

Il fut l’un des fervents opposants au choix du site de la forêt de Kua pour la construction du futur hôpital de référence de Bobo-Dioulasso. Une position qui était loin d’être partagée par certains Bobolais et qui vaudra malheureusement à l’honorable député de la région, Moussa Zerbo, des ennuis et pas des moindres, notamment des menaces de mort et la tentative de pyromanes d’incendier son domicile au quartier Belleville en mai 2019. Mais depuis la semaine dernière, les positions, parfois tranchées, des pro Kua et des anti Kua qui ont retardé la réalisation de cette gigantesque infrastructure sanitaire de dimension sous-régionale au profit de Bobo et sa région semblent avoir être conciliées. C’est du moins ce qui est ressorti de la récente visite du chef du gouvernement dans la ville de Sya. En annonçant le repérage d’un nouveau site et l’abandon de la forêt  litigieuse, Christophe Dabiré a mis du baume au cœur des membres du Mouvement pour la protection de la forêt de Kua (MPFK). Son président, le député UPC Moussa Zerbo, que nous avons rencontré le lundi 17 août 2020, nous exprime sa satisfaction dans cette interview qu’il nous a accordée depuis Ouagadougou grâce à la magie du numérique.

 

 

Vous êtes surtout réputé dans le Houet pour vos actions en faveur de la protection de l’environnement. Qu’est-ce qui explique cet engagement de votre part ?

 

Mon engagement pour la protection de l’environnement remonte à la Révolution, quand j’étais pionnier. Les « trois luttes » comme on les appelait  (contre la coupe abusive du bois, la divagation des animaux et les feux de brousse) m’ont beaucoup marqué. Cet intérêt pour l’environnement s’est aussi poursuivi au niveau du comité local de jumelage de Bobo où nous organisions depuis le lycée des camps vacances de reboisement avec les amis de Chalons (France). En fin 2018, j’ai été élu à la tête de la Commission du développement rural, de l’économie et des changements climatiques (CDRECC), qui s’occupe des questions environnementales à l’Assemblée nationale. Comme vous pouvez le constater, la question environnementale a depuis toujours été au cœur de mes préoccupations.  

 

Vous êtes à la tête d’un mouvement pour la protection de la forêt de Kua. Dans quel contexte est-il né?

 

Le Mouvement pour la protection de la forêt de Kua (MPFK) a été créé suite à une crise née après le projet de construction de l’hôpital de référence de Bobo. En ma qualité de président de la Commission chargée de l’environnement de l’Assemblée nationale et de fils de Bobo-Dioulasso, je me suis senti interpellé. C’est ainsi que j’ai décidé de lancer le MPFK pour regrouper tous les défenseurs de l’environnement déjà présents sur le terrain. Nous nous sommes retrouvés et la coordination m’en a été confiée par les autres structures.

 

C’est un mouvement qui a été décrié par certains à Bobo. Qu’est-ce qui était surtout reproché à votre structure ?

 

Il faut le dire sans ambages, c’est un de mes adversaires politiques, élu national de la province du Houet dont je vais taire le nom, qui a mené des tractations pour faire croire aux gens que le mouvement était politique et que l’objectif était d’empêcher le MPP et son pouvoir en place de construire l’hôpital de Bobo. Pour ce dernier, il fallait trouver un moyen de me casser, de ternir mon image avant les élections de 2020, car ma réputation et mes actions étaient très remarquables selon lui.

 

Le MPFK, selon nos informations, était aussi vu d’un très mauvais œil par des responsables communaux. Est-ce vrai ?  

 

Le maire de la commune et celui de l’arrondissement n°7 nem’ont jamais caché leur hostilité. Mais je comprends et je pense que la manipulation a été forte au point qu’y ont été impliqués certains notables. Je pense notamment à cette marche dite de soutien au gouvernement pour la construction de l’hôpital dans la forêt. La preuve, pendant l’enquête, certains ont répondu qu’on leur aurait dit que le député Zerbo et ses camarades ont demandé d’aller construire l’hôpital ailleurs, ce qu’eux, ne peuvent admettre. Vous voyez à quel point  on peut être méchant ?

 

Le choix de la forêt de Kua à un moment prenait des tournures inquiétantes et votre intégrité physique était même menacée. Avez-vous eu peur pour votre vie ?

 

Permettez-moi de rendre un grand hommage à la Compagnie républicaine de sécurité (CRS), qui a veillé sur moi et ma famille. Sinon, un groupe de jeunes instrumentalisés et aux ordres des mêmes manipulateurs avaient été envoyés pour incendier mon domicile. J’aurais pu perdre la vie pour avoir tout simplement demandé qu’on fasse une étude d’impact environnemental et social sur la forêt. Je m’en remets à Dieu tout-puissant qui n’a pas voulu qu’il m’arrive quelque chose. De façon occulte, des tentatives ont eu lieu également. Mais je suis resté serein, persuadé que la vérité finirait par triompher.

 

Maintenant que l’hôpital ne sera pas construit à Kua, est-ce une victoire personnelle pour vous ?

 

C’est plutôt une victoire pour le Burkina tout entier et pour les défenseurs del’environnement. Nous avons l’impérieux devoir de préserver nos ressources naturelles. C’est l’occasion pour moi de féliciter le Premier ministre et l’ensemble de son gouvernement. Même si certains voyaient la forêt de Kua comme un champ d’arachides ou un désert. Pourtant, cette forêt qui existe depuis des décennies a une importance capitale pour Bobo. Elle donne beaucoup d’oxygène et un bon climat à la ville. Les riverains y trouvent une eau de très bonne qualité. C’est également un lieu de culte, selon les informations que nous avons eues, et on y trouve une diversité de plantes médicinales rares. Donc pour nous, c’est un site qu’il faut protéger bec et ongles. Je dis également merci à la coopération chinoise qui a su situer l’opinion sur le fait que les Chinois n’ont imposé aucun site.

 

Pala, qui serait le nouveau site, est-il propice au projet ?   

 

Certainement, sinon le gouvernement n’aurait pas envisagé la pose de la première pierre encore moins le démarrage effectif des travaux pour septembre 2020. Vivement que les choses aillent vite pour la réalisation de cette infrastructure sanitaire que les Bobolais attendent avec impatience. De mauvaises langues avaient fait croire à un certain moment que les divergences nées du choix du site à Bobo avaient amené le gouvernement à revoir ses ambitions à la baisse concernant cet hôpital de référence de dimension sous-régionale. Certains ont même fait croire que l’intransigeance du MPFK quant au choix du site avait amené le gouvernement à délocaliser le projet dans une autre région créant ainsi, dans la délation et le mensonge, une animosité autour de ma personne. Il n’en est absolument rien et le Premier ministre a donné l’assurance que le projet serait entièrement réalisé à Bobo tel qu’il a été conçu depuis le départ. Ce projet nous interpelle tous et j’invite par conséquent tous les Bobolais à s’investir pour accompagner la coopération chinoise dans la bonne réalisation de ce projet. Au MPFK, nous restons disponibles pour accompagner et soutenir le projet à toutes ses étapes jusqu’à ce que cette infrastructure devienne réalité.

Jonas Apollinaire Kaboré

 

 

                                                          Encadré

Pala, épicentre de la coopération sino-burkinabè

 

Dans notre édition du mardi 21 juillet 2020, nous écrivions en page 4 et sous le titre « Hôpital de référence de Bobo : Pala le nouveau site ? » La ville de Sya bruissait  en effet de rumeurs de plus en plus persistantes sur le repérage d’un nouvel espace destiné à la construction de l’hôpital de référence. La présence d’une mission chinoise dans le village de Pala vendredi 17 juillet 2020 en compagnie du maire de l’arrondissement 5, Christophe Sanou, avait fini par convaincre de nombreux Bobolais de la nouvelle orientation du projet. Depuis, tous les regards étaient tournés vers ce village situé à la périphérie est de Bobo, à quelques encablures de Kua et de Borodougou. La rencontre entre le Premier ministre, Christophe Joseph Marie Dabiré, et les forces vives de la région des Hauts-Bassins le 13 août 2020 à Bobo-Dioulasso a fini par convaincre davantage les habitants de Sya du choix de cette localité comme site définitif retenu pour la réalisation du projet. Dans sa déclaration en effet, le chef du gouvernement a fait savoir que le rapport de l’étude d’impact environnemental déconseillait le site de la forêt de Kua pour la réalisation de cette importante infrastructure sanitaire. Alors, le nouvel endroit retenu par les autorités, avec la précieuse collaboration des habitants du village, ne connaît pas jusque-là la moindre contestation ou revendication. Vivement le début des travaux donc. Nul doute qu’avec ce projet estimé à environ 70 milliards de francs, Pala sera très bientôt  l’épicentre de la coopération entre la Chine et le Burkina.

 

                                                                                                JAK

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