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Mission d’enquête internationale au Tchad : Grand pas vers la lumière sur le jeudi noir

Depuis l’avènement de ce « jeudi noir » ou « jeudi sanglant », c’est devenu une revendication matricielle aussi bien de la classe politique que du monde des organisations de la société civile tchadiennes. Human Rights Watch et la Fédération internationale des droits humains (FIDH), pour ne citer que ces deux vigies mondiales de la protection de la vie humaine, se sont fait l’écho de cet appel pressant : le lancement d’une enquête internationale pour que lumière soit faite sur pareille tragédie.

 

En effet, les autorités de transition tchadiennes viennent de marquer leur accord pour recevoir une mission d’enquête internationale suite à la violente répression de la marche du 20 octobre 2022.

Ce jour-là, à l’appel des principaux partis d’opposition et d’organisations de la société civile, des manifestants sont descendus dans la rue de plusieurs villes du pays pour protester contre la prorogation de la durée de la Transition.

Le mouvement de désapprobation, interdit par le pouvoir, se terminera par un bain de sang : entre cinquante et soixante-dix personnes tuées, des centaines de blessés et des vagues d’arrestations.  Le couvre-feu est aussitôt décrété, aussi bien à N’Djamena  que dans plusieurs autres localités.

Pouvoir et opposition s’accusent mutuellement d’un massacre dont l’ampleur rappelle les années de plomb du dictateur Hissen Habré.

Pour le Conseil militaire de transition, dirigé par Mahamat Idriss Déby, fils du défunt président, Idriss Déby Itno, des manifestants, armés de couteaux et de machettes, s’en sont pris aux forces de sécurité, qui ont perdu quinze de leurs membres.

Mais pour les organisateurs il n’en est rien et ils soutiennent que l’usage d’armes à feu contre une manifestation pacifique constitue une réponse disproportionnée à la prétendue violence.

Face donc à ce jeu de ping-pong indécent, l’on peut d’ores et déjà se réjouir de la décision de N’Djamena d’accueillir une mission d’enquête internationale. Quand bien ce ne serait pour l’instant qu’une acceptation de principe, c’est déjà un bon pas vers la manifestation de la vérité.

Mais force est de reconnaître qu’une chose est de recevoir des investigateurs étrangers et une autre est de garantir les conditions d’un travail indépendant de ces derniers.

Auront-ils, par exemple, accès à toutes les personnes et à tous les documents susceptibles de permettre de situer les responsabilités ?

Auront-ils, par exemple encore, les coudées franches aussi bien vis-à-vis du pouvoir que de l’opposition et des autres forces de la société civile pour mener à bien leur mission ?

Ce sont là autant de questions qui méritent d’être posées et dont les réponses détermineront le degré de crédit à accorder au rapport final.

On a beau parler d’insurrection armée ou de velléités de coup d’Etat, il s’agit là d’un événement sanglant qui entachera à jamais  l’histoire politique du Tchad. Le comble est que cela intervient au lendemain de la formation d’un gouvernement d’union nationale conduit par le Premier ministre Saleh Kebzabo, nommé dans la foulée  de la signature d’un pacte de renouveau national.

Il faut donc espérer que chacun des camps protagonistes jouera sa partition afin que la vérité surgisse des sépultures de toutes les victimes du 20-Octobre et, surtout, pour que justice soit faite.

Il y va de la réconciliation tant prônée lors du dialogue national inclusif et souverain.

Alain Saint Robespierre

Dernière modification lemercredi, 09 novembre 2022 21:29

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