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Adjudant-chef major Moutuan Coumbia : Le ‘’gorille’’ de M’Ba Michel à la barre

Les vendredi 31 août et samedi 1er septembre 2018, la chambre de première instance du tribunal militaire a auditionné quatre accusés dans le cadre du procès du putsch manqué de septembre 2015. On en retiendra l’audition de l’adjudant-chef major Moutuan Coumbia, qui assurait l’intégrité physique du président de la Transition, Michel Kafando. Dans les pages qui suivent, nos reporters reviennent sur ces deux jours d’audience à travers leur compte-rendu.

 

 

 

Comme un échauffement, l’audience du 31 août 2018 a été entamée par des demandes de liberté provisoire. Au total, deux requêtes ont été introduites : celles des accusés Fayçal Nanéma et Abdoul Karim Baguyan. A la barre, chacun a plaidé pour sa cause mais les raisons invoquées sont assez similaires, puisque tous ont fait cas de problèmes de santé. Dans le passé, Fayçal Nanéma avait déjà bénéficié d’une première liberté provisoire le 29 décembre 2016 et qu’il a perdue en fin mars 2018 parce qu’il s’est absenté à une audience du procès. A la barre, il a expliqué qu’il ne va pas bien et que cela fait trois mois qu’il n’est plus allé voir ses médecins traitants. Mais le parquet lui a demandé d’étoffer sa requête par des pièces médicales. L’accusé a affirmé être en détention depuis cinq mois par la volonté du parquet et non par la loi.

Quant à Abdoul Karim Baguyan, dit Lota, qui s’est présenté à la barre en se déplaçant à l’aide d’une béquille, il a voulu convaincre de la nécessité d’une rééducation d’un de ses membres inférieurs, ayant été « mordu par un serpent depuis sa prise de corps », selon son  conseil, Me Paul Kéré. L’accusé dit être suivi par un kiné qui lui a prescrit 10 séances à raison de trois par semaine, ce qui lui paraît impossible du fait de sa situation carcérale. « Le kiné trouve nécessaire qu’il pratique la marche. Il a un nerf coincé entre deux os. Il a fait cinq voyages hors du pays alors qu’il lui était reproché cinq infractions, mais il est toujours revenu. Ce n’est pas au moment où il va bénéficier de votre clémence qu’il prendra la poudre d’escampette », a argumenté son avocat. 

A aucune des deux demandes le parquet n’a été favorable. Pour la première, il a estimé que l’accusé n’a pas fourni de certificats médicaux justifiant son état. Concernant la seconde requête, le ministère public a fait remarquer qu’elle est uniquement constituée de bulletins d’examens alors qu’elle nécessite un rapport d’expertise. Ces observations faites, les deux dossiers ont été mis en délibéré pour ce lundi 3 septembre 2018.

 

Le caporal Léonce Sow ‘’déchargé’’

 

L’échauffement terminé, s’ouvre le bal des auditions avec  le caporal Léonce Sow. Il est né le 8 mars 1984 à Toma. Célibataire et père de cinq enfants, son cas est particulier. En effet, l’arrêt de renvoi ne lui a pas été notifié et son nom ne figure pas dans l’arrêt de mise en accusation. C’est sur ces éléments que son conseil, Me Mahamadi Sawadogo, s’est fondé pour demander au tribunal de rendre le jugement avant dire droit pour libérer son client. « Que le tribunal ordonne sa mise hors de cause. Eventuellement, il pourrait être cité comme témoin mais pas comme inculpé », a insisté pour dire Me Mahamadi Sawadogo. Mais le ministère public n’est pas de cet avis. « C’est le même dispositif de l’arrêt de renvoi qui l’a renvoyé devant votre juridiction. Il ne peut pas changer de statut », a rétorqué le parquet. Une position que la partie civile va appuyer. « Il y a une contradiction de motif en ce qui concerne Sow Léonce.  Mais on n’a pas d’autre solution que de l’entendre et d’en tirer les conséquences juridiques », a ajouté Me Guy Hervé Kam.

« L’arrêt de renvoi ne comportant aucun fait à lui imputer, nous n’avons pas compétence pour interroger Sow Léonce », a tranché le président du tribunal, Seydou Ouédraogo. Le parquet a ainsi dit prendre acte et promis d’en tenir compte dans ses réquisitions.

 

« Et je ne suis plus retourné au camp … »

 

Après le caporal Léonce Sow, c’est le soldat de première classe Adama Kaboré qui est appelé, mais il ne fera qu’une poignée de minutes à la barre. Son conseil, Me Silvère Kiemtaremboumbou, étant absent, son audition n’a pas eu lieu car l’avocat s’était rendu « au chevet » d’une autre cliente, Safiatou Lopez (lire encadré : Et Safiatou Lopez s’invite à la barre !).

Le caporal Soumaïla Diessongo a donc été appelé à la barre. Il est poursuivi pour des faits de complicité de dégradation volontaire aggravée de biens, de coups et blessures volontaires sur 42 personnes et complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat. Accusations que  le natif de la province du Koulpélogo a balayées du revers de la main, avant de livrer sa version des faits. « Le 16 septembre, j’étais de garde au camp Naaba Koom II. Le lendemain matin, alors que j’y étais toujours, le chef de garde m’a informé qu’une sortie était en vue et que cela consistait à aller chercher des vivres. Avec deux autres éléments, j’ai été désigné pour cette mission. » Selon l’accusé, l’équipe de la mission, composée de 5 personnes (lui, le chef de garde Issouf Zougnogo, le sergent Adama Kaboré, un chauffeur et un jeune élément du RSP qu’il ne connaissait pas),  a embarqué dans un véhicule double-cabine, bariolé. Partis du camp, ils sont arrivés au rond-point du Monument des martyrs,  où deux civils les ont arrêtés. « Ils ont parlé au chef de bord mais je n’ai pas su ce qu’ils se sont dit », a relaté l’accusé de 26 ans. Poursuivant son récit, il a indiqué qu’après les échanges, le véhicule a fait un 8e de tour et pris la direction d’un endroit qui ne lui était pas familier. Et arrivés devant une cour, ils marquent l’arrêt après avoir constaté un attroupement. Le sergent Zougnogo a demandé « qui a tiré ». Un monsieur en civil se présente comme le tireur, au motif que des individus sont venus les attaquer et il a tiré pour les disperser. Cela dit, il reçoit conjointement avec le sergent Adama l’ordre du sergent Zougnogo de le suivre dans la cour et de récupérer son arme. Après exécution, il remet l’arme au sergent Zougnogo et le groupe embarque avec l’inconnu pour regagner le camp où lui, rejoindra son poste de garde. « N’avez-vous pas porté de coup à quelqu’un ? », a voulu savoir le président Seydou Ouédraogo. A cette question, l’accusé a répondu par la négative. Il en sera de même, quand il lui seront posées les questions de savoir s’il n’est pas ressorti du camp après avoir débarqué avec le groupe, s’il n’a pas participé à un rassemblement dans l’après-midi du même jour ou s’il avait appris l’arrestation des autorités. « Quand avez-vous quitté le camp ? » a encore questionné le tribunal. « Ma garde finissait le 18 matin. Et comme elle était finie, je suis rentré chez moi. Et je ne suis plus retourné au camp jusqu’à la date du 29 septembre. »

 

« Mortier 80 »

 

Pourtant, selon le parquet, ce n’est pas le même film des évènements que l’accusé avait présenté lors de ses premières comparutions. Dans les P-V, a rappelé le procureur militaire, le caporal Diessongo a dit être sorti le 17 « pour une patrouille à la Patte d’oie ». Toujours selon les notes du parquet, au lieu de l’attroupement évoqué par l’accusé, qui s’avère être le domicile de feu Salifou Diallo, le caporal Diessongo aurait molesté deux personnes qui étaient commises à la sécurité des lieux. Il s’agit de l’assistant de police Yacouba Manli, qui n’est autre que celui qui a reconnu avoir tiré, et d’un ex-sergent de l’armée, en l’occurrence Lassana Ouédraogo. Reprenant les déclarations de l’assistant de police, le procureur militaire a lu ceci : « Le sergent Ouédraogo Lassana et moi avons été déshabillés devant la cour, couchés à terre et molestés ». Et lors d’une de leurs confrontations, a relevé le parquet, l’assistant de police a dit reconnaître le caporal Diessongo, qui était le plus violent mais aussi le plus petit de taille, qu’il avait même surnommé « mortier 80 » en référence à sa taille.

« C’est une accusation sans preuves. Elle est fondée sur de simples présomptions liées à son apparence physique », a répliqué son conseil, Me Tologo. « Est-ce que vous reconnaissez avoir vu Faiçal Nanema au rond-point des Martyrs ? », rebondit le parquet. « Nanema est malade. Voyez comment il marche pour venir à la barre. Si c’était lui, j’allais le reconnaître même si je n’aurais pas pu donner son nom», a répondu le caporal.

Son audition a décrispé à plusieurs reprises l’ambiance dans la salle et suscité souvent l’hilarité dans les rangs des accusés. Avant qu’il ne regagne sa place, le caporal, dans un français de petit nègre, a dénoué une fois de plus les gorges. « Moi si je prends 10 ans encore dans cette affaire ça ne me fait rien. Mais à chaque fois quand on parle de prévisible là (ndlr : référence à l’expression récurrente au prétoire ‘’tirer les conséquences prévisibles’’), il faut mettre ça aussi sur le policier qui a tiré en l’air ». En clair, il demande aussi la poursuite de celui qui l’accuse de lui avoir donné des coups.

Après une suspension, l’audience s’est poursuivie par l’interrogatoire du soldat de première classe Ouédraogo Harouna. Alors électricien au sein de l’ex-RSP, ce militaire du rang s’est retrouvé au moment des événements au domicile de feu Salifou Diallo. Il est chargé de deux chefs d’accusation : complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat et coups et blessures volontaires. Tout comme son prédécesseur, il a réfuté les griefs qui lui sont faits. Il soutient que le 16 septembre il était reparti au Conseil de l’entente pour terminer un boulot qu’il avait entamé, alors que selon le P-V il était allé pour un cours d’armement. Il ajoute qu’étant de semaine, il n’était pas concerné par les rassemblements.

Alors que les déclarations de l’accusé ont été en grande partie en contradiction avec le contenu des P-V de premières comparutions, son conseil, Me Ignace Tougouma, n’a pas manqué de faire observer « une constance de son client », demandant au tribunal de s’en tenir aux déclarations à la barre, car selon lui « les P-V comportent des irrégularités ». « Le parquet essaie de piéger mon client pour avoir des preuves et le charger. Sous réserve d’autres éléments, il vous revient d’en tirer les conséquences », a conclu Me Ignace Tougouma.

 

 

L’accusé a fini par ‘’accoucher’’

 

Le samedi 1er septembre 2018, l’interrogatoire des accusés s’est poursuivi dans la salle des Banquets de Ouaga 2000, transformée depuis le mois de février en prétoire de circonstance. A l’ouverture de l’audience, le soldat de 1re classe Abdou Compaoré a aussitôt été appelé à la barre. Il s’était retrouvé à un moment donné sans avocat et le bâtonnier lui en avait commis un d’office en la personne de Me Jacques Soré. Mais le président de la chambre de première instance du Tribunal militaire de Ouagadougou, Seidou Ouédraogo, a fait cas d’une correspondance de Me Paul Kéré dans laquelle l’avocat, qui s’était déporté, dit se constituer de nouveau auprès du soldat de 1re classe, ce qui veut dire que la commission d’office opérée par le bâtonnier est caduque, selon les textes. Cependant, Me Paul Kéré ne s’étant pas présenté au prétoire, l’audition de son client Abdou Compaoré a été différé.

Passé cet épisode, le tribunal a entamé l’audition du caporal Issaka Ouédraogo, rétrogradé au rang de soldat de 1re classe, car il avait été condamné à 6 mois de prison assortis de sursis pour désertion en temps de paix et détention illégale d’arme (affaire Yimdi). Dans le cadre du coup d’Etat manqué, il lui est reproché des faits de complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, meurtre et coups et blessures volontaires. «Je ne reconnais pas les faits. J’étais de garde au domicile du président Michel Kafando le 16 septembre 2015. Vers 16h, j’ai entendu à la radio l’arrestation des autorités de la Transition. Pour moi, en bon militaire, il me fallait aller à la base pour se renseigner. Je suis arrivé vers 16h 30 et j’ai entendu dire que le quartier venait d’être consigné. Je pouvais rentrer chez moi, comme je souffre d’hypertension artérielle, mais je suis resté au camp en bon militaire, aux côtés de mes chefs, en attendant toute instruction », a relaté ce célibataire père de 5 enfants. Selon son récit, le soldat dit n’avoir participé à aucun rassemblement (du fait de sa santé) ; il se défend aussi d’avoir été présent à la rencontre entre ex-RSP et sages et encore moins avoir effectué des patrouilles en ville.

 

« Si c’est bien moi, je vais vous le confirmer »

 

Si les développements du soldat semblent indiquer qu’il n’a rien à avoir dans cette affaire, le parquet militaire l’acculera sur un autre fait, qu’il finira par reconnaître. «Soldat Ouédraogo, avez-vous reçu de la part de l’adjudant Nion une somme de 1 941 000 francs CFA au moment des faits ?» lui a demandé le substitut du procureur, Sidi Bekaye Sawadogo. Et l’accusé de rétorquer : «C’est mieux de vous référer à Nion, Monsieur le procureur». Le parquetier, qui n’était visiblement pas satisfait, revient à la charge : «Pour le moment, c’est vous qui êtes à la barre, la question est pourtant simple, j’ai remarqué que vous ne voulez pas y répondre. C’est oui ou bien c’est non ?» L’inculpé, après de multiples détours, finit par ‘’accoucher’’ sans s’étaler sur ce qu’il a fait pour bénéficier d’une telle manne financière. Selon le ministère public, le mis en cause n’est pas la seule personne à avoir reçu un tel montant par l’intermédiaire de l’adjudant Akowè Jean Florent Nion ; de l’argent venu de la Côte d’Ivoire. Dans la foulée, la partie poursuivante accable l’inculpé d’un élément vidéo dans lequel celui-ci a été aperçu vers la télévision BF1 au cours des événements. «J’ai demandé à voir l’élément en vain, si c’est bien moi, je vais vous le confirmer », s’est défendu le soldat Ouédraogo.

Ses conseils, Me Bali Bazemo et Seydou Roger Yamba, se sont, eux, focalisés sur la somme perçue par leur client pour dire qu’à aucun moment de la procédure cette pièce n’a été mise en débat. «Le parquet dit que c’est à travers l’analyse des téléphones. Dans le dossier, il n’y a pas la prestation de serment de l’expert qui a travaillé sur les téléphones. Donc nous vous prions de faire application des dispositions légales et d’écarter cette pièce », a plaidé Me Bazemo, qui venait de soulever une exception. A l’issue des joutes verbales entre les deux camps, Seidou Ouédraogo a promis de rendre une décision sur cette pièce avant la fin des débats.

 

Le garde du corps de Kafando s’explique

 

Après l’audition du caporal, pardon du soldat de 1re classe Issaka Ouédraogo, un autre proche collaborateur du président Michel Kafando est appelé à la barre. «Je suis chef d’accompagnement de la sécurité de Michel Kafando. Responsable de la cellule, je suis chargé d’assurer l’intégrité physique de Son Excellence. Cela dit, Monsieur le président, je ne reconnais pas les faits de complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, de meurtre et de coups et blessures qui me sont reprochés », a dit en guise d’introduction l’adjudant-chef major Moutuan Coumbia. Il a indiqué que dans la matinée du 16 septembre 2015, ils ont accompagné le président Kafando dans la salle du Conseil des ministres et se sont assurés du début de cette rencontre hebdomadaire avant de faire profil bas. «J’ai demandé la permission à l’aide de camp et je me suis rendu à la SGBB pour toucher mon salaire. J’ai ensuite été à mon domicile à la Zone 1 pour laisser la popote du mois. J’ai aussi fait un transfert d’argent à mes mamans au village. Je suis reparti à la présidence vers 12h30 et après avoir mangé, je me suis retiré dans une salle dans le hall en attendant la fin du Conseil. Sur le coup de 13h, j’ai entendu des voix menaçantes. Je n’ai pas pu voir ce qui se passait au-dehors mais, entre-temps, j’ai aperçu le sergent Bokouté Kam, un des éléments en service, qui m’a informé ‘’qu’ils ont été mis à plat ventre avant d’être désarmés. Les ravisseurs sont montés ensuite chercher le président Kafando et le PM (Premier ministre). Dans la foulée, j’ai reçu un appel du lieutenant Abdoul Karim Dianda, mon supérieur. Je lui ai dit que j’allais me renseigner davantage sur la situation avant de lui revenir. Le major Badiel m’a également appelé, j’ai fait savoir que j’étais à la présidence, il a répondu que quelqu’un viendrait me chercher. Le capitaine Dao est aussi venu aux nouvelles par appel téléphonique et à ce moment-là, il y avait le sergent Amadou Cissé ; lui a vécu la situation. J’ai passé mon téléphone à celui-ci afin qu’il explique ce qu’il avait vécu », a longuement raconté l’adjudant-chef major qui a dit avoir été surpris au point qu’il ne pouvait plus réagir, lui qui s’est retrouvé avec seulement son PA et sans hommes. Après que le sergent-chef Adama Diallo (l’envoyé du major Badiel) est passé le chercher, le natif de Bondokuy ne nie pas avoir participé à des rassemblements et reconnaît avoir même assuré la sécurité du président sénégalais Macky Sall (du 18 au 20 soir). Il a par ailleurs assisté à un rassemblement où le chef de corps adjoint de l’ex-RSP, le commandant Aziz Korogo, leur a dit de réintégrer leurs armes avant de leur expliquer les démarches à suivre afin de rejoindre leur corps d’affectation. «Au rassemblement du lendemain, soit le 28 septembre, le général a pris la parole pour demander aux militaires de rester soudés, quelle que soit la situation (ndlr : il avait auparavant appris qu’il y avait des mouvements de troupes de l’intérieur du pays (de Fada, de Kaya…) en direction de Ouaga. Je ne comprenais plus ce qui se passait mais j’ai été chargé de constituer des groupes. Avec les négociations, j’avais bon espoir qu’on éviterait l’affrontement », a indiqué le major.

 

« C’est la question que je me pose sans y avoir de réponse »

 

«On peut tout vous reprocher sauf la clarté de vos propos, surtout accompagnés d’une bonne diction. Mais cela ne veut pas dire que le parquet n’a rien à redire », a introduit le substitut du procureur militaire Mamadou Traoré. «Comment expliquez-vous le fait que vos hommes aient été mis à plat ventre, désarmés et enfermés alors que vous, un envoyé est venu vous chercher et vous n’avez pas connu le même sort que vos hommes ? », lui a demandé le ministère public. «Monsieur le procureur, c’est la question que je me pose jusqu’à ce jour sans y avoir de réponse. Si j’avais été traité comme eux, je n’allais pas me retrouver devant la barre », s’est défendu le militaire. Et l’accusation d’ajouter : «Mais expliquez-nous comment cela a pu se produire finalement, pour nous qui étions à l’extérieur, de tels événements ne peuvent se produire sans qu’il y ait une complicité ». Le major, s’il n’a pas écarté l’hypothèse d’une complicité, a fait savoir que son dispositif faisait partie d’une entité globale. Autrement dit, la situation aurait dû alerter d’autres militaires (ceux qui sont à l’entrée de Kosyam, par exemple) avant que son équipe et lui ne prennent les dispositions pour exfiltrer le président Kafando. Mais, lui, il a compris que c’était des éléments ou des militaires du corps qui ont perpétré ces arrestations. Pour son avocat, Me Timothée Zongo, aucun fait du dossier n’accable sérieusement son client concernant les chefs d’inculpation.

L’audition de l’accusé se poursuit ce lundi 3 septembre 2018.

 

 

San Evariste Barro

Lévi Constantin Konfé

Aboubacar Dermé

Hadepté Da

Bernard Kaboré(Stagiaire)

 

 

 

Quand un caporal accuse le président du tribunal

 

Procédant à la vérification de l’identité du caporal Soumaïla Diessongo, le président du tribunal n’a pas omis le fait que le casier judiciaire de ce mis en cause n’est pas vierge : « …vous aviez 24 ans à la date de votre première comparution. Vous avez déjà été condamné …», a lu Seydou Ouédraogo. Sur cette note, la réaction de l’accusé a décontracté à plus d’un titre la salle, même si ce dernier n’entendait visiblement pas amuser la galerie. En effet, il a confisqué la parole au président en ces termes : « Affirmatif, Monsieur le président. C’est dans l’affaire dite Madi Ouédraogo. Je vous rappelle que c’est vous-même qui m’avez condamné. »

Sur ces propos qui avaient le ton d’une accusation, Seydou Ouédraogo a vite remis les pendules à l’heure : « Ce n’est pas moi qui vous ai condamné. C’est plutôt le tribunal. C’est à la majorité que le tribunal décide. Moi seul, je ne peux pas prendre la décision de vous condamner. Avez-vous compris ? » A cette observation, celui qui a déjà écopé d’une peine de 10 ans d’emprisonnement s’est gardé de rebondir.

 

B.K.

 

Et Safiatou Lopez s’invite à la barre !

 

Après l’interrogatoire du caporal Léonce Sow, c’est le soldat de première classe Adama Kaboré que le président du tribunal a convoqué. Mais cet accusé n’aura passé qu’une poignée de minutes à la barre. Et ce, en raison de l’absence de son avocat, Me Silvère Kiemtaremboumbou, par ailleurs avocat de Safiatou Lopez. Alors que cette dernière avait été arrêtée deux jours plus tôt, une perquisition était en cours à son domicile et Me Kiemtaremboumbou était tenu d’y être, a confié une de ses consœurs au tribunal. Même l’interrogatoire de l’accusé, reprogrammé pour l’après-midi n’aura pas lieu. Son conseil, revenu de l’urgence, a une fois de plus  sollicité du président du tribunal un report de l’audition de son client.  Le motif est le même : « Monsieur le président, ma cliente doit être auditionnée demain matin à la gendarmerie », explique Me Silvère.

 

B.K.

 

Le gâteau qui faillit compromettre le major Coumbia

 

Lors de sa déposition, l’adjudant-chef major a expliqué qu’au cours d’un rassemblement, le général Diendéré a demandé aux hommes de rester soudés, quelle que soit la situation. «On nous a parlé de gâteaux qui provenaient d’une association des femmes du Kadiogo en guise de soutien aux ex-RSP ». Interrogé par le parquet militaire, le major a signifié qu’il n’a pas vu les gâteaux en question, a fortiori en avoir mangé. «Manger de ce gâteau ne fait pas de mon client un putschiste, il n’y a pas d’éléments concret dans ce dossier. Que le parquet ait l’honnêteté de le reconnaître », a-t-il plaidé. Mais pour Mamadou Traoré, c’est la symbolique qui entoure ce gâteau qu’il faut percevoir, notamment le fait de soutenir les ex-RSP. Et l’accusé de préciser que l’affrontement ne faisait pas l’unanimité au sein des hommes. Sur ce point d’ailleurs, il a dit à son supérieur hiérarchique que ce n’était pas la peine de mettre en place les groupes non sans avoir fait se marrer l’assistance. En effet, après avoir reçu l’ordre de ce dernier d’organiser les groupes, il a appelé ses supérieurs qui n’étaient plus au camp. «J’ai appelé l’adjudant Nion, il m’a dit qu’il n’était pas là. Quelques instants plus tard, il m’a envoyé un sms qui disait ceci : « ‘’Je suis allé voir la marmite noire, ce n’est pas bon’’ ». Ambiance ! 

 

A.D.

H.D.

Dernière modification lemardi, 04 septembre 2018 01:08

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