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Manifestations contre un convoi militaire français : Et ce qui ne devait pas arriver, arriva !

 

C’est un samedi matin sanglant qu’ont vécu les habitants de Téra, une petite commune dans l’ouest nigérien, le 27 novembre dernier. 3 morts, 18 blessés dont 4 graves, et des camions civils endommagés, c’est le triste bilan des heurts survenus entre manifestants, gendarmes nigériens et soldats français chargés de sécuriser un convoi de la force Barkhane à destination de Gao au Mali.

 

 

Parti de la Côte d’Ivoire à la mi-novembre, ce convoi militaire n’a pas brillé dans la discrétion d’un transit sécurisé sur les routes du Burkina et du Niger vers sa destination finale. Bien au contraire, il s’est fait remarquer par sa taille impressionnante de près de 100 véhicules, qui plus est, roulent de jours, sans contourner les grandes agglomérations.

 

Or, il est loin le temps où l’armée française se faisait acclamer en libératrice du Sahel, notamment les soldats de l’opération Serval au Mali en janvier 2013. C’est plutôt un sale temps qu’elle y vit actuellement. En termes d’image, elle est vilipendée  par les médias et plus encore par les réseaux sociaux pour les ambiguïtés présumées de son engagement à y combattre les groupes terroristes.

 

Les tirs de sommation meurtriers de samedi dernier à Téra au Niger ne sont qu’une sanglante illustration des relations compliquées, pour ne pas dire du désamour prononcé qu’éprouvent de plus en plus les populations du pré carré africain de l’Hexagone à son encontre.

 

On en voudrait pour preuve, le blocage organisé par une foule de mécontents du même convoi militaire à Kaya, au nord-est du Burkina. Pendant près d’une semaine, il a dû interrompre son voyage face à la détermination des jeunes de cette ville qui voulaient le voir rebrousser chemin. Il a pu poursuivre son transit après un bivouac forcé, et suite à des négociations où ont été impliquées plusieurs personnalités politiques, diplomatiques, militaires et coutumières qui ont pu calmer la colère des croquants de Kaya. Avant ce dénouement heureux, on  y a frôlé le pire, samedi 20 novembre quand des tirs de sommation avaient fait plusieurs blessés légers.

 

Une semaine après ces incidents, patatras ! Ce qui ne devait pas arriver est arrivé à Téra où, pour éviter que des manifestants en colère ne prennent le contrôle du convoi, des tirs venus d’on ne sait où, ont semé tristesse, désolation et deuil. Qui a tiré sur la foule à Téra ? Les gendarmes nigériens chargés de la sécurité du convoi ou les soldats français qui en font partie ? Les premiers peuvent avoir fait du zèle et les seconds dont les nerfs sont mis à rude épreuve dans ce voyage qui ressemble à un parcours du combattant,  peuvent avoir cédés à la panique devant l’agressivité des manifestants.

 

En attendant que les responsabilités soient situées, la France n’avait pas besoin de cette bavure. Ce sang versé à Téra en rajoute aux écorchures de son image d’une puissance militaire qui n’en fait pas assez pour bouter les groupes terroristes hors du Sahel. Les jeunes de Kaya, ceux de Téra, sont des échantillons de ces populations sahéliennes qui ont des ressentiments contre la France et son armée ; ressentiments d’autant plus forts qu’ils procèdent chez certains, d’une sympathie et d’attentes déçues par « nos ancêtres les Gaulois. »

 

Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Gageons donc que les autorités politiques et militaires françaises tireront leçons des manifestations contre ce convoi militaire pour rectifier ce qui est à rectifier dans l’acheminement de matériels militaires au Sahel, l’engagement des soldats de la Force Barkhane sur le théâtre des opérations, et plus généralement dans les relations de Paris avec les capitales africaines.

 

Et si ce qui ne devait pas arriver est arrivé à Téra, ce drame éclaire a postiori le doigté des autorités burkinabè dans la gestion de la colère des populations de Kaya contre ce même convoi. Car, un passage en force avec à la clé des meurtres et des blessés graves aurait été explosif dans le contexte d’une situation politique sous haute tension au Burkina.

 

 

 

Zéphirin Kpoda

 

Dernière modification lemardi, 30 novembre 2021 10:00

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