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Femmes en travail : «Oui, sur la table, c’est permis de faire vos besoins» (Responsable de sages-femmes Georgette Zerbo)

 

Comme pour laver le linge sale en… public, l’Association pour la promotion des sages-femmes et maïeuticiens du Burkina Faso (APSAM/BF) a organisé le samedi 7 mai 2022, dans le cadre de ses activités commémoratives de la Journée mondiale des sages-femmes, une conférence sur le thème  «Gestion de la douleur de l’accouchement et accouchement humanisant». Actualité oblige, la question des violences obstétricales a été au cœur des échanges.

 

 

 

 

Le nom de la sage-femme, comme on le dit trivialement sous nos cieux, est «gâté». Du Burkina au Sénégal en passant par d’autres pays africains, et même ailleurs dans le monde, celles qui aident leurs « sœurs » à donner la vie sont décriées. Entre autres griefs, les injures, les remontrances, les coups, la non-assistance lors de l’accouchement. Conséquences : des pertes de vie à l’accouchement, soit de la mère, de l’enfant ou des deux, des mort-nés, des bébés ayant subi une souffrance fœtale qui se retrouvent avec des séquelles plus ou moins graves… Du fait de ce manque d’humanisme, beaucoup de parturientes redoutent de «croiser une sage-femme» à l’accouchement, préférant les services d’un maïeuticien.

 

«La prise en charge n’est pas toujours satisfaisante. La première fois où j’accouchais, c’était désagréable. C’était des reproches du genre «pourquoi tu viens à cette heure ? » « je ne suis pas là pour ça seulement »… Je n’avais même pas le droit de poser de question. Elle voulait que j’obéisse à ses ordres sans rechigner », nous raconte une maman sa mésaventure avec une sage-femme. Mais on le sait, dans tout corps de métier il y a des brebis galeuses. Autant il y a de mauvaises sages-femmes, autant il y en a de bonnes.

 

«Il y a de bonnes sages-femmes. Mais dès que tu commets une erreur, ne serait-ce qu’une fois, les gens ne pardonnent pas», a relevé la présidente de l’Association pour la promotion des sages-femmes et maïeuticiens du Burkina Faso (APSAM/BF), Lamoussa Georgette Zerbo, non sans avoir fait reconnaître certains manquements dans le corps.

 

 

 

Imcomprise ?

 

 

 

Selon la responsable des sages-femmes, une doyenne dans cette profession, la méchanceté envers les parturientes n’est absolument pas excusable ; c’est le stress qui amène certaines sages-femmes à mal se comporter souvent. En effet, comme toute personne, la sage-femme est confrontée au stress, du côté familial ou au travail où parfois elle est seule à tout faire. Concernant les plaintes sur les gifles et autres coups que certaines sages-femmes infligeraient à des femmes en couches, c’est parfois pour le bien de la patiente et de son bébé, dit-elle. « Vous voyez, certaines femmes qui ont supporté la douleur du travail arrêtent de pousser à la dernière minute quand elles sont extenuées. Pourtant lorsque la tête du bébé commence à sortir et elles bloquent, cela constitue un risque grave pour la vie du petit. C’est pourquoi, de peur de perdre l’enfant, certaines d’entre nous n’hésitent pas à taper la maman pour que, par réflexe, elle se relâche », a expliqué une accoucheuse.  

 

A ce propos, le porte-voix des sages-femmes a appelé ses collègues à une meilleure communication avec les parturientes à qui elles doivent prendre le temps d’expliquer les choses. « Nous devons revoir notre manière de communiquer avec les patientes, les familles, les accompagnateurs, surtout que les femmes, en venant dans la formation sanitaire, sont déjà stressées. Nous nous devons donc de bien les accueillir car cela peut déjà contribuer à résoudre leurs problèmes à 90%. S’il y a de plus en plus de plaintes, c’est parce que les populations ont appris à connaître leurs droits. Apprenons donc à respecter les droits des femmes ». Consciente des fautes professionnelles dans leur corps, elle a relevé et salué l’esprit de tolérance de la population burkinabè, qui se garde très souvent de traduire les agents de santé devant les tribunaux. «Les femmes burkinabè ont le cœur sur la main», à t-elle loué.

 

 

 

La femme doit pouvoir choisir sa position pour accoucher

 

 

 

«Quand tu faisais là, c’était bon non ?», «Regarde comme tu es sale», «Retourne là-bas, ce n’est pas encore arrivé». Ce sont autant de paroles désobligeantes tenues par de soi-disant professionnels de santé à leur patientes. Ces écarts de langage, en plus d’autres comportements comme les coups, le refus d’expliquer des choses ou la non-assistance, constituent des exemples de violences obstétricales, très courants dans nos maternités. Pourtant la femme qui vient accoucher a des droits que la sage-femme est tenue de respecter. L’accouchement humanisé dont on parle tant implique l’ensemble des conditions à réunir pour que la future maman vive pleinement son accouchement, qui doit être un événement heureux. Par exemple, la femme a le droit de choisir la position dans laquelle elle veut accoucher : sur le dos, accroupie, debout, assise, sur le côté… Elle peut aussi décider que son mari assiste à sa délivrance. L’expérience a d’ailleurs montré, selon les oratrices du jour, que la présence du mari dans la salle d’accouchement est d’une grande aide à certaines femmes et il y a des dispositions qui peuvent être prises pour que ce dernier ne voie pas le bébé sortir ou le sang couler s’il n’en supporte pas la vue.

 

Des femmes en travail sont aussi réprimées par des sages-femmes pour avoir fait leurs besoins sur la table d’accouchement et ce ne devrait pas être le cas. Ce n’est pas par plaisir que des femmes défèquent à l’accouchement, c’est juste un besoin naturel qui se présente avec la pression de la délivrance. De peur de vivre cette « honte », certaines femmes s’abstiennent de manger et de boire ou alors se purgent lorsqu’elles sentent que l’accouchement est proche. Conséquence : sur la table, elles n’ont pas assez de forces pour pousser. Cette injustice, les conférencières ont aussi exhorté leurs « collègues » à y mettre fin. « Mesdames, nous avons donc le droit de déféquer sur la table d’accouchement et c’est leur devoir de ramasser  ça», a lancé,  suscitant l’hilarité dans la salle, la modératrice de la conférence, Prisca Coulibaly.  Des propos que la responsable de l’APSAM a confirmés.

 

Comme pour joindre l’utile à l’agréable, les organisatrices de  l’événement ont, en plus d’une séance d’aérobic et d’un cadre d’échanges directs, avec des sages-femmes dénommé «A chaque femme enceinte sa sage-femme», donné des cours sur l’accouchement. Il s’agissait notamment de comment gérer les contractions, le stress et la douleur, chose qui peut se faire de 2 manières : la méthode naturelle (la respiration, la variation des mouvements, la relaxation …) et la méthode médicamenteuse (la péridurale, les substances inhalantes…). Des démonstrations ont même été faites sur place par la promotrice de l’Ecole des mamans, Agnès Sontié, et d’autres enseignantes de son centre.

 

Alima Séogo née Koanda

Tél. : 79 55 55 51

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